Le Christ, le Fiancé de l’Église

 

Huitième dimanche du temps ordinaire; 25 fĂ©vrier 1979; Lectures : OsĂ©e 2,14b, 19-20; II Corinthiens 3,1b-6; Marc 2,18-22.

 

Dans la prĂ©sentation du document de Puebla, nous avons Ă©crit : « La ConfĂ©rence de Puebla est avant tout un esprit. L’esprit d’une Église qui se projette avec une vigueur renouvelĂ©e et un Ă©lan Ă©vangĂ©lisateur au service de nos peuples, dont la rĂ©alisation doit suivre l’appel vivant et transformateur de Celui qui Ă©tablit son tabernacle dans le cĹ“ur de notre propre histoire, en toute fidĂ©litĂ© au Seigneur, Ă  l’Église et Ă  l’être humain. Â» C’est ce que veut ĂŞtre aussi mon homĂ©lie d’aujourd’hui Ă  la lumière de ces trois lectures que nous venons d’écouter : un esprit de rĂ©novation comme celui auquel l’Église de tout le continent aspire depuis Puebla. Puisse Dieu que ces notes des Églises multiples et particulières de tout ce continent immense et rempli d’espĂ©rance, la note de notre Archidiocèse sonner harmonieuse et belle dans ce concert Ă  la gloire de Dieu et Ă  la dignitĂ© humaine.

 

 

Plan de l’homĂ©lie :

1) Le Christ et l’Église, un mystère de l’Alliance conjugale

2) C’est pourquoi l’Église compte sur une capacité divine

3) C’est pourquoi, depuis l’Église, le Christ est la rénovation du monde

 

C’est comme son foyer, comme le point de référence de toute son activité, comme le fiancé qui rencontre dans sa fiancée le centre de sa propre vie.

 

 

1) Le Christ et l’Église, un mystère de l’Alliance conjugale

 

 

A) Le Christ, figure centrale qui répond à l’objection des pharisiens et des disciples de Jean concernant le jeûne.

 

Le Christ rĂ©pond, dans l’évangile de Marc (2,18-22), Ă  l’une des objections qui, en ces chapitres 2 et 3 vont profiler un conflit entre Lui et ses ennemis, conflit qui se termine dans un verset du chapitre 3 oĂą il est dit (3,6) : « Ă‰tant sortis, les pharisiens tenaient aussitĂ´t conseil avec les HĂ©rodiens contre lui, en vue de le perdre. Â» Tous ceux qui apportent un message d’amour, de vĂ©ritĂ©, de justice, rencontrent l’opposition naturelle dans l’injustice, dans l’égoĂŻsme qui est l’inimitiĂ©, et dans les tĂ©nèbres du mensonge qui souffre Ă  la vue de la vĂ©ritĂ© et qui manigance la manière de l’éliminer.

 

(Mc 2,18-20) : « Les disciples de Jean et les pharisiens Ă©taient en train de jeĂ»ner, et on vient lui dire : “Pourquoi les disciples de Jean et les disciples des pharisiens jeĂ»nent-ils, et tes disciples ne jeĂ»nent-ils pas?” Â» Dans le domaine religieux s’immisce toujours la note de l’hypocrisie et de l’apparence, des lĂ©galismes. Le Christ qui recherche la sincĂ©ritĂ© dans l’adoration de Dieu et dans la rĂ©novation intĂ©rieure et sincère de l’être humain, rĂ©pond : « Les compagnons de l’époux peuvent-ils jeĂ»ner pendant qu’ils ont l’époux avec eux, ils ne peuvent pas jeĂ»ner. Mais viendront des jours oĂą l’époux leur sera enlevĂ©; et alors, ils jeĂ»neront en ce jour-lĂ . Â» Comme s’il s’agissait dĂ©jĂ  lĂ  d’un prĂ©sage du carĂŞme et de la Semaine sainte, mais Ă  l’intĂ©rieur d’une allĂ©gresse d’amour et de tendresse du Christ envers son Église.

 

 

B) Osée (2,14b, 19-20) qui vit un drame personnel d’un amour non partagé, introduit dans la littérature biblique le symbole de l’amour conjugal pour décrire les relations entre Dieu et son peuple.

 

Pour comprendre cette comparaison du Christ avec le fiancé, il est nécessaire de remonter au langage des prophètes. Et précisément, notre liturgie a choisi pour ce matin un texte des plus anciens, où est utilisée pour une des premières fois cette comparaison des relations de Dieu avec l’humanité qui est comparée à un mariage. Osée, un prophète qui vécut dans sa vie personnelle et intime la dure expérience d’un homme qui aime une femme qui n’a pas su le comprendre, qui l’a trahi, il transpose ce ressentiment d’amour non partagé, à la relation d’un Dieu qui espère comme les fiancés qui espèrent, même dans les moments de rupture, que la réconciliation se produise. Il continue de l’aimer.

 

L’InfidĂ©litĂ© d’IsraĂ«l : en politique… en idolâtrie… les Baals. OsĂ©e recueille non seulement l’infidĂ©litĂ© de sa femme, mais aussi l’infidĂ©litĂ© sociale de son temps et de son milieu : une politique qui recherche uniquement ses intĂ©rĂŞts et se sĂ©pare du royaume de Juda, dans le Nord, le royaume d’IsraĂ«l, oĂą pour s’être Ă©loignĂ© du centre de ses rĂ©vĂ©lations, il tombe, peu Ă  peu, dans l’idolâtrie. Ce peuple rend un culte, sous la direction de ces gouvernants qui ont perdu la foi authentique du juif, adorant Baal. Les Baals Ă©taient les dieux de la fĂ©conditĂ©, c’est Ă  eux qu’on attribuait les rĂ©coltes, les pluies, les chaleurs, ce qui fait que ce prophète rĂ©clame tout au long de son livre : « Ce ne sont pas les Baals, ce ne sont pas les idoles qui donnent le pain Ă  IsraĂ«l, c’est le Dieu vĂ©ritable. Convertissez-vous de vos idolâtries! Â»

 

La voix du prophète semble d’actualitĂ© quand de nouveaux Baals, Ă  notre Ă©poque, cherchent Ă  prendre la place de l’unique Dieu vĂ©ritable qui nous aime et qui rĂ©clame notre amour. Idoles, Baals de notre temps : l’idolâtrie du pouvoir, l’idolâtrie de l’argent, l’idolâtrie du luxe, l’idolâtrie du sexe. Tant d’idolâtrie devant laquelle les hommes se prosternent, tournant le dos au Dieu vĂ©ritable.

 

 

Évocation de la lecture : le dĂ©sert… l’Égypte…

 

La rĂ©conciliation est arrivĂ©e et, alors, le prophète met sur les lèvres de Dieu des sentiments qui sont les siens, mais qui sont transposĂ©s au divin et aux relations de Dieu avec un peuple Ă©lu qui n’a pas su correspondre Ă  cette Ă©lection. Un peuple qui l’a trahi, au cĹ“ur dur, comme l’appelle la Bible, insensible Ă  la tendresse de Dieu. Mais avec l’espoir d’un pardon et d’un retour de Dieu, il dit (Os 2,16-17) : « C’est pourquoi je vais la sĂ©duire, je la conduirai au dĂ©sert et je parlerai Ă  son cĹ“ur. […] LĂ , elle rĂ©pondra comme aux jours de sa jeunesse, comme au jour oĂą elle montait du pays d’Égypte. Â»

Il remĂ©more l’époque oĂą Dieu rĂ©alisa des gestes d’affection si grandioses en faveur de son peuple : le faisant sortir d’Égypte, le conduisant miraculeusement au dĂ©sert. Dans le dĂ©sert, auprès du SinaĂŻ, est conclu le pacte entre Dieu et l’humanitĂ©, comme si nous disions : lĂ  a Ă©tĂ© cĂ©lĂ©brĂ© le mariage et Dieu rappelle tous ces Ă©vĂ©nements de l’Alliance dans l’espoir de rencontrer un Ă©cho d’amour Ă  son amour dĂ©prĂ©ciĂ©.

 

Les Arrhes : … en droit et justice, en misĂ©ricorde et compassion, en fidĂ©litĂ©. Et ici, comme mettant dans les mains de son Ă©pouse au jour des noces, les arrhes qui sont le signe du don total Ă  elle, pour qu’elle collabore dans l’agrandissement du foyer, il dit quelles sont les arrhes de ce mariage (Os 2,21) : « Je te fiancerai Ă  moi pour toujours; je te fiancerai dans la justice et dans le droit, dans la tendresse et dans la misĂ©ricorde. Â» Ce sont lĂ  les caractĂ©ristiques de l’amour que Dieu porte Ă  son peuple, c’est l’amour du fiancĂ© : du Christ envers son Église que nous formons. Il espère de nous la productivitĂ© de ces arrhes qu’Il nous a donnĂ©es dans sa rĂ©vĂ©lation : droit et justice, misĂ©ricorde et compassion. C’est pourquoi l’Église ne peut pas parler un autre langage, c’est le langage de l’amour qui s’efforce de correspondre aux arrhes qui lui ont Ă©tĂ© donnĂ©es : la dĂ©fense des droits humains, la dĂ©nonciation des injustices, des outrages. Une Ă©pouse fidèle doit ĂŞtre conforme aux goĂ»ts de son Ă©poux. Et l’Église fidèle Ă  son fiancĂ©, le Christ, doit lui rendre grâce par un langage de justice.

 

C’est pourquoi il est merveilleux d’entendre le Pape Jean-Paul II, interprète de l’Église d’aujourd’hui, endosser la ligne des ÉvĂŞques d’AmĂ©rique latine en disant : « Nous devons appeler par son nom l’injustice : l’exploitation de l’homme par l’homme, l’exploitation de l’homme par l’État, l’exploitation de l’homme par les systèmes Ă©conomiques. Nous devons l’appeler par son nom. Nous devons appeler par son nom n’importe quelle forme d’injustice sociale, n’importe quelle discrimination, n’importe quelle violence infligĂ©e Ă  l’être humain dans son corps, son esprit, sa conscience, sa dignitĂ© humaine et sa vie. Â» Je crois que Jean-Paul II doit dĂ©jĂ  dĂ©ranger de nombreuses gens parce qu’Il s’efforce d’être fidèle Ă  cette relation de fiançailles et d’amour entre le Christ et son Église. Et une fiancĂ©e qui trahit son fiancĂ© en frĂ©quentant d’autres idoles ne serait pas la vĂ©ritable Ă©pouse de Notre Seigneur JĂ©sus-Christ.

 

C’est pourquoi j’aimerais aussi vous rappeler qu’à Puebla nous avons choisi d’appeler la pauvretĂ© par son propre nom et d’indiquer quels sont les visages de la pauvretĂ©. « Celle de nos Indiens, celle de nos paysans, les plus pauvres parmi les pauvres, celle de nos ouvriers Ă  qui l’on enlève le droit de s’organiser. Â» Ceux dont on Ă©touffe toutes tentatives de syndicalisation et d’organisation lĂ©gitime, de mĂŞme qu’aux paysans, c’est le visage de tous ceux qui souffrent, du torturĂ©, du prisonnier, du disparu. Le Christ les aime au travers de l’amour de sa fiancĂ©e l’Église qui se doit pour cela d’être avec eux. Et le Pape, grâce Ă  Dieu, en toute clartĂ©, nous autorise Ă  appeler l’injustice par son propre nom. 25/02/79, p.163-165, VI.

 

 

2) C’est pourquoi l’Église compte sur une capacité divine

 

Paul et les recommandations de ses ennemis. Ici, je vais me concentrer sur la seconde lecture. (II Cor 3,1b-6) Saint Paul qui rĂ©pond aux ennemis de sa prĂ©dication qui disaient : Paul ne possède pas de lettres de recommandations d’autres communautĂ©s tandis que nous si. Et Paul, avec son ironie habituelle, leur rĂ©pond ceci : « Frères, devons-nous vous demander des lettres de recommandations? Vous ĂŞtes notre lettre, Ă©crite dans nos cĹ“urs, connue et lue par tous. Vous ĂŞtes une lettre du Christ, rĂ©digĂ©e par notre ministère, Ă©crite non pas avec de l’encre, mais avec l’Esprit du Dieu vivant. Â» Je peux vous dire avec une grande satisfaction que vous ĂŞtes ma lettre de recommandation. Et lorsque j’ai lu la lettre d’un sĂ©minariste qui dit qu’il est lui aussi solidaire de l’évĂŞque, je pensais Ă  cette Ă©pĂ®tre de saint Paul. Vous ĂŞtes, très chers sĂ©minaristes, ma lettre de recommandation et c’est pourquoi je vous demande d’être dignes de cette prĂ©sence du Christ au sein de la communautĂ©. Je suis le premier Ă  reconnaĂ®tre mes dĂ©ficiences et mes limites, mais je sais que vous tous, sĂ©minaristes, prĂŞtres, religieuses, communautĂ©s ecclĂ©siales de base et familles chrĂ©tiennes, vous vivez saintement la prĂ©sence du Christ parmi son peuple, vous supplĂ©ez les dĂ©ficiences de votre pasteur et, unis Ă  lui, vous donnez Ă  l’archidiocèse une physionomie qui valorise Ă©normĂ©ment le fait d’être catholique.

 

La communautĂ© chrĂ©tienne est la meilleure lettre de recommandation Ă©crite par le Christ. Saint Paul dit que cela ne dĂ©pend pas de lui. Cette confiance nous l’avons par le Christ, de sorte que nous ne pouvons rien rĂ©clamer de ses rĂ©alisations Ă  titre personnelles. Notre capacitĂ© nous vient de Dieu. Permettez-moi ici de revenir au document de Puebla pour vous transmettre cette pensĂ©e sur ce que doit ĂŞtre le diocèse, la paroisse et la petite communautĂ© de base. Du diocèse dit de mĂŞme le Concile : « Dans l’Église particulière, dans le diocèse formĂ© Ă  l’image de l’Église universelle, se retrouve et agit vĂ©ritablement l’Église qui est une, sainte, catholique et apostolique. Â»

 

 

Communion avec l’Évêque.

 

Si le Christ vit et rend sa prĂ©sence perceptible Ă  travers celle de l’ÉvĂŞque pour tout le diocèse, ce dernier doit ĂŞtre en communion avec son Ă©vĂŞque. Rien sans l’évĂŞque! C’est pourquoi j’ai dit prĂ©cĂ©demment que je reconnais mes limites et mes difficultĂ©s, mais je ne peux renoncer au rĂ´le que le Christ m’a confiĂ© : d’être le signe de l’unitĂ©, de la doctrine, de la vĂ©ritĂ© de l’Église dans l’archidiocèse. C’est pourquoi cela me fait souffrir lorsqu’il y a autant de dissidences non seulement parmi les laĂŻcs dont l’ignorance peut ĂŞtre comprise lorsqu’ils se font des ennemis de l’Église et qu’ils se rendent serviles des idoles de la Terre. Mais c’est encore plus douloureux lorsque cette dissidence provient du cĹ“ur mĂŞme de l’Église, de ceux qui devraient ĂŞtre les plus collaborateurs, les plus intimes de l’évĂŞque.

 

Je sais avec tristesse que quelques prĂŞtres ont honte de prononcer mon nom Ă  l’occasion de la prière eucharistique oĂą c’est l’obligation de tous les prĂŞtres, comme signe de l’unitĂ© avec l’évĂŞque, de demander nommĂ©ment pour leur Ă©vĂŞque. Si quelqu’un ne ressent pas ce sentiment de solidaritĂ©, que fait-il dans le diocèse? Et cela me fait souffrir non pas parce que le mĂ©pris, la calomnie, les campagnes de diffamations et les plaisanteries de mauvais goĂ»t s’adressent Ă  ma personne; toutes ces offenses je les tolĂ©rerais avec plaisir, mais parce que l’offense s’adresse Ă©galement Ă  celui dont je suis le reprĂ©sentant. Comme dit saint Paul : « Notre capacitĂ© nous vient de Dieu qui nous a rendus capables pour ĂŞtre les serviteurs d’une Alliance Nouvelle. Â» Alors, je pense que la dissidence et le mĂ©pris ne s’adressent pas Ă  un homme, mais Ă  Dieu Lui-mĂŞme. Puisse Dieu que le Seigneur ne nous demande pas des comptes sur ce mĂ©pris et ce manque d’amour.

 

Cela signifie que dans l’Église nous devons faire confiance Ă  Dieu. Celui qui nous donne la sĂ©rĂ©nitĂ© dans notre travail c’est le Christ, le FiancĂ© de l’Église qui construit l’amour de son Église. C’est l’Esprit du Christ, Esprit d’amour, Celui qui parvient Ă  unir tous les hommes de bonne volontĂ© pour que nous construisions l’Église. Je voudrais rĂ©affirmer ceci, très chers frères : ce que nous faisons dans l’archidiocèse n’est pas d’établir une rivalitĂ© envers quiconque. Je ne veux pas ĂŞtre un « anti Â», ni ĂŞtre contre personne. Je dĂ©sire simplement ĂŞtre le constructeur de cette grande affirmation que Dieu nous aime et qu’Il veut nous sauver. L’Église n’est pas autre chose, comme dit Puebla du mariage : « qu’un signe de l’amour de Dieu en ce monde. Â» Et si la famille est cela, c’est parce qu’elle reflète l’Église qui est la grande famille de l’amour de Dieu. Construire cette unitĂ©, cette authenticitĂ© de l’Église, vĂ©ritable fiancĂ© du Christ, constitue la joie du pasteur qui dĂ©sire pour le Christ tout l’amour, tout l’hommage et toute la solidaritĂ©. Si par ailleurs ma personne en indispose certains, je dirais comme Jean Baptiste : « Je dois disparaĂ®tre pour que Lui grandisse, le fiancĂ© de l’Église, Celui auquel je ne dĂ©sire Ă©tablir aucune rivalitĂ©, mais simplement le servir avec humilitĂ© et amour en me rĂ©jouissant qu’Il gagne le cĹ“ur de son Église. Â» 25/02/79, p.167-168, VI.

 

 

3) C’est pourquoi, depuis l’Église, le Christ est la rénovation du monde

 

La pièce nouvelle sur le vieux vêtement et le vin nouveau dans les vieilles outres.

 

Je me prĂ©vaux ici de la dernière recommandation de l’Évangile (Mc 2,18-22) que le Christ nous a suggĂ©rĂ©e aujourd’hui : « Personne ne coud une pièce de drap non foulĂ© Ă  un vieux vĂŞtement; autrement, la pièce neuve tire sur le vieux vĂŞtement et la dĂ©chirure s’aggrave. Personne non plus ne met du vin nouveau dans de vieilles outres; autrement, le vin fera Ă©clater les outres, et le vin est perdu aussi bien que les outres. Mais du vin nouveau dans des outres neuves! Â» Qu’est-ce que des outres? Ce sont des sacs de cuir qui, dans ces rĂ©gions oĂą l’on produit le vin, conservent celui-ci. Mais ces outres lorsqu’elles vieillissent, sèchent et se brisent si on y met du vin nouveau. C’est pourquoi le Christ fait cette comparaison, de mĂŞme que pour la pièce de drap neuf sur le vieux vĂŞtement. Celui-ci ne se satisfait pas de rapiéçage. L’Église, sa fiancĂ©e, n’aime pas non plus les rapiéçages et c’est pourquoi elle dĂ©nonce non seulement ceux-ci, mais Ă©galement lorsqu’on laisse se dĂ©chirer le manteau et pourrir les outres.

 

JĂ©sus ne vient pas pour faire du rapiéçage, mais faire du neuf… le vin nouveau est un signe des nouveaux biens messianiques qui n’entrent pas dans de vieilles outres. Si on utilise la comparaison du Christ, nous devons tenir compte que les disciples de Jean voulaient conserver les coutumes du jeĂ»ne et de la loi de MoĂŻse. Mais le Christ apporte quelque chose de supĂ©rieur Ă  la loi de MoĂŻse, et c’est pourquoi Il dit : nous n’allons pas mettre les idĂ©aux du christianisme dans les moules de la religion mosaĂŻque. Tout est Ă©volution dans la vie. L’Église se renouvelle. Nous ne pouvons pas conserver de vieilles traditions qui n’ont plus raison d’être. Et encore davantage ces structures oĂą a Ă©tĂ© intronisĂ© le pĂ©chĂ©. Depuis celles-ci on outrage, on commet des injustices et du dĂ©sordre. Nous ne pouvons pas qualifier de chrĂ©tienne une sociĂ©tĂ©, un gouvernement, une situation oĂą dans ces structures vieillies et injustes, nos frères et sĹ“urs souffrent autant. Il est nĂ©cessaire d’ouvrir de part en part les portes au Christ, au nouvel ordre de l’Évangile, Ă  des structures justes et saintes que le Seigneur nous apporte. Non pas Ă  une lĂ©galitĂ© qui occulte les injustices, mais Ă  des structures oĂą la justice de Dieu soit le fondement afin que tous les Salvadoriens puissent vivre Ă  la lumière du Christ : la paix, la joie et l’amour qu’Il nous a apportĂ©s. 25/02/79, p.171-173, VI.