Le Peuple de la Nouvelle Alliance
Vigile Pascale; 14 avril 1979;
Lectures : Genèse 1,1-31.2,1-2; Genèse 22,1-18; Exode 14,15-31,15,1; Isaïe
54,5-14; Isaïe 55,1-11; Baruc 3,9-15.4,1-32; Ézéquiel 36,16-28; Romains 6,3-15;
Marc 16,1-18.
Plan de l’homélie :
1) La Résurrection, clé de toute la
révélation divine
2) L’Église dépositaire et témoin de
la RĂ©surrection
3) Les baptisés, participent au même
Esprit qui ressuscita JĂ©sus
1) La Résurrection, clé de toute la
révélation divine
En premier lieu, je vous invite,
chers frères et sœurs, à adorer cette Résurrection en tant que clé de toute la
Révélation du Seigneur. (Jn 20,8-9) « Il vit et il crut. En effet,
jusqu’alors il n’avait pas compris l’Écriture qui disait qu’Il devait mourir et
ressusciter d’entre les morts… » […]
A) Il leur manquait la clé qui devait
rendre cohérente leur expérience de disciples
Tant que le Christ n’était pas
ressuscité, il manquait aux disciples une clé d’interprétation. On ne pouvait
pas expliquer la conduite, la doctrine, les miracles et toutes les merveilles
du Rédempteur, si la Résurrection ne s’était pas produite. Tout est mystère
dans le Christ, tant que ne s’était pas produit ce qu’Il ne cessait
d’annoncer : « Mon heure arrive! » Pourquoi disait-Il cela?
« Le Fils de l’homme sera livré,
Il sera outragé, Il va être crucifié et le troisième jour Il
ressuscitera. » Ce n’était que des paroles, ils ne comprenaient pas
comment un Fils de Dieu fait homme, devait être autant humilié. Il se produisit
des crises nombreuses dans la foi des disciples tant qu’ils n’eurent pas vécu
cette grande manifestation.
Tout le mystère du Christ possède une
clé : la glorification… après l’humiliation
Dans la seconde lecture
d’aujourd’hui, nous retrouvons tout le récit de la vie de Jésus. (Ac
10,38) : « Pierre, s’adressant au centurion (Corneille) et à un
groupe de paĂŻens, leur raconte comment eux, les disciples, virent JĂ©sus, oint
par Dieu dans la force de L’Esprit, qu’Il passa en faisant le bien et en
soignant les opprimés parce que Dieu était avec Lui. Nous sommes
témoins. » C’est une vie merveilleuse qu’ils vécurent avec le Seigneur,
mais il y avait une absence.
Toute l’Écriture…
Quel est le dénouement de tout cela?
« Toute l’Écriture, nous dit le Concile Vatican II, que c’est dans le
Christ que se retrouve la clé de tout l’Ancien Testament et de tout ce qui
s’est écrit et s’est dit sur le Christ. C’est seulement une fois que le Christ
est ressuscité que l’Écriture s’illumine et que nous pouvons apercevoir le
grand mystère de Dieu, de toute son œuvre depuis la création, qui culmine dans
la résurrection de son Fils. »
La Création… l’être humain… Dieu… Le
Judaïsme, la loi… la récapitulation de l’œuvre de Dieu
Pourquoi Dieu forma-t-Il un peuple
dans l’Ancien Testament? Pourquoi Dieu vit-Il que tout cela était bon? Pourquoi
d’un ancien comme Abraham, fait-Il surgir un peuple aussi nombreux que les
Ă©toiles du ciel et les grains de sable de la mer? Pourquoi Dieu se
préoccupe-t-Il d’un peuple esclave en Égypte et le libère-t-Il des fouets des
chefs de corvée, pour le conduire au travers du désert, par de grands miracles,
jusqu’à la Terre promise? Quel sens a le langage des prophètes? Que signifie le
Serviteur de Yahvé, qui est un Fils de Dieu qui vient non seulement dans la
gloire et la majesté, sinon qu’Il sera humilié, qu’Il offrira son corps aux
coups de fouet, et auquel on crachera au visage? Que peut bien vouloir dire
tout cela?
Il était nécessaire que la nature
elle-mĂŞme soit ahurie le Vendredi saint et encore plus dans la nuit du sabbat
pour qu’Il ressuscite afin que tout cela : le sens du peuple élu de Dieu,
le sens d’une nature si belle, créée pour les êtres humains, et resplendissante
dans la splendeur de la
grâce. Si aujourd’hui nous gémissons sous le poids des
injustices, des abus des pécheurs, ce n’est pas cela la destinée que Dieu a
donnée à toutes choses. Nous, les humains, nous ne faisons rien d’autre que de
créer des énigmes. Et nous rendons la création davantage énigmatique lorsque
nous la soumettons au péché de l’égoïsme, de l’avarice et de l’injustice. Il
est nécessaire d’apercevoir la Rédemption uniquement à la lumière du Christ qui
meurt et même alors, le mystère devient encore plus obscur quand le Christ
demeure mort sur la Croix. C’est
ainsi que terminent les justes! Cela vaut-il la peine d’être bon pour terminer
sur une croix?
Est-ce nécessaire d’être si passif,
de ne pas employer la force de la violence pour renverser toutes les injustices
du monde par la force des armes? Dieu ne pouvait-Il pas envoyer une armée
d’anges et en finir une fois pour toutes avec tous les persécuteurs du Christ et
de son Église? Ça, c’est la pensée mesquine des hommes. Ceux qui veulent
arranger la situation du monde par la force de la violence devraient réfléchir
comme Jean au tombeau du Christ ressuscité et comprendre : maintenant
qu’Il est ressuscité, maintenant que tous ses ennemis fuient épouvanter,
maintenant qu’ils veulent faire taire la voix du Ressuscité en disant :
« Nous allons dire que pendant que vous dormiez, ses disciples sont venus
et ont dérobé son corps. » Mais qui peut cacher le soleil avec un doigt?
La Résurrection est un soleil qui resplendit et nul ne peut cacher l’humiliante
situation des ennemis du Seigneur.
B) Le Christ Ressuscité :
C’est le début d’une création
nouvelle.
Seulement à la lumière de la
Résurrection et du triomphe de l’Humilié, du Torturé, de l’Opprimé qu’est le
Christ qui se fit obéissant jusqu’à la croix et qui a maintenant reçu de Dieu
« un nom qui est au-dessus de tout autre, pour qu’au nom de Jésus,
s’agenouillent toutes les créatures du Ciel, de la terre et des abîmes. » Il
a reçu cette glorification qui explique le mystère de la douleur. C’est cette
gloire qui donne son sens à toutes les douleurs de l’humanité. C’est le sens de
Pâques : le Christ ressuscité est le Prince d’une nouvelle création. Nous
comprenons maintenant que mettre dans le Christ ressuscité toute notre
espérance, même lorsqu’il s’agit d’une situation désespérée, c’est s’accrocher
Ă Celui qui me sauvera de toute situation.
Sens eschatologique des valeurs de la
vie (« les biens d’en haut »… en contexte plus général :
« ce qui nous fait agir pour des motifs suprêmes »…).
Saint Paul nous a écrit aujourd’hui,
en commentant la Résurrection du Seigneur, que si nous sommes ressuscités avec
le Christ nous devons rechercher les choses d’en haut. Cela ne signifie pas que
nous devons ĂŞtre Ă©trangers aux choses de ce monde, cela signifie de regarder
les occupations de la Terre à partir de la perspective d’en haut, cela veut
dire de travailler à ces mêmes libérations et à ces mêmes revendications de la Terre. Nous n’allons
pas y parvenir par la violence ni par les armes, nous allons y parvenir avec
les perspectives du triomphe du Christ.
C’est pour cela que j’ai écrit dans
ma lettre pastorale sur les relations entre l’Église et les organisations
politiques populaires : « L’Église ne peut pas s’identifier avec
aucune lutte armée. L’Église ne provoque aucune violence. L’Église n’est pas la
guérilla, ni un groupe qui recherche des libérations immédiates de type
économique, sociale ou politique. L’Église comprend tout cela et elle encourage
les hommes et les femmes qui possèdent une vocation politique, à s’organiser et
à travailler pour une libération juste sur la Terre. Mais elle ne
demeurera pas avec les libérations de la Terre. » Elle dira
toujours : « Plus loin », c’est au-delà que se situe la véritable
Libération. La Libération que le Christ apporta est celle qui
se voit au travers des biens d’en haut. Et depuis les biens d’en haut, depuis
l’éternité, depuis la libération profonde du péché que le Christ réalisa sur la
Croix, c’est de là que se réaliseront les véritables libertés du monde.
C) Les libérations sans le Christ ne
sont pas complètes et elles peuvent même parfois être dommageables
Vous ne pouvez pas construire la
liberté tant que vous avez le péché dans votre cœur. À quoi servent les
changements de structures? À quoi servent les violences et la force armée, si
cela se fait avec la haine, si cela se fait uniquement pour maintenir le
pouvoir ou pour s’en emparer pour se convertir aussitôt en tyran par de
nouvelles formes de tyrannies? Ce que nous recherchons dans le Christ c’est la
véritable liberté, celle qui transforme le cœur, celle qui nous dit
aujourd’hui : avec le Christ ressuscité, recherchez les critères d’en
haut. Voyez la liberté de la Terre, les oppressions de cette situation injuste
au Salvador, non pas seulement à partir d’ici-bas, mais à partir d’en haut. Non
pas pour devenir conformistes, parce que le chrétien sait lutter, mais il sait
que sa lutte est encore plus forte, encore plus courageuse quand il s’inspire
de ce Christ qui sut donner plus que l’autre joue et qui se laissa clouer sur
une croix. Mais depuis cette crucifixion du Christ obéissant, Il a racheté le
monde et Il chante la victoire définitive, celle que ne peut pas être employée
à d’autres fins, ceux qui ne recherchent pas, comme Lui, la véritable
libération du genre humain.
C’est cela, la libération qui ne peut
pas être comprise sans le Christ ressuscité. Très chers frères, surtout vous
qui avez tant de sensibilités sociales, vous qui ne tolérez pas cette situation
injuste et qui avez une vocation politique, béni soit Dieu! Cultivez-la, mais
surtout, ne perdez pas cette vocation, cette sensibilité politique et sociale
par la haine, les vengeances et les violences de la Terre.
Élevez-vous, haut les cœurs! Regardez
les choses d’en haut.
Celui qui illumine et qui inspire
toutes les libérations de la Terre ne doit pas être un homme, ni une idéologie,
encore moins athée, sans Dieu, sans le Christ. Le grand inspirateur de la
libération de notre patrie, des hommes, est l’Unique Libérateur : Le
Christ ressuscité, Celui qui ce matin chante la véritable victoire sur toutes
les oppressions de la
Terre. Le Christ qui est maintenant dans la gloire du Père,
peut défier les pouvoirs de Ponce Pilate et de l’Empire Romain, de même que le
fanatisme des dirigeants spirituels d’Israël, de ses prêtres et de cette
religion dont le sens avait été perverti. Le Christ, à partir de sa
résurrection, défie tous les libérateurs de la Terre et leur dit :
« Vous n’allez pas libérer! Seul demeure la libération qui persiste, celle
qui libère des chaînes du cœur de l’homme : le péché, l’égoïsme. Celui qui
a brisé les verrous de la mort et de l’enfer, celui qui a laissé le sépulcre
vide et qui invite tous les hommes à mourir contents pour qu’à l’heure de la
Résurrection universelle, eux aussi puissent défier les tombes de nos
cimetières. »
« Mort où est ta
victoire? »
Tout le reste meurt, tout le reste
est péché, tout le reste est haine et violence, tout le reste est sang,
séquestrations et assassinats. Tout cela n’est pas la libération, tout ceci est
enterré avec les vieilles choses que le Christ laissa pour nous donner la
nouveauté de la vie véritable que seulement le véritable chrétien pourra vivre.
Puisse Dieu, les fanatiques de la violence et du terrorisme, puisse Dieu ceux
qui croient qu’avec la répression et la force ils peuvent arranger les choses,
apprennent que ce ne sont pas lĂ les voies du Seigneur, sinon celles-ci :
les humbles chemins du Christ par l’obéissance à la loi du Seigneur, par le
respect et l’amour, et celui qui livre maintenant aux hommes la véritable
libération pour celui qui désire en profiter : Le Christ est la clé de la
Révélation de Dieu. 14/04/79, p.290-294, VI.
2) L’Église dépositaire et témoin de
la RĂ©surrection
A) Nous sommes témoins… Le Kérygme
des premières communautés
Saint Pierre, qui s’adresse pour la
première fois à un groupe de gentils, va être le témoin que Dieu ne fait pas
acception des personnes, que la religion n’appartient plus uniquement Ă
l’Alliance d’Abraham et au peuple d’Israël, que le Christ ressuscité a brisé
les barrières qui séparaient les hommes et que le baptême qui apporte la
Rédemption chrétienne peut être reçu de tous, des Romains et des païens. Il
leur dit dans ce précieux sermon que nous avons entendu aujourd’hui (Ac 10,38
et 42-43) : « Nous sommes témoins de tout ce que Jésus a fait… Il
nous a enjoint de proclamer au Peuple et d’attester qu’il est, lui, le juge
établi par Dieu pour les vivants et les morts. C’est de lui que tous les
prophètes rendent ce témoignage que quiconque croit en Lui recevra par son Nom,
la rémission de ses péchés. »
En d’autres mots, ce Christ qui par
sa Résurrection a reçu du Père l’héritage promis dans tant d’alliances de
l’Ancien Testament, jusqu’à devenir réalité dans le Christ qui nous apporta la
vie éternelle, fonda une Église sur les bases du témoignage de ces quelques
hommes qui ont été témoins de la Résurrection. Pierre
et Jean ont couru au sépulcre et ils l’ont vu vide. Mais davantage que le
sépulcre vide, qui ne dit rien non plus à Marie-Madeleine, inspirés par
l’Esprit saint, qui les assure dans leur foi : le Christ est vivant! Le
Christ n’est plus mort! Le Christ est le juge vivant des vivants et des morts!
Le Christ est celui qui possède le pouvoir de pardonner tous les péchés des
hommes! La Résurrection a ratifié, a mis la signature finale de Dieu au pouvoir
du Christ pour pardonner toutes ses fautes Ă celui qui se repent. Nous sommes
témoins de tout cela. […]
Jamais comme maintenant, très chers
frères et sœurs, catholiques de 1979, l’Église n’a eu une conscience aussi
claire de sa mission d’évangéliser. Jamais elle n’avait compris une
évangélisation aussi pleine qui inclut la prédication de la Parole de Dieu,
l’annonce de la Bonne
Nouvelle que le Christ a apporté le Règne de Dieu sur la Terre. Et avait-elle
associé cela aux réponses des personnes qui se confessent, qui se marient dans
l’Église, qui se font baptiser et qui se font confirmer.
Les sacrements sont indispensables
pour manifester au Christ que nous acceptons son Alliance. Les sacrements comme
la Parole, est le courant qui s’établit entre l’Alliance de Dieu et les hommes.
Nous ne pouvons pas être des catholiques véritables si nous ne recevons pas les
sacrements. Nous ne pouvons pas non plus bien recevoir ces sacrements si nous
ne comprenons pas la Parole de Dieu. C’est pourquoi nous ne donnons plus de
sacrements sans évangélisation, sans préparation sacramentelle des parents ou
de celui qui va être baptisé, qui va être confirmé, qui va recevoir la première
communion, le sacrement du pardon ou qui va se marier. […]
B) Non pas exclusivement, parce qu’il
existe de nombreux éléments de vérité et de grâce en dehors de l’Église, mais
ils proviennent du Christ…
Cette Église qui a reçu la charge des
dons de la Résurrection pour les répartir, ne possède pas l’exclusivité de ce
pouvoir. Ayons le cœur très large pour dire comme le Concile Vatican II :
« En dehors de l’Église, il y a de nombreux éléments de vérité et de grâce
qui appartiennent au Christ RĂ©dempteur. Les hommes qui vivent en dehors de
l’Église et qui sont de bonne volonté, même s’ils n’ont pas connu la vérité de
notre Église, seront sauvés. Et qui sait, chers catholiques, qui sait s’il ne
se sauvera pas avec davantage de mérite que nous qui possédons les plénitudes
des moyens. Être catholique, ce n’est pas notre mérite, c’est par la grâce de
notre Seigneur que nous le sommes. Avoir la foi est un don de Dieu. »
Nous pourrions dire comme le
Christ : combien désirèrent voir le Jour du Seigneur et ne le virent pas.
Combien de païens aimèrent bien plus le Christ et répandirent bien plus
l’Église? Combien obéiraient davantage à leurs pasteurs s’ils étaient
catholiques que la plupart de nos catholiques qui croient qu’ils ont reçu un
droit de propriété, comme on en possède sur une terre, sur l’Église. Celle-ci
n’est pas la propriété de personne. Elle est de Dieu et Il l’a donne à qui Il
veut. Il peut également l’enlever à ceux qui la déprécient.
Combien y en a-t-il au sein de notre Église qui ne sont dĂ©jĂ
plus catholiques? « Ceux qui appartiennent au corps de l’Église, dit le
Concile, mais non plus à son cœur. » Par contre, combien de gens
n’appartiennent pas au corps de l’Église mais à son cœur?
Comprenons bien cette grande vérité
de la Rédemption du Christ ressuscité qui déborde les limites de l’Église, pour
que nous ne croyions pas, nous les catholiques, que nous ayons le monopole sur
Jésus-Christ et sur l’Esprit saint. Le Christ et l’Esprit saint ne se laissent
pas monopoliser, ils ne se laissent pas emprisonner, ils transcendent et
recherchent les cœurs généreux, comme dit la première prière de la Messe :
« Il tend la main à tous ceux qui le cherchent d’un cœur sincère. »
Quelle consolation! C’est une question de cœur. Qui se sauvera? Celui qui Le
cherche avec un cœur sincère. Il ne suffit pas de venir à l’Église et de Lui
appartenir. Il ne suffit pas d’être baptisé, sans savoir ce que cela signifie.
Ne vous glorifiez pas d’appartenir à une Église et d’être l’ami de tel évêque
ou de tel prĂŞtre, cela ne sauve pas. Se sauve celui qui cherche le Christ avec
un cœur sincère. C’est cela l’Église, dépositaire et témoin!
C’est pourquoi je veux vous dire
frères, que vous et moi qui avons connu le bonheur de connaître la véritable
Église de Jésus-Christ, soyons responsables de cette grâce que le Seigneur nous
a faite. Soyons témoins de la Résurrection comme les apôtres. Ceux-ci, où
qu’ils allassent, ne pouvaient taire cette grande nouvelle : Le Christ est
ressuscité pour le pardon des péchés, convertissez-vous! Comme sera merveilleux
le jour où nous donnerons tous témoignage, comme le faisaient les premiers
chrétiens, de cette foi dans le Christ Rédempteur.14/04/79, p.294-297, VI.
3) Les baptisés, participent au même
Esprit qui ressuscita JĂ©sus
Quel honneur! L’Esprit saint qui
conduisit le Christ et qui donna cette valeur divine Ă sa mort sur la croix,
qui fut la puissance de Dieu qui le ressuscita d’entre les morts, est l’Esprit
qui est donné par le baptême à tous ceux qui forment son Corps Mystique, ceux
qui forment son peuple. Cet Esprit. dit
saint Paul, même s’Il nous semble maintenant invisible alors que nous
continuons de vieillir et de tomber malade, pour mourir et être enterré, « cependant,
dit saint Paul, vous portez en vous le germe de la Résurrection et la dernière
énigme à être vaincue sera la mort. » Et un jour s’ouvriront les tombes
des cimetières et la mort demeurera stupéfaite, comme nous le montre ce cadre
génial de Michel Ange sur le jugement final, qui à une tête de mort est parvenu
à donner une expression abasourdie, lorsqu’elle voit les morts lui échapper.
C’est le cri de l’Évangile qui dit : « Oh, mort! Où est ta
victoire? »
Le Christ ressuscité est le
premier-né, le premier Vivant qui ne mourra plus. Mais comme Lui, nous aussi
possédons son Esprit, même si nous mourons, même si nous souffrons, nous
portons en nous le germe de la vie éternelle. « Celui qui croit en moi
vivra pour toujours! » Il porte l’Esprit qui ressuscita Jésus, mais cet
Esprit est déjà force et sainteté sur la Terre.
Chaque fois que je vous ai parlé de
l’eschatologie, je vous ai dit qu’il s’agissait de ce qui est ultime, comme la
perspective ultime de l’histoire. Mais il ne faut pas attendre que l’histoire
se termine pour avoir cette perspective eschatologique. C’est comme celui qui
regarde la moitiĂ© du chemin parcouru vers le but qu’il s’est fixĂ©, il l’a dĂ©jĂ
en tête et, grâce à ce but eschatologique, ultime, il marche avec espoir et
avec confiance parce qu’il sait où le conduit ce chemin. C’est ce qu’a fait le
Christ ressuscité : Il a mis en Lui les va-et-vient de l’histoire, dans
les choses transitoires qui vont et qui viennent, l’éternel de sa vie. Sa vie
de ressuscité, qui ne mourra plus, appartient à ce monde et bienheureux les hommes
qui savent donner à leur vie un sens eschatologique. C’est-à -dire, qu’ils
savent reconnaître dans le Christ ressuscité, le but vers lequel ils se
dirigent, avec leurs pauvretés, avec leurs tribulations, avec leurs angoisses
de libération. Affairés à ce Christ, ils ne peuvent défaillir. Le Christ leur
donne la force, Il donne son Esprit Ă cette lutte pour un monde meilleur.
C’est pour cela que je vous répète
encore une fois : N’enlevons pas l’énergie du christianisme aux chrétiens,
quand vous les incorporez dans un mouvement libérateur qui ne croit ni au
Christ, ni en Dieu. Chrétiens, ne vous laissez pas tromper. Chrétiens, vous
possédez une force beaucoup plus vigoureuse que n’importe quel autre groupe
politique, que n’importe quelle organisation qui n’admire que les choses de la Terre. Si également vous
regardez le Christ et que de Lui vous tirez votre force, alors, la politique,
la sociologie, l’économie, recouvreront aussi leur force chrétienne. Mais
l’Église qui ne s’identifie à aucune de ces forces, les inspire et dit aux
hommes : Luttez, mais sans perdre la perspective que je vous ai indiquée.
C’est pourquoi je ne m’identifie Ă
aucun d’entre vous, parce que je veux demeurer libre pour indiquer cette
eschatologie qui trouvera toujours beaucoup Ă critiquer dans les projets
humains. Parce que le grand projet du Christ ne se réalisera pas sur cette
Terre, c’est le Règne de Dieu qui illumine déjà les règnes de la Terre grâce
aux chrétiens qui portent l’Esprit du Christ et qui travaillent comme des
chrétiens.
C’est pourquoi je vous dirais,
permettez-moi cette suggestion : ces chrétiens qui appartiennent à des
communautés ecclésiales de base, s’il leur arrive de croire que cela ne donne
plus rien de lire la Bible, ni d’appartenir à un groupe de la communauté, et
qu’ils préfèrent s’engager dans une organisation populaire et travailler pour
le bien de la patrie, ils se trompent. Ou mieux dit, ils se confondent. Ne vous
confondez pas, l’Église vous indiquera toujours un but louable dans n’importe
quelle organisation dans ce qu’elle poursuit de juste, de même qu’elle
rejettera également tout ce qu’il y a d’injuste, de criminel et de mauvais.
Je dis également aux chrétiens :
pourquoi faites-vous si peu preuve d’initiative chrétienne? Pourquoi, alors que
vous possédez le projet du Règne des cieux, avec la foi dans le Christ Roi et
Ressuscité, vous faites-vous esclaves des idéologies de la Terre? Pourquoi
croyez-vous que les chrétiens valent moins que les politiciens? Pourquoi
n’avez-vous pas l’audace de donner aussi un sens chrĂ©tien Ă l’organisation Ă
laquelle vous appartenez? Pourquoi devriez-vous ĂŞtre esclaves des autres?
Pourquoi devriez-vous perdre le leadership que le Christ vous inspire? Pourquoi
devriez-vous vous soumettre aux jougs? Ne vous humiliez pas! Vous dites que
vous êtes des libérateurs alors que vous demeurez des esclaves! Vous dites que
vous travaillez pour des revendications et vous vous laissez subjuguer! Le
chrétien est le plus rebelle qui soit parce qu’il ne se soumet à aucune
idéologie de la Terre, parce qu’il possède la grande liberté du libérateur
JĂ©sus-Christ.
Chrétiens, en cette heure où notre
patrie a un grand besoin de libérateurs, mais des libérateurs de la véritable
libération. Comme disait Paul VI : « Posez à la base de votre action
et de votre prudence la doctrine de l’Église, l’amour du Christ et la liberté
véritable vis-à -vis du péché et de tout ce qui nous rend moins humain. »
14/04/79, p.297-298, VI.
Faits de la Semaine sainte
Cette Église, frères et sœurs,
dépositaire du trésor de la Rédemption et témoin fidèle du Christ ressuscité,
n’est pas une Église abstraite. J’aime bien penser au fait que l’Église de
laquelle je vous parle toujours, c’est vous et moi, c’est la communauté qui vit
maintenant avec ses aspirations et avec ses défauts. J’aime bien penser que
l’Église que je prêche n’est pas une Église abstraite, dans les nuages, sinon
une Église qui est en pérégrination avec les pieds sur la Terre. C’est elle qui en
cette Semaine sainte vit des choses si belles! Par exemple, quand le Pape, au
dimanche des Rameaux, a dit qu’il ne faut pas abuser du pouvoir. Le Pape qui,
en prêchant le chemin de croix au Colisée de Rome, a invité l’Église à être
solidaire des martyrs de notre temps. Nous avons des martyrs, ne les oublions
pas. Ce sont nos prêtres, nos catéchistes, nos hommes de foi qui ont été tués
et torturés sous des motifs politiques de subversions. Dieu seul connaît la foi
pour laquelle ils ont donné leur vie. Respectons et solidarisons-nous comme le
Pape nous l’indique, avec une Église qui s’efforce d’être fidèle jusqu’au
martyr comme le Christ Notre Seigneur. […]
Pensée qui nous conduit à l’autel
Ceci demeure, très chers frères et
sœurs, que la Résurrection du Christ est le sceau et la clé de l’Alliance de
Dieu avec l’humanité. Si le Christ est ressuscité, le Père qui m’aime tant en
Jésus-Christ, continuera de me protéger. Notre peuple, qui a mis son espérance
dans le Christ, ne peut pas faillir. Que cette Résurrection au milieu d’une
ambiance de sang, de douleur, d’incompréhension, de haines et de violences, ne
nous rende pas pessimistes, mais au contraire, soyons capables, si cela est
nécessaire, de souffrir comme le Christ sur la croix et de ressentir sa
solitude : « Mon Dieu! Pourquoi m’as-tu abandonné? »
Le Christ n’a jamais perdu son amour
et sa confiance au Père. L’heure n’est pas encore arrivée, mais trois jours
après sa mort, après cet abandon apparent de Dieu, Celui-ci a répondu bien
mieux que s’Il L’avait libéré de la croix, ou que s’Il ne L’avait pas laissé
conduire Ă la mort. Si
nous savons assumer et incorporer toutes les Ă©preuves et les souffrances de la
vie à l’espérance de notre résurrection, celle-ci se produira non seulement
pour nous-mêmes, mais aussi pour notre chère patrie qui en tant que nation
connaîtra la résurrection. Alléluia! 14/04/79, p.299 et 303,
VI, etc.