La Famille : Épiphanie de
l’Amour de Dieu
Trente-et-un décembre 1978;
Lectures : Siracide 3,3-7.14-17a; Colossiens 3,12-21; Luc 2,39-40.
Épiphanie veut dire manifestation,
signifie comme ostensoir, quelque chose où Dieu vit et se montre. Dieu désire
se montrer à la société, à l’histoire, au monde, à partir d’une famille; et
toutes les familles constituées chrétiennement doivent être cela :
épiphanie, manifestations de Dieu, de l’amour de Dieu. Un homme et une femme ne
se marient pas uniquement pour ĂŞtre heureux, ils ont une Ă©norme fonction
sociale, ils doivent rendre Dieu présent dans le monde, dans l’amour conjugal,
et plus tard quand arrivent les enfants dans l’amour qui unit leur foyer. Dans
cette famille unie et constituée dans l’amour, ils doivent être la marque de
Dieu, Ă©piphanie de Dieu.
Plan de l’homélie :
1) Dimension humaine de la famille
2) Transcendance religieuse et
ecclésiale de toute famille
3) Le Christ vit et se révèle au
monde dans la famille
1) Dimension humaine de la famille
La dimension humaine nous est donnée
par cette fin pittoresque de l’Évangile d’aujourd’hui (Lc 2,39-40) :
« Ils retournèrent en Galilée, à leur ville de Nazareth. Et l’enfant
grandissait. » Quelle vie plus simple! La vie de deux paysans qui ont un
enfant : il travaille pour subvenir à leurs besoins, elle s’occupe des tâches
de la maison. LĂ
se trouve encore aujourd’hui la source, l’unique source qui existe dans les
environs de Nazareth. C’est là que Marie ira avec sa cruche chercher de l’eau
et pétrir la farine.
Toutes ces paraboles pittoresques de la femme Ă son foyer,
Jésus les méditait déjà en cette humble demeure de Nazareth. « Et l’enfant
grandissait… »
A) Une Hiérarchie.
Il y a dans la première lecture
d’aujourd’hui (Si 3,3-7.14-17a) qui est comme une compilation de toute la
sagesse de l’Ancien Testament, écrite peut être par un rabbin qui fut
probablement un diplomate qui fréquenta les cours, mais qui après, lorsqu’il
revint, recueillit la simplicité de la Bible dans le fameux livre de
l’Ecclésiastique, une série de conseils familiers, humains, où il dit :
« Le père a plus d’autorité que les fils. L’autorité de la mère est sur la progéniture. N’abandonne
pas ton père tant qu’il vit même si son esprit faiblit… » Même si ton père
est déjà un vieux, qu’il radote, respecte-le.
B) Satisfactions humaines.
La première lecture d’aujourd’hui
parle des grandes satisfactions humaines de celui qui honore son père et sa
mère (Si 3,5) : « Celui qui honore son père trouvera la joie dans ses
enfants. » Naturellement celui qui fut un bon fils, sera un père heureux.
(Si 3,6) : « Celui qui glorifie son père verra de longs jours. »
L’Ancien Testament ne connaissait pas comme nous les chrétiens, les récompenses
de la vie éternelle en Dieu, mais parlait du bonheur sur cette Terre et c’est
en cela que consistaient ses grandes satisfactions. Comme vous voyez, une
dimension ne précise pas d’une grande mystique, simplement le cœur de l’homme,
comme cela a surgi de sa nature mĂŞme qui nous demande cet amour, ce respect qui
inonde la vie de famille.
C) Les vertus domestiques.
Dans la seconde lecture (Col 3,12-21),
saint Paul soulignant la dimension humaine de la famille nous dit :
« Que votre uniforme soit la profonde miséricorde, la bonté, l’humilité,
la douceur, la compréhension. » Ce sont les trésors simples, qui, comme
ces pièces de monnaie qui passent par nos mains et qu’à force de les user,
perdent peut-ĂŞtre leur image et aussi leur valeur. Mais combien merveilleuse
est la vie simple sous cet aspect humain qu’est la famille!
D) Relations familiales.
Saint Paul, continue son épître
d’aujourd’hui aux Colossiens en nous entretenant concrètement de ces relations
familiales (3,18-21) : « Femmes soyez soumises à vos maris, comme il
se doit dans le Seigneur. Maris, aimez vos femmes et ne leur montrez point
d’humeur. Enfants, obéissez en tout à vos parents, c’est cela qui est beau dans
le Seigneur. Parents, n’exaspérez pas vos enfants, de peur qu’ils ne se
découragent. » Et la famille s’étend bien au-delà de ce petit cercle. Dans
le temps de saint Paul existaient des serviteurs et des maîtres qu’aujourd’hui
nous traduirions en d’autres termes qui signifient la même chose
(3,22-24) : « Esclaves, obéissez à vos maîtres d’ici-bas, non pas
d’une obéissance tout extérieure qui cherche à plaire aux hommes, mais en
simplicité de cœur, dans la crainte du Maître. Quel que soit votre travail,
faites-le avec âme, comme pour le Seigneur et non pour des hommes, sachant que
le Seigneur vous récompensera en vous faisant ses héritiers. »
Il dit aux serviteurs :
« Vous aussi êtes les héritiers. » Il dit aux journaliers d’aujourd’hui,
à ceux qui travaillent sous d’autres maîtres : « Vous avez vous aussi
une dignité, servez vos maîtres non pas en leur plaisant à eux, mais au
Seigneur de qui vous allez recevoir l’héritage que par justice l’on vous
rendra, parce que vous êtes à l’égale de vos maîtres qui ont le même
Maître. » Saint Paul dit en terminant (3,24-25) : « C’est le
Seigneur Christ que vous servez : qui se montre injuste sera certes payé
de son injustice, sans qu’il soit fait acception des personnes. » Devant
Dieu, rien ne servira d’être recommandé par telle ou telle personne, sinon que
vaudra la justice dont cette personne fit usage envers ses frères?
(Col 4,1) : « Maîtres,
accordez à vos esclaves le juste et l’équitable, sachant que, vous aussi, vous
assez un Maître dans le ciel. » Quelle valeur que celle de ces principes
humains qui furent le point de départ qui tranchèrent cette condition
d’esclaves et de maîtres et qui continuera aussi d’être la marque qui détruira
toutes les injustices et tous les désordres. Voici le grand principe :
« Devant Dieu, il n’y a pas acception de personne. » Maîtres, vous
aussi vous avez un Maître qui est dans le Ciel et auquel vous devrez rendre des
comptes. Serviteurs, obéissez et ne cherchez pas la rébellion uniquement pour la rébellion. Nous
avons un juge qui revendique la justice sociale aux humains.
E) La famille, Ă©cole du plus riche
humanisme. C’est pourquoi le
Concile arrive Ă dire que la famille
est l’école du plus riche humanisme. Lorsque les parents de Jean XXIII
célébrèrent cinquante ans de mariage, il était Délégué Apostolique en Orient et
depuis là il a conservé cette lette écrite avec tant de tendresse à ses vieux
parents paysans : « Cela fait longtemps que j’ai quitté votre maison,
j’ai étudié dans des collèges, j’ai lu beaucoup de livres, mais nulle part je
n’ai appris ce que vous m’avez appris : la sagesse du foyer, l’école du
plus riche humanisme » et l’on comprend pourquoi Jean XXIII fut celui qui
fut véritablement éduqué à l’école de son propre foyer.
Le Concile dit : « Dans le
foyer se rencontre les différentes générations. » Regardez le tableau
d’aujourd’hui : l’Enfant Jésus, Marie et Joseph, jeunes. Les anciens
Siméon et Anne. Cela ne nous donne-t-il pas l’idée de ce qu’est la famille
humaine? Petits-enfants, enfants, pères, grands-parents; plusieurs générations
cohabitent, il n’y a pas de place pour les conflits de générations quand
l’amour existe.
F) La famille : formatrice de
personne, éducatrice de la foi, promotrice de développement humain.
Je ne peux passer sous silence cet
aspect humain que les Ă©vĂŞques rĂ©unis Ă MedellĂn, dirent de la famille, parce
qu’il est nĂ©cessaire que ce Concile Vatican II qui se fit latino-amĂ©ricain Ă
MedellĂn, soit connu des familles latino-amĂ©ricaines. La rĂ©union de MedellĂn
fit donc une belle synthèse en disant ces trois fonctions de la famille.
« En Amérique latine la famille doit être : Formatrice de personnes,
éducatrice de la foi, et promotrice du développement. » Il me semble que
cela décrit bien cette grande valeur qu’a la famille parmi nous.
Formatrice de personne. Nous sommes
en train d’observer l’aspect humain de la famille et la première chose qui se
voit chez un homme c’est sa personne. Avant d’être chrétiens, nous devons être
humains. Peut-être parce que souvent l’on cherche à construire le chrétien sur
de fausses bases humaines, nous avons de faux hommes et de faux chrétiens. Le
béat est un faux chrétien qui n’est pas non plus un homme. Plusieurs de ceux
qui prétendent défendre actuellement la religion, ne sont ni des hommes et bien
moins des chrétiens. Je ris de ces prétendus défenseurs intéressés du
christianisme qui se disent d’authentiques catholiques. De quel droit
peuvent-ils se prétendre catholiques authentiques? S’ils ne sont même pas des
hommes qui savent adorer le véritable Dieu et qui s’agenouillent, idolâtres,
devant les choses de la Terre.
Formatrice de personnes. La famille
humaine doit former des personnes, des personnalités, ce qui veut dire, selon
MedellĂn : « La prĂ©sence et l’influence de modèles distincts et complĂ©mentaires
du père et de la mère (masculin et féminin), le lien de l’affection mutuelle,
le climat de confiance, l’intimité, le respect, la liberté, le cadre de la vie
sociale avec une hiérarchie naturelle qui est modulée par ce climat. Tout
converge pour que la famille devienne capable de façonner des personnalités
fortes et équilibrées pour la société. »
Très chères familles, recueillez pour
vous ce grand message de Noël pour vous. Comme nous désirons que les pères de
famille soient comme Joseph! Comme nous voudrions avoir des mères comme Marie,
et comme nous aimerions avoir des fils comme JĂ©sus! Comme nous aimerions avoir
les fortes personnalités de Joseph, de Marie et de Jésus qui ne se dédoublaient
pas devant les adulations ou les menaces. Qui sait dire comme JĂ©sus que son
pain est de faire les volontés du Père qui sont avant tout des valeurs
humaines.
Promotrice de développement. Lorsque
nous affirmons cela : « La famille est l’école du plus riche
humanisme et que l’humanisme complet est le développement intégral. La famille,
où convergent les diverses générations qui s’entraident pour acquérir la
sagesse la plus complète, pour savoir harmoniser les droits de la personne avec
les autres exigences de la vie sociale, elle constitue le fondement de la société. En
elle, les fils, dans un climat d’amour, apprennent avec une plus grande
facilité la juste hiérarchie des choses, en même temps qu’elle imprime d’une
façon naturelle dans l’âme des adolescents, les formes approuvées de la culture
au fur et à mesure qu’ils grandissent. C’est aux parents qu’il revient de
préparer leurs enfants dans le sein de la famille pour qu’ils connaissent
l’amour de Dieu. »
Formatrice de personnes, promotrice
de développement. Si aujourd’hui nous avons tous une fonction sociale, combien
plus la famille.
Très chers frères, pour que nous ayons des Salvadoriens qui
soient des hommes, qui soient des personnes, qui soient des gens en qui on peut
avoir confiance, qui soient de véritables hommes nouveaux qui fassent la
promotion d’un monde nouveau, qui ne se laissent pas entraîner par la
putréfaction du système, qui ne se laissent pas séduire par les présents, qui
ne se laissent pas acheter, qui soient véritablement au-dessus de tous les
avantages, et surtout pour qu’ils reconnaissent la valeur de la personne
humaine, nous avons besoin de familles comme celle de Nazareth. C’est cela la
dimension humaine de la famille, des relations familiales et du travail et de
tout ce qui constitue des groupes humains. 31/12/78, 81-83, VI.
2) Transcendance religieuse et
ecclésiale de toute famille
Maintenant nous nous concentrons sur
un autre aspect qui d’une certaine manière se rapporte davantage à cette
médiation, la dimension religieuse et ecclésiale.
A) Le Christ est présenté au temple
en famille… rituelle
Deux choses : observons le cadre
pittoresque du Christ dans les bras de sa mère accompagnée de son époux, qui se
rendent au temple pour accomplir un rite. Toute femme qui donne la vie devait
se purifier rituellement et ce rite impliquait aussi une rédemption du
premier-né. Pour ramener avec soi le premier-né, il faut faire une offrande qui
au nom de ce fils va ĂŞtre offerte Ă Dieu comme holocauste. Deux pigeons ou deux
colombes lorsque la famille Ă©tait pauvre. Un qui servait de sacrifice pour les
péchés et l’autre qui servait pour le sacrifice de l’Action de grâce. Cela fut
l’offrande de la famille pauvre de Jésus : deux pigeons.
B) Les devoirs familiaux nous
révèlent une valeur religieuse.
Alors, le Seigneur reçoit un hommage
de la famille parce que la famille possède un sens religieux. Déjà dans la
première lecture d’aujourd’hui (Si 3,3-7.14-7), il est bien établi, comment
cette relation de père et de mère avec leurs enfants et des enfants avec leurs
parents, n’est pas simplement un conseil, on y ajoute toujours une
raison : « Pour que le Seigneur te pardonne tes péchés, pour que le
Seigneur entende ta prière, pour que le Seigneur te bénisse. » Cela veut
dire que dans le foyer il existe un véritable culte à Dieu, que ce geste de
Marie et de Joseph avec leur enfant, dans une dimension religieuse, apportant
l’offrande que Moïse ordonna, c’est ce qui se produit dans tous les foyers,
chaque jour et chaque heure.
Lorsque le fils obéit, surtout
lorsqu’il est grand, cela est si beau; un homme qui obéit à un autre adulte
parce que c’est son père, c’est sa mère. Combien sonne sacrée cette parole sur
les lèvres de l’homme, comme elle paraît d’autorité presque divine, le
commandement d’un homme, peut-être un paysan, à son fils qui est peut-être un professionnel,
et ce professionnel avec toute la vénération et le respect obéit à son père.
C’est un culte. Ce dernier connaît sans doute plus de choses que son père
paysan, cependant il sait que c’est son père qui possède l’autorité, qu’elle
lui vient de Dieu. Ainsi comme le père sait également que le fils possède sa
propre vie que Dieu lui a donnée et que le père doit respecter. C’est un aspect
religieux, c’est un culte.
C) Fondée par le Créateur.
L’homme qui est un bon membre de
famille sait cela également, l’époux fidèle à son épouse ne la trahit pas.
Trahir c’est presque commettre un sacrilège parce qu’il trahit une fidélité
qu’il ne doit pas seulement à une femme, mais à Dieu. Le Concile dit de la
famille qu’elle a été « fondée par le Créateur, la communauté conjugale
qui est communauté de vie et d’amour, naît devant la société dans un acte
humain par lequel les époux se donnent et se reçoivent. » C’est cela le
mariage : se donner. « Moi, un tel, je me donne et je promets d’être
fidèle. Moi, une telle, je te reçois et je me donne. » Se livrer et
recevoir est quelque chose de si saint que seul Dieu, auteur de la vie, peut le
permettre et le bénir.
C’est de là que naît la société des
époux comme une institution confirmée par la loi divine, de telle sorte que
l’on puisse dire : « Ce que Dieu a uni, l’homme ne peut le
séparer. » Alors, cette société sanctionnée par Dieu avec un sens
religieux profond n’est pas pour inventer les lois selon ses caprices et avoir
des relations selon ses goûts.
Aucune autorité ne peut poser des
conditions, ni imposer des situations de péché. C’est ce que j’aimerais vous
dire avec toute l’éloquence dont je serais capable. On abuse, en notre pays, de
la loi de Dieu lorsqu’on distribue des moyens de contraception qui violent la loi
de la
fécondité. Lorsqu’on construit des cliniques et qu’au nom du
gouvernement on impose la mutilation, la castration. De quel
droit? Si cela est de Dieu et de personne d’autre! Quel droit possède un couple
d’user selon ses caprices de la stérilisation ou de moyens contraceptifs, si
tout cela appartient à Dieu? C’est une société (la famille) que Dieu a établie
et sanctionnée et Il n’est pas d’accord avec les connivences de notre
gouvernement et avec d’autres gouvernements qui veulent nous imposer des mutilations
qui trahissent la loi du Seigneur. On ne se moque pas impunément de la loi de
Dieu et nous aurons les conséquences de tant de sottises que l’on commet contre
les lois de la fécondité, des conséquences très graves que l’on ressent déjà en
d’autres lieux. Il paraît qu’aux États-Unis on n’emploie plus certaines pilules
contraceptives qu’on envoie en Amérique latine pour que les femmes d’ici
deviennent stériles.
C’est la loi de Dieu qui régularise
la société de l’homme et de la
femme. L’instinct que Dieu a donné dans le sexe de l’homme et
dans celui de la femme n’est pas pour s’amuser, pour se complaire comme s’il
s’agissait d’un divertissement pour faire du propre foyer un bordel. C’est
pourquoi je vous parle ici de la paternité responsable. Cela signifie que
l’homme sait qu’il possède une capacité génétique, qu’il a la capacité
d’engendrer des enfants et qu’il doit user de cette capacité avec
responsabilité. La femme sait aussi qu’elle peut engendrer, mais qu’elle doit
être responsable sans faire outrage aux lois de la nature, sinon en conformité
aux lois du Créateur.
Et encore moins l’avortement. Très
chers frères, cette semaine lorsque nous avons célébré à Cuscatlán le Jour des
Innocents, je pensais : Combien d’innocents sont morts aujourd’hui par les
lois de l’avortement, innocents qui ne vivent plus dans les entrailles de leur
mère? On assèche les sources de la
vie. La société conjugale, la famille, est faite pour être le
reflet de la loi de Dieu, pour être le reflet de sa tendresse et de sa fécondité,
pour que les enfants qui y naissent, se sentent vraiment accueillis dans
l’amour et non quelque chose que l’on jette et qui dérange. Que le jour de la Sainte Famille soit
vraiment un appel à l’amour à la vérité, parce que nous parlons de
l’institution de l’amour. Sachez-vous rendre digne de cet amour que vous devez
refléter sur la Terre.
D) La famille, cellule du Peuple de
Dieu.
La famille Ă©galement, dans les
lectures d’aujourd’hui, apparaît avec une dimension ecclésiale. Qu’est-ce que
cela veut dire? Cela signifie que la famille, selon le point de vue de saint
Paul dans l’ensemble de son épître aux Colossiens, est une cellule de la grande
société du Peuple de Dieu. Avec quelle éloquence saint Paul dit aujourd’hui aux
chrétiens de Colosse (3,12) : « Peuple élu de Dieu, peuple sacré et
aimé. » C’est cela le peuple qui naît de la famille! Si l’Église est la
famille de Dieu, c’est dans les groupes familiaux où la famille prend sa source
et c’est pourquoi la famille selon la loi chrétienne n’est pas uniquement une
relation morale et humaine, mais chrétienne.
E) La famille est une « Église
domestique ».
Dans cette épître, dans ce paragraphe
où saint Paul parle de la communauté Église et de la communauté famille, il
répète souvent les mots « dans le Seigneur ». C’est une phrase très
typique de saint Paul : « Aimez-vous dans le Seigneur. » Soyez
mutuellement fidèles dans le Seigneur. Fils, respectez vos parents dans le
Seigneur. Cela signifie que la relation familiale doit être vue à la lumière de
l’Église. En d’autres mots, c’est ce que le Concile appelle : l’Église
domestique où le père et la mère sont les premiers prêtres qui enseignent la
Parole de Dieu à leurs enfants, et les parents en retour reçoivent le
témoignage d’innocence et de sainteté de leurs enfants.
Lorsqu’on regarde une famille avec
cette perspective de l’Église domestique – Ecclesiola,
nous dit la parole latine, « petite église » –, comme une Église du
foyer, oĂą le Pontife Romain, les cardinaux, les Ă©vĂŞques et tous les autres
n’existent plus, ne demeurent que le père, la mère et les enfants. C’est là que
se trouve l’embryon de la grande Église universelle parce que dans le Christ,
tous les baptisés appartiennent au Peuple de Dieu. Depuis cette perspective de
l’Esprit du Christ qui a été donné au père, à la mère, aux enfants, qui ne sont
pas les propriétaires d’eux-mêmes, ils appartiennent comme cellule à la grande
famille qu’est l’Église et qui en Jésus-Christ doivent avoir leurs lois.
F) La famille Ă©ducatrice de la foi.
C’est ici oĂą la phrase de MedellĂn
rencontre toute sa réalisation : « Éducatrice de la foi ».
N’oubliez pas ces trois phrases sur la famille que dit MedellĂn :
« Formatrice de personnes », « Promotrice du
développement », et « Éducatrice de la foi ». C’est cela la
dimension ecclésiale. « Les époux chrétiens sont pour eux-mêmes, pour
leurs enfants et les autres familles, coopérateurs de la grâce et témoins de la foi. Ils sont pour leurs
enfants les premiers prédicateurs de la foi et les premiers éducateurs. Ils
doivent inculquer la doctrine chrétienne et les vertus évangéliques aux enfants
qu’ils ont reçus amoureusement de Dieu et réaliser cette mission au moyen de la
Parole et de l’exemple, de telle sorte que, grâce à l’exemple et la prière en
famille, les enfants et mĂŞme ceux qui vivent dans le cercle familial
rencontreront plus facilement le chemin du sens humain, du Salut et de la
sainteté. »
Et se référant aux difficultés
propres d’AmĂ©rique latine, puisque c’est Ă cette fin que MedellĂn a eu
lieu : « Nous savons que de nombreuses familles en Amérique latine
ont été incapables d’être éducatrices dans la foi ou, pour ne pas avoir été
bien constituées, se sont désintégrées; d’autres parce qu’elles ont transmis
cette Ă©ducation en termes de simples traditionalistes, souvent avec des
connotations mystiques et superstitieuses. De là la nécessité de doter les
familles actuelles d’éléments qui restituent leurs capacités évangéliques, en
accord avec la doctrine de l’Église. »
Je crois qu’ici se reflètent
plusieurs situations familiales! Je vous dis avec douleur, très chers frères,
non pas pour vous offenser, que si nous regardons en vérité le mal qui nous
entoure, ayons la vaillance de faire ce que me disait une orpheline abandonnée
par ses parents, mais qui est arrivée à l’heure de son mariage : « Je
fais attention, me disait-elle, parce que je veux donner Ă mes enfants ce que
mes parents n’ont pas pu me donner. »
Ainsi naîtrait une humanité nouvelle!
Je ne dis pas cela pour offenser personne, mais nous formons un véritable
ensemble de familles désintégrées. Je m’adresse surtout aux jeunes afin qu’ils
cherchent à créer des familles qui sachent donner à leurs enfants ce qu’ils
n’ont peut-être pas eu la chance de recevoir à cause de la séparation de leurs
parents.
Je ne dis pas cela pour vous
offenser, je vous dis cela parce que je désire pour notre Patrie des cellules
familiales plus saines. Je vous dis cela parce que depuis l’Église, je vois
aussi les grandes dĂ©ficiences de notre christianisme que MedellĂn nous a
décrites aujourd’hui : Superstitions, traditionalisme, scandales de la
vérité que l’Église prêche. Lorsqu’on a de l’argent, on va jusqu’à publier ces
scandales comme s’il s’agissait de défendre de véritables valeurs. On ne se
rend pas compte que l’on défend l’indéfendable : le mensonge, la fausseté,
un traditionalisme sans vie et, bien pire encore, des intérêts économiques que
lamentablement l’Église servit, mais ce fut le péché d’une Église erronée qui
ne disait pas la vérité lorsqu’elle devait être dite.
Aujourd’hui, nous voulons vous dire
également, très chers frères qui êtes peut-être dans l’erreur, que la vérité se
situe en une foi, en un christianisme qui adore Dieu et qui donne aux choses de
la Terre leur valeur relative et non absolue. Un christianisme qui enseigne qu’il
faut éduquer les enfants qui naissent non pas dans ces traditions empoisonnées,
mais dans la pure vérité qui naît de l’Évangile, celle que je voudrais vous
donner en vérité. Ne défigurez pas mes paroles. Ne défigurez pas mes bonnes
intentions de vous donner une vitalité de chrétien tel que je crois que
l’Église vous signale depuis Vatican II, depuis les rĂ©flexions de MedellĂn qui
dénoncèrent la définition erronée que l’on donne à la famille qu’il est
nécessaire de redresser. Travaillons-y donc! 31/12/78, p.84-87, VI.
3) Le Christ vit et se révèle au
monde dans la famille
Cette Église possède la dimension
religieuse et cette dimension ecclésiale parce que dans son sein se trouve
Celui qui est tout : le Christ Notre Seigneur, qui vit et se révèle dans la
famille.
Comme je voudrais aujourd’hui que
toutes les familles sentent que le Christ vit en votre sein! Que le Christ est
dans l’enfance de cet enfant, dans l’inquiétude de cette jeunesse, dans la
préoccupation de ce père et de cette mère, dans la vénérable vieillesse de ce
grand-père, de cette grand-mère. Là se trouve le Christ, si on le recherche
vraiment comme il apparaît dans l’Évangile d’aujourd’hui. C’est le même Christ
de la Rédemption qui voulut naître dans une famille. C’est le même Christ qui avait
besoin de notre monde, de notre histoire, mais qui voulut s’incarner dans une
famille concrète. C’est le Christ qui se révéla à Siméon et à Anne.
A) Le Christ se révéla à Siméon
Siméon attendait la consolation
d’Israël et il savait qu’il n’allait pas mourir sans voir le Christ. Et
lorsqu’il le vit dans ses mains, il prononça cette belle prophétie (Lc
2,29-35) : « Maintenant, Souverain Maître, tu peux, selon ta parole,
laisser ton serviteur s’en aller en paix; car mes yeux ont vu ton Salut, que tu
as préparé à la face de tous les peuples, lumière pour éclairer les nations et
gloire de ton peuple Israël. » Son père et sa mère étaient dans
l’étonnement de ce qui se disait de lui. Siméon les bénit et dit à Marie, sa
mère : « Vois! Cet enfant doit amener la chute et le relèvement d’un
grand nombre en Israël; il doit être un signe en butte à la contradiction – et
toi-même, une épée te transpercera l’âme! –, afin que se révèlent les pensées
intimes de bien des cœurs. »
Le Christ est un signe de
contradiction. Les bons ou les mauvais qui se repentent recevront de Lui le
pardon et la miséricorde, mais également, Il sera signe de perdition pour
plusieurs qui Le rejetteront à cause de leurs péchés, de leur égoïsme et de
leur orgueil. Le Christ est une pierre de scandale! C’est pourquoi cela me fait
un immense honneur lorsqu’on me rejette parce que je ressemble un peu Ă
Jésus-Christ qui fut également une pierre de scandale. Siméon prophétisa que
l’Église, disciple du Christ, devra être comme Lui. Pour certains, elle sera
signe de Salut.
Les conversions de plusieurs me
rendent heureux. Ainsi, comme je ressens Ă©galement la douleur de plusieurs
obstinations, de plusieurs qui rejettent le Christ comme ces hypocrites de
pharisiens qui, non par manque de clarté, parce qu’en cela le Christ fut très
clair, mais à cause de la mauvaise volonté de leur cœur qui leur obscurcissait
la vue et qu’ils ne pouvaient voir rien de bon dans le Seigneur. C’est le signe
du Christ et Siméon dit à Marie que son cœur sera transpercé par une épée.
Mères de famille – surtout vous, les
mères de jeunes enfants –, que diriez-vous si en allant faire baptiser votre
enfant, un prophète vous disait : « Cet enfant va avoir une fin
tragique. » Vous ne vivriez plus tranquille. Quand sera cette heure terrible?
Marie vécut comme cette mère, attendant l’heure où allait s’accomplir cette
prophétie de l’épée qui allait lui transpercer le cœur. Certains disent que
cette épée pouvait être le sentiment d’humilité d’une personne, qui par son
humilité se sent si petite devant la grandeur de sa vocation qu’il lui semble
que Dieu s’est trompé. Pourquoi le Seigneur m’a-t-il choisie? Et Marie se
sentait si petite devant la grandeur de sa collaboration Ă la RĂ©demption,
devant le mystère du Salut des hommes qu’elle sentit comme une épée; quand au
pied de la Croix elle sentit non pas une, mais sept épées lui traverser le cœur
devant la douleur de son Fils comme la tradition l’affirme.
B) Le Christ qui se révéla à Anne
Anne, la vieille centenaire, comme
quoi tous les âges se valent pour annoncer le Christ, annonçait la libération
d’Israël. Je m’imagine cette petite vieille qui, à la vue du Christ sortant de
la cathédrale dans les bras de la Vierge, disant à tout le monde :
« Le Rédempteur est arrivé! » et elle remplissait par cette nouvelle
le cœur de tous ceux qui l’écoutaient. Puisse Dieu que nous soyons tous
prophètes en ce sens d’annoncer le Seigneur! 31/12/78, p.87-88, VI.
Faits de la semaine
Le Christ, signe de contradiction.
L’histoire se répète. Nous devons dans nos homélies dominicales éclairer la
réalité à la lumière de l’Évangile. Ma première préoccupation, ne l’oubliez
pas, c’est d’être catéchiste, d’enseigner la religion et j’ai la satisfaction
de le faire. Après vient l’illumination, par cette doctrine, de la réalité. Cela
n’est pas le plus important, mais c’est la marque du réel où l’on se doit de
vivre cette doctrine. C’est pour cela, pour que nous comprenions qu’il s’agit
d’une doctrine qui est actuelle et qu’aujourd’hui aussi au Salvador de 1978
s’accomplit la prophétie du Christ signe de contradiction et, que le peuple de
Dieu continue d’être appelée pour être la Sainte Famille du
Christ, tandis que d’autres ne veulent pas entendre cet appel, que maintenant
je me réfère aux réalités concrètes, à notre semaine historique. 31/12/78,
p.89, VI.