Le Baptême, Épiphanie des richesses messianiques.

 

Homélie du baptême du Seigneur. 13 janvier 1980; Lectures : IsaĂŻe 42,1-4.6-7; Actes 10,34-38; Luc 3,15-16.21-22.

 

1) Introduction : La sĂ©rĂ©nitĂ© et l’allĂ©gresse d’appartenir Ă  la famille de Dieu

 

C’est la fête du baptême du Seigneur. En parlant du baptême, je ressens la foi et la sérénité de celui qui arrive à la maison et qui se souvient, avec sa famille, de son enfance, de ses origines et qui regarde vers son berceau. Comme nous avons besoin aujourd’hui de sentir cette sérénité familiale, lorsqu’autour de nous, il y a tant de turbulences! C’est alors que nous ressentons davantage la nécessité d’être unis en famille, lorsque frappent la persécution et la tempête.

 

Le baptême, berceau de cette famille où naît le Peuple de Dieu.

Je vous invite, en ce jour où nous célébrons le baptême du Seigneur, à sentir également que ce baptême du Christ est le berceau de toute cette Famille de Dieu. C’est là que nous sommes nés comme Peuple de Dieu, comme Famille de Dieu. Et la messe du dimanche devrait être comme cette fin de semaine en famille, auprès de notre Père, Dieu, auprès de notre frère, Jésus-Christ, tous comme des frères. Nous avons tant besoin de respirer cette atmosphère d’amour, de sérénité, d’allégresse, du foyer!

 

2) Citoyens d’un pays de la Terre, le baptême fait de nous des citoyens du Règne de Dieu

 

Notre acte de naissance se trouve dans une municipalité parce que nous sommes citoyens du peuple d’ici-bas. Mais nous avons aussi un acte de baptême à la paroisse qui est comme le berceau où nous sommes nés. Cela ne veut pas dire qu’il y ait une juxtaposition entre le domaine civil et religieux; cela signifie, au contraire, une complémentarité que je m’efforce beaucoup de clarifier en ces temps où l’on mentionne constamment le mot peuple.

 

Comme chrétiens, nous devons faire la distinction entre le Peuple de Dieu et le peuple naturel. Non pas pour nous en écarter, ni pour nous aliéner des problèmes civils, politiques, sociaux et économiques qui nous touchent aussi et que nous devons affronter en tant que citoyens de cette Terre. En tant que Salvadoriens, nous ne pouvons pas demeurer en marge de cette réalité. Mais en plus de cette réalité salvadorienne, avec un acte de naissance ici dans la patrie, nous appartenons à un autre Règne qui ne nous aliène pas de notre patrie mais qui nous rend forts, qui nous donne des lumières spéciales, des critères nouveaux, originaux, pour qu’en travaillant avec tous nos compatriotes de la Terre, nous sachions être le ferment du Règne de Dieu dans la société, dans le peuple salvadorien.

 

MĂ©diter aujourd’hui sur le baptĂŞme du Christ et sur notre propre baptĂŞme doit signifier ceci : notre identitĂ© propre comme nĂ©s pour le Règne de Dieu dans le baptĂŞme. Nous ne devons pas trahir cette citoyennetĂ© du Règne de Dieu. De mĂŞme, certains, parce qu’ils travaillent au règne de la Terre, veulent voir des contradictions entre l’être chrĂ©tien et l’être citoyen politique. Ils n’ont pas bien compris la nature des choses. Ils ne savent pas ce que c’est, qu’être chrĂ©tien. Ce jour du baptĂŞme est très important pour que tous les baptisĂ©s, mĂŞme s’ils sont engagĂ©s en politique, sachent faire honneur Ă  leur ĂŞtre chrĂ©tien. C’est un ĂŞtre qui porte, imprimĂ© en lui, un esprit impĂ©rissable parce qu’on ne peut effacer le caractère baptismal.

 

3) Épiphanie

 

Le baptême manifeste qui est Jésus, quelle est sa mission, qui sont les chrétiens

 

Nous concluons, en ce dimanche, la période de Noël qui a culminé dimanche dernier avec l’Épiphanie. L’Enfant, qui est né à Noël, à Bethléem, se manifeste, parce qu’Il est venu, non pas pour demeurer caché, mais pour se manifester et pour que tous les hommes Le connaissent et Le suivent; parce qu’Il ne nous a pas été donné d’autre Nom en qui nous puissions être sauvés. C’est pourquoi on L’exhibe, on Le présente et qu’Il est porté en public. C’est notre mission de L’apporter partout, d’être son Épiphanie, sa manifestation.

 

La fĂŞte d’aujourd’hui, le baptĂŞme du Christ, se situe dans le contexte liturgique de l’Épiphanie. Le baptĂŞme est l’endroit oĂą JĂ©sus se manifeste Ă  nouveau, comme nous allons le voir aujourd’hui. C’est ainsi que je dĂ©sire prĂ©senter mon homĂ©lie de ce matin : comme une application de la Parole de Dieu qui a Ă©tĂ© lue dans notre rĂ©alitĂ©, dans notre vie concrète, ici, au Salvador.

 

Plan de l’homĂ©lie :

 

1) Le Baptême de Jean prépara les origines du Peuple messianique

2) Le Baptême de Jésus est une Épiphanie de sa Mission messianique

3) Le Baptême des chrétiens, participation vitale aux richesses messianiques

 

1) Le Baptême de Jean prépara les origines du Peuple messianique

 

Aujourd’hui, nous touchons à trois contextes du baptême qui sont souvent confondus. Ceci servira, en quelque sorte, de catéchèse, de préparation sacramentelle, si nécessaire de nos jours. Dans aucune paroisse, on ne doit baptiser sans avoir instruit les parents et les parrains, de l’engagement solennel de la dignité baptismale.

 

A) Mission de Jean

 

Premièrement, concentrons-nous sur le baptĂŞme de Jean parce qu’il est mentionnĂ©, dans les lectures d’aujourd’hui, (Lc 3,15-16.21-22) que, pendant que Jean baptisait le peuple, JĂ©sus vient aussi se faire baptiser. C’est ici que se situe la première confusion des gens : « Je ne fais pas baptiser mon petit enfant parce que le Christ se fit baptiser, une fois adulte. Â» Quelle confusion! Ce n’est pas le baptĂŞme de Jean que nous donnons de nos jours dans l’Église catholique.

 

Atmosphère psychologique du baptême de Jean

 

Situons-nous dans l’atmosphère psychologique où se situe l’Évangile d’aujourd’hui. Le peuple était dans l’expectative et tout le monde se demandait si ce n’était pas Jean, le Messie.

 

La réponse de Jean précise sa mission et la portée de son baptême.

Il prit la parole et dit (Lc 3,16) : « Pour moi, je vous baptise avec de l’eau, mais vient le plus fort que moi et je ne suis pas digne de dĂ©lier la courroie de ses sandales; lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu. Â» C’était un mouvement qui avait Ă©tĂ© suscitĂ© dans le peuple. Un mouvement spirituel que Jean Baptiste suscita et qui attira des gens de toutes catĂ©gories sociales vers les rives du Jourdain pour se faire baptiser.

 

Avec cette phrase de l’Évangile d’aujourd’hui, le peuple Ă©tait dans l’expectative et tous s’interrogeaient. Est exprimĂ©e ici, la psychologie de cette atmosphère qui entourait Jean, celle d’un mouvement populaire qui Ă©tait Ă  la recherche d’une rĂ©ponse, de quelque chose. On attendait Celui qui devait venir, l’AnnoncĂ© des prophètes : Serait-ce ce Jean merveilleux, avec sa prĂ©dication, avec son autoritĂ©, avec son humilitĂ©, avec son austĂ©ritĂ©? Â»

 

B) Mission de Jean : « PrĂ©parer un Peuple parfait pour le Seigneur. Â»

 

Et Jean vient nous dire : « Je ne suis pas le Messie. Le Messie se trouve dĂ©jĂ  parmi nous et ma tâche est de Lui prĂ©parer un Peuple messianique. Celui qui va venir fonder le Peuple messianique, Celui qui va venir accomplir les promesses de tant de prophètes, est dĂ©jĂ  parmi nous mais je ne le suis pas. Je ne suis rien d’autre que son prĂ©curseur. Je lui prĂ©pare le chemin; ma mission est de convertir les gens. Mon baptĂŞme n’est pas un baptĂŞme qui donne la Vie Ă©ternelle. Mon baptĂŞme est un rite extĂ©rieur pour exprimer, avec ce lavement des eaux du Jourdain, le repentir du cĹ“ur. Â»

 

Quel Ă©tait le baptĂŞme de Jean?

 

« Mon baptĂŞme, plus que tout, est un acte intĂ©rieur de celui qui veut se faire baptiser. Personne ne peut se faire baptiser ici s’il ne fait pas un acte de conversion de ses pĂ©chĂ©s. Â» L’Évangile nous dit aussi que toutes sortes de gens s’approchaient pour lui demander (Lc 3,10-14) : « Que devons-nous faire? » Il leur rĂ©pondait : « Que celui qui a deux tuniques partage avec celui qui n’en a pas et que celui qui a de quoi manger fasse de mĂŞme. Â» Des publicains aussi vinrent se faire baptiser et lui dirent : « MaĂ®tre, que nous faut-il faire? » Il leur dit : « N’exigez rien au-delĂ  de ce qui vous est prescrit. Â» Des soldats aussi l’interrogeaient, en disant : « Et nous, que nous faut-il faire? Â» Il leur dit : « Ne molestez personne, n’extorquez rien, et contentez-vous de votre solde. Â»

 

C’est ainsi qu’avec l’intĂ©gritĂ© d’un homme qui prĂ©pare les chemins de Dieu, au nom de la loi de Dieu, il dit Ă  chacun ce qu’il doit lui dire, mĂŞme s’il s’agit du roi. Et il dit Ă  HĂ©rode : « Il n’est pas licite de vivre avec la femme de ton frère; c’est un pĂ©chĂ©. Â» Il parle ainsi mĂŞme s’il pressent que cela va lui coĂ»ter la vie parce qu’il n’existe pas de fauve plus horrible qu’une femme blessĂ©e dans son amour propre. La femme d’HĂ©rode, l’adultère, profitant de la grâce de sa propre fille aux yeux d’HĂ©rode, envoie chercher la tĂŞte de Jean Baptiste. Il meurt mais il triomphe parce que la vĂ©ritĂ© triomphe toujours.

 

C’est cela, le baptĂŞme de Jean : dire la vĂ©ritĂ©, prĂŞcher contre le pĂ©chĂ©, appeler au repentir. Et autour de Jean se forma une Ă©cole, un peuple de gens convertis, de gens qui cherchaient le Règne du Seigneur. C’était cela le vĂ©ritable carĂŞme de Jean. J’ai lu dans un commentaire cette prĂ©cieuse pensĂ©e : « Jean a conduit les hommes jusqu’au moment du Salut du monde; il les a prĂ©parĂ©s pour qu’ils se convertissent en un Peuple messianique, eschatologique de Dieu. Â» Nous dirions que Jean a prĂ©parĂ© la matière première pour que le Christ vienne inspirer, avec son baptĂŞme d’Esprit, la vie de Dieu que Jean ne pouvait pas donner. Mais il a prĂ©parĂ© la pâte, il a prĂ©parĂ© les consciences. Quel honneur! Nous ne faisons rien d’autre dans notre Ă©vangĂ©lisation, parce qu’aucun pĂ©cheur ne peut donner la grâce de Dieu, mais il peut ouvrir les chemins de la conversion Ă  Dieu qui lui donne sa grâce.

 

Quel honneur ce serait pour moi, très chers frères, chères sĹ“urs, chers auditeurs Ă  la radio, si vous ne m’écoutiez pas par curiositĂ©, mais comme on Ă©coutait Jean Baptiste : « Que devons-nous faire pour rencontrer le Règne de Dieu? » Je sais, et je rends grâce au Seigneur, qu’un grand nombre s’est converti parce qu’ils recherchent sincèrement ce que la Parole de Dieu a Ă  dire : le refus du pĂ©chĂ© et l’acquiescement de la vertu. Je ne dĂ©sire pas ĂŞtre autre chose; et, si, sur cette tribune, nous devons dĂ©noncer les abus, les outrages, les pĂ©chĂ©s et les injustices, c’est parce que nous voulons poursuivre la mission de Jean : prĂ©parer le peuple pour qu’il reçoive le Christ, pour qu’il fasse partie du Peuple messianique.

 

C) L’esprit de ce Peuple que recevra le Règne sera communautaire

 

L’esprit de ce Peuple fut merveilleusement dĂ©fini par le Concile Vatican II. Pour que vous voyez que la prĂ©dication de Jean conserve une terrible actualitĂ©, nous pourrions dire que le Concile recueille la doctrine du baptiste pour prĂ©parer au Christ son peuple qui, en 1980, continue d’être le Peuple qui a besoin de Lui; ce peuple qui cherchait sur les rives du Jourdain le Règne de Dieu qu’il ne pouvait trouver en Jean mais que celui-ci leur indiquait. (L.G. 9) : « de tous temps et chez toute nation, celui qui craint Dieu et pratique la justice Lui fut agrĂ©able. Cependant, Dieu n’a pas voulu sanctifier et sauver les hommes individuellement sans qu’aucun rapport n’intervienne entre eux, mais plutĂ´t, faire d’eux un peuple qui le reconnaisse vraiment et le serve dans la saintetĂ©. Â»

 

Surnaturel

 

Lorsque le Pape Pie XI, en 1925, Ă©tablit la fĂŞte du Christ Roi, il Ă©crivit une prĂ©cieuse encyclique qui s’intitule Quas Primas, dans laquelle il dĂ©crivit le Règne de Dieu, comme Jean baptiste le dĂ©crivait : « Son Règne n’est pas de ce monde. Cela ne signifie pas qu’Il n’ait pas de droit sur les règnes de ce monde; cela veut dire qu’il ne s’agit pas d’un règne de style mondain, qu’il s’agit d’un Règne particulier. On y entre par la pĂ©nitence et le baptĂŞme. Il s’oppose au règne de Satan; il professe la justice et les autres vertus, il exige l’abnĂ©gation. Â» Le Règne de Dieu, vous le connaissez tous parce que le Christ disait aux chrĂ©tiens : « Le Règne de Dieu est au-dedans de vous. Â»

 

Comme c’est diffĂ©rent d’être simplement Salvadorien, peuple naturel, que d’être Peuple de Dieu, exigeant dans ses vertus, dans ses renoncements, dans sa saintetĂ©! Nous pouvons dire qu’au Salvador, tous ceux qui forment le Peuple de Dieu sont Salvadoriens mais nous ne pouvons affirmer le contraire; ce ne sont pas tous les Salvadoriens qui sont membres du Peuple de Dieu. Prenons cela en compte, parce que Jean Baptiste aussi, dans son peuple, Ă©tait citoyen de Palestine; cependant, ce ne sont pas tous les Palestiniens de ce temps qui se convertirent et se prĂ©parèrent Ă  recevoir le Christ. Ces prĂ©mices que le Christ put rencontrer lorsqu’Il vint pour prĂŞcher, ceux-lĂ  Ă©taient le Peuple de Dieu : Palestiniens de tout cĹ“ur mais chrĂ©tiens convertis de tout cĹ“ur Ă©galement.

 

D) Jean fait le lien entre les préparations de l’Ancien Testament et les prémices du Nouveau Testament

 

Comme est prĂ©cieux le spectacle que nous raconte l’Évangile de saint Jean, dans le premier chapitre (35-36) : « Jean se tenait lĂ , de nouveau, avec deux de ses disciples. Regardant JĂ©sus qui passait, il dit : « Voici l’Agneau de Dieu. Â»

 

Les premiers disciples étaient issus de l’école de Jean

(Jn 1,37-42) : « Les deux disciples entendirent ses paroles et suivirent JĂ©sus. JĂ©sus se retourna et, voyant qu’ils le suivaient, leur dit : « Venez et voyez. Â» Ils vinrent donc et virent oĂą il demeurait, et ils demeurèrent auprès de lui ce jour lĂ . C’était environ la dixième heure. AndrĂ©, le frère de Simon-Pierre, Ă©tait l’un des deux qui avait entendu les paroles de Jean et suivit JĂ©sus. Il rencontre, en premier lieu, son frère Simon et lui dit : « Nous avons rencontrĂ© le Messie Â», ce qui veut dire le Christ. Il l’amena Ă  JĂ©sus.

 

Je vous ai lu ce passage parce qu’ici vous pouvez voir comment Jean, en prĂŞchant la conversion, prĂ©para au Christ la matière première pour initier son Règne. Ces premiers disciples du christ : Jean, AndrĂ© et Simon, proviennent de l’école de Jean le Baptiste. Et sans doute, les premières communautĂ©s chrĂ©tiennes Ă©taient des disciples de la pĂ©nitence que Jean enseignait. C’est pourquoi j’ai intitulĂ© cette première pensĂ©e : Jean Baptiste, par son baptĂŞme, prĂ©para les origines du Peuple messianique. Il ne fit pas le Peuple de Dieu mais il le prĂ©para pour que le Christ fasse, de ces hommes convertis, le Règne de Dieu.

 

2) Le Baptême de Jésus est une Épiphanie de sa Mission messianique

 

3) Le Baptême des chrétiens, participation vitale aux richesses messianiques

 

A) Il n’avait pas besoin d’être baptisé

 

Ce Christ s’approche pour se faire baptiser parmi les pĂ©cheurs qui allaient au Jourdain. C’était lĂ  un des problèmes des premières communautĂ©s chrĂ©tiennes. Comment expliquer que le Christ se fasse baptiser s’Il n’était pas pĂ©cheur? Si vous lisez les Ă©vangiles, vous verrez qu’on ne met pas trop l’accent sur ce problème du baptĂŞme du Christ. MĂŞme dans ce passage de l’Évangile de Luc, il est Ă©crit indirectement : « Pendant que Jean baptisait le peuple, le Christ est baptisĂ©. Â» Et Luc nous Le prĂ©sente aussitĂ´t en prière, comme s’il voulait passer rapidement sur ce problème qu’il ne savait pas rĂ©soudre. Cependant, la thĂ©ologie nous donne une prĂ©cieuse solution. Le Christ n’avait pas besoin d’être baptisĂ©; ce dernier s’en servit pour recevoir quelque chose, comme pour nous, lorsque nous nous faisons baptiser. Ce n’est pas l’expression d’un repentir pour recevoir le pardon parce qu’Il n’en a pas besoin. Il est le Saint par excellence.

 

Son baptême révèle ce qu’Il porte déjà en Lui.

 

Qu’était-ce donc ce baptême que nous célébrons aujourd’hui en ce second dimanche de l’Épiphanie? Ce baptême du Christ, plus qu’un acte pénitentiel, est une Épiphanie glorieuse, une révélation, une manifestation.

 

« Celui-ci est mon Fils! Â»

 

Cette manifestation du baptĂŞme du Christ pourrait ĂŞtre rĂ©sumĂ©e en ces mots qui ont Ă©tĂ© lus aujourd’hui, lorsque saint Luc, dans son Évangile, a dit (3,21-22) : « Et au moment oĂą JĂ©sus, baptisĂ© lui aussi, se trouvait en prière, le ciel s’ouvrit et l’Esprit Saint descendit sur lui sous une forme corporelle, comme une colombe. Et une voix partit du ciel : « Tu es mon Fils; moi, aujourd’hui, je t’ai engendrĂ©. Â»

 

Christ se fit baptiser non pas pour se faire Fils de Dieu, mais pour rĂ©vĂ©ler qu’Il est le Fils de Dieu. Le Christ se fit baptiser non pas pour rĂ©pondre Ă  un besoin qu’Il ressentait, mais Ă  un besoin que nous avions qu’Il se rĂ©vèle, qu’Il se prĂ©sente Ă  nous. C’est pourquoi je vous disais : Quelle prĂ©tention plus ignorante que celle de celui qui dit : « Je veux que mon enfant se fasse baptiser lorsqu’il aura atteint l’âge du Christ. Â» Mais ton fils n’est pas le Fils de Dieu; il est fils de la chair; il a besoin d’être baptisĂ© pour devenir fils de Dieu. Par contre, le Christ Ă©tait, dès sa conception dans les entrailles de Marie, un fils de Dieu qui n’avait pas besoin du baptĂŞme. S’il alla aux eaux du Jourdain, ce fut uniquement pour exprimer ce qu’Il Ă©tait dĂ©jĂ  et pour dire aux hommes ses richesses messianiques : « En moi s’accomplit tout ce qu’ont annoncĂ© les prophètes du messie. Â» Le baptĂŞme de JĂ©sus est donc une Épiphanie. Dans les trois lectures d’aujourd’hui (Is 42,1-4.6-7; Ac 10,34-38; Lc 3,15-16.21-22) nous retrouvons comme les commentaires de cette brève rĂ©vĂ©lation : « Tu es mon Fils bien-aimĂ©. Â»

 

Le témoignage de l’infériorité de Jean

 

Dans ce mĂŞme Évangile nous retrouvons le tĂ©moignage de Jean Baptiste, alors qu’on le confondait avec le Christ (Lc 3,16) : « Pour moi, je vous baptise avec de l’eau, mais vient le plus fort que moi, et je ne suis pas digne de dĂ©lier la courroie de ses sandales. Â» Je ne suis mĂŞme pas digne d’être son esclave.

 

Le tĂ©moignage de Jean : « Lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu. Â»

 

Il marque avec le feu du jugement tous ceux qui se laissent baptiser. Il marque l’homme de l’éternitĂ© du jugement de Dieu; c’est ce que ça veut dire : se faire baptiser dans le feu. Cette expression : « le feu Â», signifie, dans la Bible, non seulement la purification mais Ă©galement le jugement de Dieu. Ainsi, tout comme le feu dĂ©marque ce qui brĂ»le de ce qui demeure, ainsi en est-il pour l’être humain; sa conscience lui dicte de faire des choses solides, des choses qui ne servent pas uniquement Ă  ce monde transitoire.

 

Le baptême que le Christ donne, est un baptême de feu qui purifie l’être humain et lui donne aussi la consistance de pouvoir résister au jugement de Dieu. Il baptise en Esprit Saint parce que Celui-ci L’a oint, faisant de Lui le Fils de Dieu dès les entrailles de Marie. C’est le même Esprit Saint qui sanctifie l’enfant qui va être baptisé. Et cet enfant chrétien qui grandit fidèle à son baptême, porte le souffle de l’Esprit Saint, le souffle de la vérité. Le chrétien qui se laisse porter par son baptême, parvient à être saint ou héros. Il n’existe pas d’homme plus vaillant parmi les citoyens d’un pays que ceux qui sont baptisés, lorsqu’ils sont fidèles à leur baptême.

 

Ce sont les chrétiens salvadoriens que nous voulons. C’est pourquoi nous prêchons de la sorte, parce que nous voudrions secouer une routine qui encercle nos baptisés et qui les rend pratiquement païens et idolâtres de leur argent, de leur pouvoir. Quels baptisés sont-ils? Celui qui veut porter la marque de l’Esprit et du feu avec lesquels le Christ baptise, doit s’exposer à renoncer à tout et à rechercher uniquement le Règne de Dieu et sa justice. Le Salvadorien qui est marqué du baptême du Christ qui est Esprit et feu, doit être un être d’espérance éternelle; il ne doit pas se laisser vaincre par le pessimisme. Il ne doit pas non plus laisser ses idéaux d’éternité et de triomphe dans la foi, s’épuiser dans un projet politique de la Terre. Il doit flotter au-dessus de tous les désespoirs politiques de la Terre; c’est la grande espérance des salvadoriens baptisés.

 

C’est pourquoi, nous voulons aussi conclure par là, que tout Salvadorien baptisé qui travaille en politique, dans les circonstances actuelles si terribles que nous connaissons au Salvador, doit regarder l’amplitude du Règne de Dieu. Il ne doit pas se fanatiser dans de petits groupes politiques ou des partis et ne plus voir tout le panorama politique du bien commun de notre peuple, que par la fente étroite de sa seule organisation, de son seul projet. Il doit être un citoyen qui, depuis la perspective de l’espérance chrétienne, puisse comprendre celui qui a un autre projet politique, et, entre tous, il doit rechercher le Règne de Dieu pour qu’il s’incarne, pour qu’il s’intronise au Salvador.

 

Le témoignage de Pierre

 

Dans la lecture d’aujourd’hui, le tĂ©moignage de Pierre qui commente cette rĂ©vĂ©lation, cette Épiphanie du baptĂŞme : « Tu es mon Fils. Â»

 

Le Seigneur de tous

 

Dans la lecture d’aujourd’hui, saint Pierre dit (Ac 10,36) : « Le Christ est le Seigneur de tous. Â» Il dit aussi (10,38) : « Dieu l’a oint de l’Esprit Saint et de puissance Â»; de mĂŞme, il dit que Dieu Ă©tait avec Lui, qu’Il Ă©tait Dieu.

 

Le témoignage des prophètes

 

Mais surtout, je veux que nous nous concentrions sur le tĂ©moignage des prophètes de la première lecture d’aujourd’hui (Is 42,1-4.6-7). Cette magnifique lecture du prophète IsaĂŻe est le meilleur commentaire de la rĂ©vĂ©lation de Dieu sur le Christ dans le Jourdain : « Tu es mon Fils Â», dit Dieu.

 

Serviteur… Fils élu

 

Le prophète IsaĂŻe dit (42,1) : « Voici mon serviteur que je soutiens, mon Ă©lu en qui mon âme se complaĂ®t. J’ai mis sur lui mon Esprit. Â» C’est pourquoi, en ce jour du baptĂŞme, nous faisons mention de ces paroles d’IsaĂŻe : « Sur lui J’ai posĂ© mon Esprit. Â» C’est ce en quoi consiste l’onction qui fait du Christ un oint. Cela veut dire : Christ ou Messie. Messie est une parole d’origine orientale qui signifie la mĂŞme chose que le mot grec Christ ou le mot français Oint. C’est la mĂŞme chose : Messie, Christ, Oint. L’Esprit saint L’a oint, c’est-Ă -dire qu’Il Le pĂ©nètre de sa divinitĂ©, qu’Il L’élève au rang divin.

 

Mais doux…

 

Dans la lecture d’aujourd’hui, je voudrais que nous nous concentrions sur cette caractĂ©ristique du Christ (Is 42,2) : « Il ne crie pas, il n’élève pas le ton, il ne fait pas entendre sa voix dans les rues. Â» Comme cela est diffĂ©rent des cris de la dĂ©magogie que nous entendons ces temps-ci, parmi nous. Ă€ propos, je voudrais supplier les leaders politiques qui parlent dans les microphones, de ne pas commettre la faute que je commets : de crier trop fort quand nous avons un micro devant nous. Si cette invention sert Ă  quelque chose, c’est qu’elle nous aide Ă  prĂ©server notre gorge. Parce que lorsqu’on entend quelqu’un crier dans un microphone comme un dĂ©magogue, on se demande Ă  quoi peut bien lui servir d’avoir un microphone devant lui? « Il ne crie pas, ni n’élève le ton, ni ne fait entendre sa voix dans les rues. Â» Il y a un dicton qui dit : « N’élève pas le ton, mais renforce tes raisons. Â»

 

Ces jours-ci, en Ă©coutant certains discours Ă  caractère politique, je ne rencontre aucune idĂ©e constructive. Beaucoup de cris pour aplatir et frapper davantage, mais aucune expression qui nous fasse connaĂ®tre un quelconque projet, un idĂ©al serein pour construire le bien dans le pays. C’est ainsi que devait ĂŞtre la voix du Christ lorsqu’Il parlait, avec une sĂ©rĂ©nitĂ© que le prophète IsaĂŻe annonçait dĂ©jĂ  : « Il ne criera pas. Â»

 

Et après, il dĂ©crit l’attitude du Christ. (Is 42,3) : « Il ne brise pas le roseau froissĂ©, il n’éteint pas la mèche qui faiblit. Â» Nous sommes impatients; si nous voyons un roseau froissĂ©, nous achevons de le briser et nous le jetons. Si une mèche s’éteint, nous nous fâchons et nous la jetons. Le Christ n’éteint pas la mèche qui fume encore. Il demeure encore une petite lueur d’espoir, il y a encore quelque chose Ă  faire. Ne disons pas que toutes les portes se sont refermĂ©es alors qu’il y a encore des hommes qui peuvent raisonner.

 

Imitons le Christ qui est prĂ©cisĂ©ment venu pour nous racheter, nous qui Ă©tions ce roseau froissĂ©. Comment cela aurait-il Ă©tĂ© si le Christ avait procĂ©dĂ© comme nous agissons envers les autres? Combien le Christ a eu Ă  nous supporter au cours de toutes ces annĂ©es et nous ne nous sommes pas corrigĂ©s. Il continue d’espĂ©rer et d’attendre parce que peut-ĂŞtre qu’à la dernière heure, le fils prodigue reviendra et le père l’embrassera avec la mĂŞme tendresse avec laquelle Il embrassa le fils de sa maison qui fut toujours fidèle. C’est ainsi que Dieu nous aime, c’est ainsi que nous devrions nous aimer. En cette heure oĂą nous avons envie de tout rejeter, de quitter le pays, de tout abandonner, rappelez-vous cette attitude du Christ : « Il ne brise pas le roseau froissĂ©, ni n’éteint la mèche qui fume encore. Â»

 

Frères, sĹ“urs, il ne va pas sortir de cette crise du Salvador un paradis cĂ©leste, jamais! Il devra en sortir un rapiéçage. Tout ce qui se produit dans l’Histoire est un rapiéçage de l’humanitĂ© pĂ©cheresse. Il n’y a qu’une phase de rĂ©novation absolue et c’est « l’éternitĂ© Â», les cieux nouveaux de la Terre nouvelle; celle-ci sera la vĂ©ritable transformation. Tant que nous irons dans l’Histoire, nous devrons faire comme le Christ : raccommoder le roseau froissĂ© et souffler doucement sur le tison qui fume encore. Nous ne voulons pas faire un paradis sur Terre parce que c’est impossible.

 

Il porte la sécurité de Dieu

 

C’est cela, le Christ qui se prĂ©sente dans l’Épiphanie d’aujourd’hui. Mais cette force qu’Il porte avec tendresse et douceur, compte sur la sĂ©curitĂ© de Dieu (Is 42,6) : « Moi, YahvĂ©, je t’ai appelĂ© dans la justice, je t’ai saisi par la main, et je t’ai modelĂ©, j’ai fait de toi l’alliance du peuple, la lumière des nations. Â» Comment se pourrait-il que nous ne marchions pas avec confiance dans le Christ, si Dieu Le tient par la main et que nous, par notre baptĂŞme, sommes une seule chose en Lui?

 

Leader de la Libération

 

Il est le vĂ©ritable Leader de la LibĂ©ration. C’est ainsi que nous Le prĂ©sente la première lecture d’aujourd’hui : « Je T’ai formĂ© et J’ai fait de Toi l’alliance de mon peuple pour que Tu ouvres les yeux des aveugles, que Tu fasses sortir les dĂ©tenus de la prison et des cachots ceux qui vivent dans les tĂ©nèbres. Â» C’est un langage que nous pouvons entendre et qui se traduirait en langage moderne par : les opprimĂ©s! Le Christ est venu pour les opprimĂ©s de toute sorte. Et tous ceux qui dĂ©sirent libĂ©rer le peuple de l’oppression, ne peuvent rencontrer un autre leader plus grand que le Christ, l’unique LibĂ©rateur…

 

D) Le Christ se fit baptiser non par nĂ©cessitĂ©, mais pour mettre dans l’eau toute sa richesse messianique : la force de sa croix et de sa RĂ©surrection.

 

Parce qu’Il est Dieu qui vient avec ces charges que je viens d’expliquer, Ă  savoir d’implanter la justice, d’accomplir la RĂ©demption, de sauver le monde avec la tendresse d’un RĂ©dempteur. C’est pour cela qu’Il a souffert l’humiliation la plus Ă©pouvantable qu’Il dut endurer en mourant sur une croix. Mais il porte aussi la gloire que nul n’a pu recevoir : de ressusciter et d’être placĂ© Ă  la droite de Dieu. Cette mort humiliante et cette RĂ©surrection glorieuse sont la source de notre espĂ©rance et le baptisĂ© se signe de cette mort et de cette RĂ©surrection. Quel honneur de penser que vous tous, que j’ai devant moi, ĂŞtes le Christ! Jusqu’au plus humble des paysans qui m’écoute Ă  la radio : tu es le Christ parce que ton baptĂŞme t’a identifiĂ© avec la mort et la RĂ©surrection du Seigneur.

 

2) Le Baptême de Jésus est une Épiphanie de sa Mission messianique

 

3) Le Baptême des chrétiens, participation vitale aux richesses messianiques

 

Vous voyez donc comment notre baptême n’est pas celui que recevait de Jean ceux qui se repentaient de leurs péchés, ni celui qu’a reçu le Christ qui n’en avait pas besoin et qui se fit baptiser uniquement pour manifester qui Il était. Notre baptême est celui des pécheurs qui vont à la source baptismale et qui trouvent le pardon, en plus de toutes les richesses que le Christ a fait nôtres.

 

A) Le seconde lecture (Ac 10,34-38) d’aujourd’hui, nous raconte précisément le cas du premier païen qui se fit baptiser. Un païen nommé Corneille, qui priait à sa façon. Dieu lui révéla d’envoyer quérir Pierre parce qu’Il avait un message à lui dire. Mais Corneille eut peur parce que les Juifs ne pouvaient se mêler aux gentils. Pierre est Juif et le centurion Corneille est Romain; c’est un gentil. Cependant, parce que l’Esprit l’a ordonné à Pierre, celui-ci entre et s’entretient avec Corneille.

 

Modèle de pastorale baptismale

 

Nous avons dans le Livre des Actes, chapitre 10, tout le discours que Pierre prononça dans cette famille et duquel nous avons pris un fragment aujourd’hui. Pierre dit (10,34-35) : « Je constate en vĂ©ritĂ© que Dieu ne fait pas acception des personnes, mais qu’en toute nation, celui qui le craint et pratique la justice lui est agrĂ©able. Â» Et il leur parle du Christ. Si vous voulez savoir comment prĂŞchaient les apĂ´tres et voir si nous prĂŞchons de manière semblable Ă  eux, prenez ces discours que nous retrouvons dans le Livre des Actes. LĂ , vous trouverez aujourd’hui, dans le chapitre 10, le discours entier de Pierre en train de dire au centurion Corneille, comment est la religion chrĂ©tienne, que nous devons croire en un Christ, Fils de Dieu qui vint, qui mourut et qui ressuscita. Tout le catĂ©chisme! C’est une prĂ©paration sacramentelle qu’il leur donna.

 

D’abord la foi, puis le baptême et la manifestation de l’Esprit

 

(Ac 10,44-48) : « Pierre parlait encore quand l’Esprit Saint tomba sur tous ceux qui Ă©coutaient la parole. Et tous les croyants circoncis qui Ă©taient venus avec Pierre, furent stupĂ©faits de voir que le don du Saint Esprit avait Ă©tĂ© rĂ©pandu aussi sur les paĂŻens. Ils les entendaient en effet parler en langue et magnifier Dieu. Alors Pierre dĂ©clara : « Peut-on refuser l’eau du baptĂŞme Ă  ceux qui ont reçu l’Esprit Saint aussi bien que nous? » Et il ordonna de les baptiser au nom de JĂ©sus-Christ. Â» Le baptĂŞme est la venue de l’Esprit Saint après avoir acceptĂ© par la foi, la RĂ©demption qu’il nous prĂŞche. C’est cela, le schĂ©ma du travail d’évangĂ©lisation : Annoncer le Règne du Christ. Ceux qui veulent l’acceptent et pour manifester qu’ils l’acceptent, ils doivent se laisser baptiser.

 

B) Effet du baptĂŞme

 

L’Esprit Saint est dans le baptĂŞme et toute la richesse messianique du Christ qui a Ă©tĂ© manifestĂ©e dans le Jourdain, est communiquĂ©e Ă  l’enfant qui se fait baptiser. C’est pourquoi, on dit que les fonts baptismaux sont comme le berceau d’oĂą naĂ®t un homme nouveau dans le Règne de Dieu. L’effet du baptĂŞme est ce que nous dit la Bible aujourd’hui : « L’Esprit Saint tomba sur eux. Â» Cela veut dire que l’Esprit, qui animait le Christ, ce dont nous parla le prophète IsaĂŻe, nous animera aussi. Frères, nous sommes tous un peuple baptisĂ©; nous sommes un peuple prophĂ©tique, un peuple sacerdotal; nous sommes le Christ. Faisons honneur Ă  cette participation que notre baptĂŞme nous a donnĂ©e.

 

C) Deux images des lectures d’aujourd’hui, interprétées par la plus authentique tradition

 

Le Serviteur de Yahvé… n’est pas seulement JĂ©sus, mais la communautĂ© qu’Il reprĂ©sente : IsraĂ«l… le peuple chrĂ©tien. La première figure est celle qui parle du Serviteur de YahvĂ© qui est une figure très typique dans les lectures d’IsaĂŻe, le serviteur de Dieu. C’est un personnage mystĂ©rieux; mais les interprètes parviennent Ă  l’identifier avec le Christ, un Christ non seulement individuel mais un Christ communautĂ©. Le Serviteur de YahvĂ© est le Christ et la communautĂ© chrĂ©tienne est le peuple chrĂ©tien. Le Serviteur de YahvĂ©, lorsque nous le lisons avec ce critère, nous donne de nombreuses lumières sur le Livre d’IsaĂŻe. Quand, quelque part, quelqu’un souffre, ici nous avons les chrĂ©tiens du Salvador, ils sont le Serviteur de YahvĂ©, le Christ souffrant les difficultĂ©s et les persĂ©cutions avec ses chrĂ©tiens.

 

Toute cette Épiphanie est nôtre

 

Quand nous serons heureux et allègres, Serviteur de Yahvé qui a reçu l’Épiphanie ou l’allégresse de Dieu, et lorsque nous aurons la chance de nous en aller au Ciel avec le Christ, nous serons, avec Lui, un seul Serviteur de Yahvé, un seul Peuple de rachetés avec le Christ comme tête; et nous tous comme tête et nous tous comme membres de ce Christ glorieux. Quel honneur, quel destin plus sublime que celui de la personne qui se fit baptiser et qui s’incorpora au Christ! Elle ne se sépare plus de Lui, ni même pour l’éternité, à moins qu’elle ne le veuille par le péché.

 

La colombe n’est pas l’Esprit Saint, c’est la communauté qui entoure Jésus

 

L’autre figure merveilleuse des lectures d’aujourd’hui, c’est la colombe qui vient se poser sur le Christ. On interprète gĂ©nĂ©ralement qu’il s’agit lĂ  de l’Esprit Saint; mais ne vous scandalisez pas de ce que je vais vous dire : nulle part ailleurs dans la Bible, il n’est fait mention de l’Esprit Saint sous la forme d’une colombe. Plus encore, la tradition, pour interprĂ©ter cette colombe qui descend, dit qu’il s’agit de la communautĂ©. L es premiers Pères de l’Église, en analysant certaines phrases bibliques, qui comparent le peuple d’IsraĂ«l Ă  une tourterelle dans les mains de Dieu, y voient un symbole de la communautĂ©. Ainsi, il semble que dans le baptĂŞme du Christ, cette colombe signifiait que ce titre « Fils de Dieu Â», allait ĂŞtre portĂ© par toute sa communautĂ©. Nous formons, Ă  nous tous, comme l’ornement du Christ Notre Seigneur. Nous sommes son Peuple; nous sommes vĂ©ritablement ce que saint Paul appelle la « PlĂ©rome Â», le complĂ©ment, ce qui recouvre le Christ, ce qui revĂŞt le Christ Notre Seigneur.

 

D) Par le baptême, les richesses de la croix et de la Résurrection se font les richesses de l’humanité.

 

En ce sens, cette interprétation nous dit que le baptême nous incorpore au Christ et nous fait communauté du Christ et que la vie du Christ circule à travers nous. Toutes les belles comparaisons de l’Église, Corps mystique du Christ, tout cela signifie que la vie du Christ circule parmi nous. Par le baptême, donc, nous faisons nôtre la richesse messianique du Seigneur.

 

Rappelons-nous alors la signification de ces gestes que le prĂŞtre accomplit dans les fonts baptismaux. Avec le pouce, il oint la couronne de la tĂŞte avec le Saint ChrĂŞme et il nous dit qu’à partir de ce moment, nous sommes membres du Peuple du Christ : peuple sacerdotal, prophĂ©tique et royal. Le jour de la confirmation – c’est pourquoi nous voulons donner une conscience Ă  la confirmation. -, le jeune, dĂ©jĂ  conscient de ce qu’il veut faire, prĂ©sente son front pour que l’évĂŞque le marque du signe du Christ afin de devenir consciemment collaborateur du Christ RĂ©dempteur, prophète, prĂŞtre et roi. C’est ce que nous sommes les chrĂ©tiens, au Salvador. LĂ  oĂą il y a des chrĂ©tiens, il existe un Peuple de Dieu qui ne se distingue pas du peuple naturel, mais qui, Ă  l’intĂ©rieur du peuple, vit des rĂ©alitĂ©s et des espĂ©rances que n’ont pas ceux qui n’ont pas la foi, ou ceux qui, ayant Ă©tĂ© baptisĂ©s, vivent un baptĂŞme si incolore, si mort, si moribond, que ce serait la mĂŞme chose pour eux d’être demeurĂ©s paĂŻens.