Le Divin Sauveur se rend personnellement présent dans notre Eucharistie

 

Vingtième dimanche du temps ordinaire; 19 aoĂ»t 1979; Lectures : Prophètes 9,1-6; ÉphĂ©siens 5,15-20; Jean 6,51-59.

 

 

La Véritable Libération et la Promotion

 

En Lui se trouve la véritable libération, la véritable promotion de l’homme. Nous ne travaillons pas, dit le Christ, uniquement pour le pain qui est périssable, nous ne luttons pas uniquement pour les revendications de la Terre. Tout cela est bon et nécessaire, mais si tout se termine là, nous l’avons dit mille fois, ce sont des libérations tronquées. Le service que le Christ et son Église rendent à nos efforts de libération des esclavages de la Terre, c’est d’élever ces efforts jusqu’à la libération que le Christ, Véritable Sauveur du Monde, nous offre, c’est la libération du péché avant tout.

 

Aucun homme qui demeure esclave du péché, ne peut parler de libération parce qu’il est le premier à avoir besoin de se libérer de la haine, de la vengeance, de la violence injuste, de tout ce qui offense. La libération et la promotion humaine sont nécessaires – avec la promotion du Christ – non seulement à la libération d’un peuple, mais à la libération authentique, à la dignité des fils de Dieu, à ces droits humains qui nous disent en vérité que l’homme et la femme sont faits à l’image et à la ressemblance de Dieu. Aussi béni, libre et digne que soit un homme sur cette terre, mais sans la foi pour être promu à l’altitude de ce Ciel où nous serons citoyens de Dieu pour toujours, ce sera une promotion mutilée, sans un sens transcendant.

 

C’est pour cela que le quatrième Évangile (Jn 6,51-59) nous offre dans le symbole du pain la véritable libération qui enlève le péché et la véritable promotion qui parvient à faire de nous des fils de Dieu et des citoyens de l’éternité auprès de Dieu Notre Père.

Aujourd’hui, le passage qui a Ă©tĂ© lu culmine avec la merveilleuse rĂ©vĂ©lation de l’Eucharistie. Je voudrais, chers frères, que nous illuminions aujourd’hui notre prĂ©sence de chaque dimanche Ă  la Parole qui a Ă©tĂ© lue. Ne venons pas Ă  la messe par curiositĂ© ou par esprit partisan, Ă  des fins simplement humaines, parce qu’ainsi nous demeurerons dĂ©sillusionnĂ©s. La messe ne rĂ©pond pas Ă  ces curiositĂ©s. Si nous venons Ă  la messe que ce soit comme le Christ dit : « Ne me cherchez pas dans le pain qui pĂ©rit, recherchez plutĂ´t le pain de la vie Ă©ternelle. Â» Je voudrais, en terminant ma rĂ©flexion sur cette Parole du Seigneur, que vous et moi, nous nous sentions plus chrĂ©tiens, plus reconnaissant envers le Christ qui nous a donnĂ© la messe de chaque dimanche, l’Eucharistie qui nous alimente dans notre pèlerinage. Cela m’attriste que plusieurs personnes ne ressentent pas cette affection pour la messe, parce qu’ils ne connaissent pas l’Eucharistie ni le don de Dieu.

 

Le Christ commence aujourd’hui son Évangile par cette grande rĂ©vĂ©lation (Jn 6,51) : « Je suis le pain vivant descendu du Ciel. Qui mangera ce pain vivra Ă  jamais! Le pain que je donnerai, c’est ma chair pour la vie du monde. Â» Nous ne nous rendons pas compte, frères, qu’il s’agit lĂ  de la prĂ©sence du Christ en personne, lorsque nous venons Ă  la messe, mĂŞme si nous ne voyons pas son visage comme nous pouvons voir les nĂ´tres, Il est le principal. Mais ainsi, Il est personnellement prĂ©sent : JĂ©sus-Christ. […]

 

 

Plan de l’homĂ©lie :

1) Notre Église, signe sacramentel du Salut des hommes

2) L’Eucharistie, signe de la présence personnelle du Christ

3) Les humains devant ce signe de contradiction (ou nous L’acceptons, ou nous Le rejetons et alors, nous sommes avec le Christ ou nous sommes sans le Christ.)

 

 

1) Notre Église, signe sacramentel du Salut des hommes

 

 

A) Prophétie des biens messianiques sous les apparences d’un palais et d’un festin.

 

DĂ©jĂ  dans la première lecture (Pr 9,1-6) d’aujourd’hui nous pouvons prĂ©sager une Église qui sera signe de la Sagesse de Dieu. (9,1) : « La Sagesse a bâti sa maison, elle a taillĂ© ses sept colonnes, elle a abattu ses bĂŞtes, prĂ©parĂ© son vin, dressĂ© sa table. Â» L’image du banquet, de l’édifice, de la joie et de la magnificence d’un festin est le langage des prophètes. Le Christ ne pouvait donc pas utiliser cette comparaison. C’est prĂ©cisĂ©ment le signe dont saint Jean se sert aujourd’hui, l’allĂ©gresse de manger du pain.

 

 

L’Évangile emploie cette même comparaison dans les paraboles du Règne

 

Combien de fois apparaĂ®t dans l’Évangile ce que la première lecture a mis sur les lèvres de celui qui construit un Ă©difice et prĂ©pare un banquet en envoyant ses servantes inviter tout le monde Ă  ce festin? C’est ce qui apparaĂ®t dans les prĂ©cieuses paraboles du Règne. Le Règne c’est un festin, et celui qui l’a prĂ©parĂ© envoie appeler sur toutes les places de l’Histoire : « Venez, le vin que Je vais mĂ©langer est dĂ©jĂ  prĂŞt, cette richesse que Je veux offrir Ă  tous mes invitĂ©s. Â» Il est merveilleux qu’à chaque dimanche, nous soyons conviĂ©s Ă  ce festin.

 

 

B) Le Concile Vatican II appelle l’Église « sacrement universel du Salut Â»

 

Parce qu’en elle sont rĂ©unis tous les divins moyens que le Divin Sauveur a voulu nous donner pour que les humains soient sauvĂ©s. Hommes et peuples doivent Ă©couter ce que dit saint Paul : « Il ne nous a pas Ă©tĂ© donnĂ© d’autre nom en qui les hommes puissent ĂŞtre sauvĂ©s, en dehors du nom de JĂ©sus-Christ. C’est en Lui seul qu’on trouve la libĂ©ration et le Salut. Â» Et le Christ voulut reprĂ©senter toute cette richesse dans son Église qui est appelĂ©e Ă  un festin. En elle est prĂ©sent le Divin Sauveur avec tous les moyens du Salut.

 

Cela ne veut pas dire que seuls ceux qui sont dans l’Église catholique peuvent ĂŞtre sauvĂ©s. Gardons cela Ă  l’esprit : hors de l’Église il existe de nombreux chemins de Salut, mais il demeure certain par ailleurs que dans l’Église authentiquement fondĂ©e par le Christ et confiĂ©e aux apĂ´tres, ont Ă©tĂ© dĂ©posĂ©s les moyens complets, absolus et remplis du Salut. Plusieurs n’en profitent pas, vivants au sein de l’Église, festin de Dieu, ils prĂ©fèrent encore s’appuyer sur les idoles de ce monde. C’est de ceux-ci dont le Concile dit : « Ils sont dans le corps de l’Église, mais ils ne sont pas dans le cĹ“ur de l’Église. Â» Ainsi, comme au contraire ceux qui n’ont pas connu l’Église catholique, mais qui veulent se sauver en suivant leur religion, « sont dans le cĹ“ur de l’Église mĂŞme s’ils ne se trouvent pas dans son corps. Â» Il est bien mieux d’être du cĹ“ur, mais encore meilleur d’être du cĹ“ur et du corps de l’Église. Un bon catholique qui sait qu’en son Église, Dieu a dĂ©posĂ© tous les merveilleux moyens du Salut, doit en profiter et vivre de cette richesse que le Seigneur a placĂ©e si près de ses mains.

 

 

Pourquoi nous a-t-Il communiqué le Salut à travers les sept sacrements?

 

Depuis le catéchisme, nous avons appris que l’Église a sept sacrements. L’Église sacramentelle est elle-même un sacrement universel du Salut. Mais pourquoi? Parce que le Christ agit à travers les sacrements qui ne sont qu’administrés par des hommes, qu’il s’agisse d’un prêtre ou d’un évêque. Nous ne sommes que d’humbles instruments du Dieu qui baptise véritablement, qui pardonne, qui alimente. Gardons cela à l’esprit, parce que très souvent dans l’administration des sacrements nous avons un comportement personnaliste, comme si tel prêtre ou tel autre avait de meilleurs sacrements qu’un autre. Cela ne dépend pas de la sainteté ou de la méchanceté d’un prêtre!

 

Ce grand Ă©crivain italien, Manzoni, disait : « Quand je m’agenouille pour demander pardon de mes pĂ©chĂ©s devant un prĂŞtre, peu m’importe de savoir s’il a, peut-ĂŞtre, davantage besoin du pardon que moi. Il peut ĂŞtre un grand pĂ©cheur, mais, au moment oĂą il me dit “je t’absous de tes pĂ©chĂ©s au nom du Père, du Fils et de l’Esprit saint”, je suis pardonnĂ©. Non par lui, ce n’est pas lui qui me pardonne, mais Dieu au moyen de lui. Â» Un protestant converti au catholicisme Ă©crivait : « Comme j’étais dans l’erreur, je croyais que les sacrements Ă©taient comme des entraves entre le Christ et moi. Et je voulais me sauver par ma foi en JĂ©sus-Christ, je repoussais les sacrements en voulant m’entendre directement avec le Christ. Mais, maintenant que j’y ai rĂ©flĂ©chi, je vois qu’il n’existe aucun paravent entre le Christ et moi, sinon que les sacrements sont des actions du Christ lui-mĂŞme. Quand je vais dire mes pĂ©chĂ©s Ă  un prĂŞtre, ce n’est pas Ă  lui que je m’adresse, sinon au Christ qui est en lui et qui Ă  travers ses lèvres me dit “je te pardonne.” Â» De mĂŞme, lorsque la main du prĂŞtre qui baptise, ce n’est pas le prĂŞtre qui enlève le pĂ©chĂ© originel, mais la vertu de la RĂ©demption du Christ qui envoya cet homme. « Allez et baptisez en mon nom Â» : non le vĂ´tre, mais celui de Dieu.

Les sept sacrements […] sont sept canaux par où le Divin Rédempteur, au moyen de son Église sacramentelle, sauve les hommes et la société, par lesquels Il sanctifie l’amour de l’homme et de la femme dans le foyer fécond ou dans la mission du prêtre qui par vocation se consacre à cette tâche si difficile de poursuivre la mission de Jésus-Christ, la Rédemption des hommes.

 

 

Les sacrements sont des signes d’appartenance à l’Église

 

Grâce aux sacrements, nous bĂ©nĂ©ficions des biens de la RĂ©demption, encore plus, nous devons comme dit Paul VI : « Signifier notre appartenance Ă  l’Église, en le manifestant par les sacrements. Â» Personne ne peut dire : « Je suis catholique, mais je n’ai pas besoin de me confesser. Â» C’est que ces signes, ces sacrements, sont des manifestations de notre appartenance au Christ. De telle sorte que personne ne peut prĂ©tendre appartenir Ă  l’Église s’il dĂ©prĂ©cie les signes de son appartenance. L’Église est la continuatrice et la dĂ©positaire de tous les moyens du Salut que le Christ lui a laissĂ©s. 19/08/79, p.178-180, VII.

 

 

2) L’Eucharistie, signe de la présence personnelle du Christ

 

Saint Jean complète le rĂ©cit des Ă©vangiles synoptiques et il nous dĂ©crit la prĂ©sence du Christ dans l’eucharistie. Observez bien que dans les autres sacrements le Christ n’est pas prĂ©sent en personne. Dans le baptĂŞme, c’est seulement la vertu rĂ©demptrice du Christ qui au moyen du prĂŞtre, de l’Église, pardonne le pĂ©chĂ© originel de l’enfant et l’incorpore pour qu’il devienne fils de Dieu, mais le Christ n’est pas prĂ©sent personnellement dans le baptĂŞme. De mĂŞme dans la confirmation, oĂą l’évĂŞque impose les mains et oint avec le chrĂŞme sacrĂ© le front du chrĂ©tien, ce n’est pas le Christ personnellement qui est prĂ©sent, sinon que par sa vertu, au moyen de l’évĂŞque, Il lui donne l’Esprit saint de la confirmation. De mĂŞme pour la pĂ©nitence oĂą le Christ n’est pas personnellement prĂ©sent, sinon qu’Il pardonne virtuellement Ă  travers le prĂŞtre. Dans l’onction des malades, c’est aussi une prĂ©sence virtuelle, c’est-Ă -dire que la vertu, le pouvoir du Christ est lĂ , mais Il n’y est pas prĂ©sent en personne. Ni non plus dans le sacrement du mariage et de l’ordination sacerdotale, les deux qui se marient sont des ministres de la prĂ©sence du Christ, ils reprĂ©sentent la bĂ©nĂ©diction de son amour. Il en est de mĂŞme pour l’ordination sacerdotale. Mais il y a un sacrement oĂą Il est personnellement prĂ©sent et c’est ce que nous allons Ă©tudier ce matin. (Jn 6,51) : « Le pain que Je donnerai, c’est ma chair pour la vie du monde. Â»

 

 

A) Il affirme sa présence

 

 

Avant tout, nous avons ici, dans cette Parole de l’Évangile l’affirmation d’une prĂ©sence personnelle : « Le pain que Je donnerai est ma chair. Â» Dimanche dernier, j’ai expliquĂ© ce que signifiait la chair, c’est-Ă -dire l’homme, la personne humaine. Quand le Christ dit « Le pain que Je vous annonce est ma personne, moi-mĂŞme Je suis prĂ©sent dans ce pain de vie Ă©ternelle. Â», et quand les juifs doutaient en disant (Jn 6,52) « Comment celui-lĂ  peut-il nous donner sa chair Ă  manger? Â», le Christ, qui sait qu’ils l’ont bien entendu et qu’il s’agit de Lui comme chair et sang, ne se rĂ©tracte pas et s’affirme. (Jn 6,53) : « En vĂ©ritĂ©, en vĂ©ritĂ©, je vous le dis, si vous ne mangez la chair du Fils de l’homme et ne buvez son sang, vous n’aurez pas la vie en vous. Qui mange ma chair et boit mon sang a la vie Ă©ternelle! Â»

 

 

Lorsqu’on Le comprend mal, le Christ corrige : la renaissance de Nicodème.

 

La rĂ©action du Christ paraĂ®t diffĂ©rente devant la mauvaise interprĂ©tation de Nicodème. Le Christ lui dit : « Si tu ne renais de nouveau, tu ne pourras pas entrer au Royaume des cieux. Â»

Nicodème interprète cela au pied de la lettre : « Comment un homme pourrait-il se faire petit et retourner dans le sein de sa mère pour naĂ®tre Ă  nouveau? Â» Le Christ le corrige : « Non, ce n’est pas ce que tu penses, renaĂ®tre signifie se faire baptiser, se rĂ©nover intĂ©rieurement. Â»

 

 

L’eau qui étanche la soif de manière définitive

 

Quand la Samaritaine entend ce que le Christ lui dit : « Celui qui boit de cette eau aura encore soif, mais celui qui boira l’eau que je lui donnerai n’aura plus jamais soif. Â» La Samaritaine interprète cela au pied de la lettre et Lui dit : « Donne-moi de cette eau pour que je n’aie plus Ă  venir chaque jour Ă  ce puits pour puiser de l’eau. Â» Et le Christ la corrige : « Il ne s’agit pas de l’eau de ce puits, mais de celle de la grâce, de la vie Ă©ternelle, du don de Dieu qui nous conduit Ă  la vie Ă©ternelle. Â» Je veux dire que quand l’Évangile nous prĂ©sente le Christ et que ces contemporains l’interprĂ©taient mal, Il les corrigeait.

Quand on l’entend comme Il le veut, mĂŞme s’il s’agit d’un mystère que l’être humain ne comprend pas, Il le rĂ©affirme et le prĂ©cise. Le cas du pain qui est sa chair et de son sang qui est nourriture, c’est ainsi qu’ils l’ont compris et Il rectifie : « Oui, Je donnerai ma chair et mon sang et vous devrez la manger et le boire pour avoir la vie Ă©ternelle. Â»

 

Le Concile de Trente prĂ©cise cette prĂ©sence comme Ă©tant « vĂ©ritablement-rĂ©ellement-substantiellement Â»

C’est pourquoi le Concile de Trente mit ses trois mots dans la prĂ©sence du Christ face aux ennemis de l’Eucharistie. Ă€ ceux qui demandent « Comment le Christ pourrait-Il ĂŞtre prĂ©sent dans ce petit morceau de pain et dans cette coupe de vin? Â», le Concile, s’inspirant des Paroles de l’Évangile, rĂ©pond : « Le Christ est vĂ©ritablement prĂ©sent, rĂ©ellement prĂ©sent, substantiellement prĂ©sent. Â» Ce sont lĂ  trois nuances d’une prĂ©sence personnelle qui rĂ©pond aux objections de ceux qui disent qu’il se peut qu’Il soit prĂ©sent, mais seulement sous la forme d’un signe : « Prenez et mangez, cela signifie mon corps Â». Ce n’est pas ainsi. VĂ©ritablement, ceci est mon corps, rĂ©ellement, en rĂ©alitĂ© et substantiellement. C’est ce qu’il nous faut bien comprendre. Nous n’allons pas entendre manger le Christ comme des anthropophages, il ne s’agit pas de cela.

 

 

B) Le Christ précise sous quelle forme est cette chair qu’Il nous offre. […]

 

 

C’est sa chair qui donne la vie au monde

 

Premièrement, sa chair offerte sur la croix est le pain pour la vie du monde. C’est une expression du Christ donnant sa vie pour le monde. (Jn 6,63) : « C’est l’esprit qui vivifie, dit le Christ, la chair ne sert de rien. Â» Et la chair que le Christ nous offre, est sa vie pour le monde, celle qui rĂ©concilia les humains avec Dieu, c’est-Ă -dire, comme nous allons le dire dans quelques instants dans l’Eucharistie : « Nous annonçons ta mort, nous proclamons ta RĂ©surrection. Â» C’est cela la chair personnelle du Christ dans l’Eucharistie, un Christ qui mourut criblĂ© de douleurs, dans sa chair et dans son sang. « Le sang qui a Ă©tĂ© versĂ© pour la rĂ©mission de nos pĂ©chĂ©s. Â» Ce Corps et ce Sang que nous recueillons dans notre messe sont la prĂ©sence personnelle du Christ est le moment culminant de la RĂ©demption.

 

Une autre chose merveilleuse, c’est la vie du Christ unie Ă  la vie du Père. (Jn 6,57) : « Je vis par le Père, de mĂŞme que celui qui me mange, lui aussi vivra par moi. Â» Autrement dit, un courant de vie. Je ne suis pas plus que le Dieu fait homme. Je vais inventer un moyen pour que cette chair d’homme soit un aliment qui vous apporte la vie de Dieu. Celui qui s’alimente de ce corps et de ce sang sous les espèces du pain et du vin, ne mange pas simplement une nourriture humaine, sinon qu’il s’agit de la chair du Fils de Dieu oĂą se conjugue l’humain et le divin, oĂą Dieu se fait aliment pour les ĂŞtres humains.

N’oublions pas ces deux conditions : Le Christ offrant sa chair sur la croix et le Christ uni dans l’intimitĂ© divine avec le Père. C’est cela la chair qui nous est donnĂ©e et que nous devons manger. C’est la chair de l’Eucharistie. C’est la prĂ©sence personnelle du Christ. Ce n’est pas seulement sa vertu, sa chair y est personnellement prĂ©sente ainsi comme Il vient de nous le dĂ©crire : uni au sacrifice de la Croix qui sauve le monde et uni Ă  la vie Ă©ternelle du Père. Lui seul peut nous assurer des choses si inaudibles (Jn 6,53-54) : « Si vous ne mangez la chair du Fils de l’homme et ne buvez son sang, vous n’aurez pas la vie en vous. Qui mange ma chair et boit mon sang a la vie Ă©ternelle! Â»

 

 

C) La Présence du Christ est aussi décelable par ces effets

 

 

« Vous vivrez pour toujours… non pas comme la manne… Â»

 

Sacrement eschatologique

 

Vos pères ont mangé la manne, ce pain mystérieux qui rassasiait la faim quotidienne de l’estomac, ceux qui mangèrent de la manne moururent également, mais celui qui mangera de ce pain ne mourra pas, il aura la vie éternelle. L’effet de l’Eucharistie est de nous rendre immortels, de nous faire participer de la vie même de Dieu qui ne périt pas, de la vie du Christ ressuscitée, parce qu’une fois ressuscités, dit la Bible, nous ne pouvons plus mourir! Ce qui veut dire, très chers frères, que le sacrement de l’Eucharistie est le sacrement eschatologique. Nous l’avons déjà expliqué à quelques reprises. Le point définitif de l’Histoire, vers où se dirigent les rivières humaines, la mer où nous allons tous déboucher, se nomme l’eschatologie, l’ultime, la fin. Le Christ nous apporte déjà, dans la présence de l’Eucharistie, non seulement le message, mais également la réalité dans sa propre chair pour celui qui communie. Celui qui vient à la messe le dimanche, celui qui se prosterne devant le Saint Sacrement, saisit cette dimension eschatologique, il est déjà devant l’éternité, il savoure déjà la vie de Dieu.

 

Un autre effet qui apparaĂ®t dans la Parole du Christ aujourd’hui : « Il habite en moi et moi en Lui. Â» Il rend la vie surnaturelle en nous identifiant Ă  Lui.

 

Quelle chose plus incroyable (Jn 6,56) : « Qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui. Â» Pensez-y, ceux qui vont communier ce matin, quel moment plus divin : « Le Christ habite en toi et tu habites en Lui. Â» C’est-Ă -dire qu’il existe une communion qui peut aller jusqu’à dire ce que disait saint Paul : « Je ne vis plus, c’est le Christ qui vit en moi. Â» Cette transformation est loin d’être comprise lorsqu’on n’a pas la foi, mais lorsque nous avons la foi il se produit ce dont j’ai Ă©tĂ© tĂ©moin hier dans ces deux communautĂ©s religieuses. LĂ -bas, Ă  Usulutan, la première chose que les Franciscaines m’apprirent : « Voyez comment notre maison est arrangĂ©e, simple, mais propre. Regardez la petite chapelle, le plus beau de cette maison. Â» LĂ  oĂą il y avait auparavant un salon de beautĂ© a Ă©tĂ© Ă©levĂ© le Saint Sacrement parce que pour la communautĂ© il n’existe rien de plus beau que cet endroit oĂą le Christ habite avec les religieuses et oĂą les religieuses vivent avec Lui. Et hier soir, lorsque j’ai Ă©tĂ© cĂ©lĂ©brĂ© au Bon Pasteur, la neuvaine de la Mère Marie Mercedes, morte il y a neuf jours, lĂ  aussi le Saint Sacrement Ă©tait le principal. Lorsqu’on comprend ce qu’est l’hostie consacrĂ©e, nous voudrions avoir le ciel pour la dĂ©poser. Cela me chagrine de penser aux Ă©glises abandonnĂ©es, aux tabernacles poussiĂ©reux, sans fleur. Une Ă©glise oĂą n’est pas estimĂ©e la vie eucharistique indique qu’il y a peu de foi. […] 19/08/79, p.180-184, VII.

 

 

3) Les humains devant ce signe de contradiction

 

Les hommes et les femmes sont devant ce signe de l’eucharistie, de l’hostie consacrĂ©e, pourrions-nous dire : signe de contradiction. Certains l’aiment jusqu’à la folie et d’autres le dĂ©prĂ©cient jusqu’à la haine ou n’en font pas de cas parce qu’ils n’ont pas la foi.

Dans les lectures d’aujourd’hui nous rencontrons, dans les trois lectures, les hommes sont précisément catalogués selon leur position face à la Sagesse de Dieu qui s’incarne dans le Christ.

Ainsi, nous pouvons dire avec la première lecture, les insensés, ceux qui manquent de jugement, ceux qui rejettent l’œuvre de la Sagesse. Et par ailleurs, les prudents, ceux qui s’alimentent de la science de Dieu, ceux qui apparaissent peut être, moins intelligents selon le monde, mais qui possèdent la Sagesse de Dieu qui se donne dans la sainte Eucharistie où le Christ est présent.

 

Dans la seconde lecture (Ep 5,15-20), saint Paul nous prĂ©sente une catĂ©gorie d’hommes insensĂ©s, Ă©tourdis, ivrognes, libertins. Ne soyez pas ainsi, dit saint Paul, sinon de l’autre classe, de celle des sensĂ©s, de ceux qui accomplissent la volontĂ© de Dieu, laissez-vous remplir de l’Esprit et faites de la vie une joyeuse liturgie (Ep 5,19) « RĂ©citez entre vous des psaumes, des hymnes et des cantiques inspirĂ©s; chantez et cĂ©lĂ©brez le Seigneur de tout votre cĹ“ur. Â» Comme la vie devient belle lorsque la foi l’illumine et lorsqu’on sait que notre corps, qu’il soit sain ou infirme, uni Ă  l’hostie consacrĂ©e qui est reçue lors de la communion, est une vie et un corps qui deviennent hosties! Tous les actes de notre vie, tous les devoirs que nous accomplissons, tous les sacrifices que nous faisons, tout se convertit en Christ crucifiĂ©, la chair qui sauve le monde; et je l’appuie par mes sacrifices, par ma petite hostie, par ma petite goutte d’eau dans le calice de vin Ă  laquelle tout se convertit. LĂ  oĂą nous ne pouvons plus distinguer la goutte d’eau du calice de vin, sinon qu’on n’y perçoit que le sang qui a Ă©tĂ© versĂ© pour le Salut du monde. Alors, la vie des hommes devient liturgie, nous sommes tous prĂŞtres, quel que soit notre travail, lorsque nous travaillons unis au Seigneur.

 

Le Christ Notre Seigneur distingue les hommes selon leur réaction à sa grande promesse, ceux qui doutent de Lui ou bien ceux qui le comprennent d’une manière si matérielle qu’ils le considèrent presque comme un anthropophage. Ce n’est pas ainsi que le Christ veut être compris, c’est un langage si délicat qu’il ne peut être compris par cette mentalité grossière du monde qui ne veut entendre par ce mot que la chair du plaisir, la chair pour l’exploitation, la chair pour se pavaner, la chair de l’orgueil, la chair qui idolâtre les idoles de la Terre. Il est clair que ce n’est pas cette chair que le Christ nous donne. Mais la chair divinisée par le sacrifice de la Croix et unie à Dieu dans le mystère de l’Incarnation, cette chair est divine et c’est celle que le Seigneur nous offre, celle qu’entendent ceux qui ont la foi mais que ne comprennent pas ceux qui ont perdu la foi ou qui ne l’ont pas. Je voudrais qu’à la lumière de cette réflexion, nous analysions à quelle classe d’hommes nous appartenons. […]

 

VoilĂ  pourquoi je me rĂ©fère Ă  mes chers prĂŞtres. Avez-vous dĂ©jĂ  pensĂ©, mes frères, que le sacrement de l’Eucharistie est nĂ© jumeau avec le sacrement de l’ordination sacerdotale? Pour maintenir ce trĂ©sor du pain de vie qui donne la vie au monde, le Christ inventa en cette mĂŞme nuit le sacerdoce qu’Il communiqua aux hommes. Lui, le PrĂŞtre Éternel. Il cĂ©lĂ©bra la première messe et rĂ©partit la première communion, mais Il dit aussitĂ´t Ă  ses apĂ´tres : « Faites cela en mĂ©moire de moi. Â» Alors, les prĂŞtres naquirent avec la charge de maintenir l’Eucharistie. C’est notre principale mission, mais en donnant Ă  l’Eucharistie tout son sens, non seulement rĂ©partir des hosties consacrĂ©es, sinon en expliquant ce que signifie de racheter un peuple, de sauver les hommes pour qu’en venant communier ils se sentent vraiment promus. C’est pourquoi nous insistons autant sur le fait qu’il faille recevoir les sacrements avec plus de conscience, que personne ne devrait communier s’il ne se sent pas vĂ©ritablement responsable du pain qui donne la vie au monde. 19/08/79, p.184-185, VII.