L’Église Sainte mais qui a besoin de purification.

 

Trente-et-unième dimanche ordinaire; 5 novembre 1978; Lectures : Malachie 1,14b-2,2b.8-10; Thessaloniciens 2,7b-9.13; Matthieu 23,1-12.

 

Tout ce chapitre 23 de saint Matthieu est un modèle d’homĂ©lie, il est une dĂ©nonciation terrible contre la religion officielle, contre les abus, contre les vanitĂ©s, une rĂ©clamation d’authenticitĂ©. Rappelez-vous que selon le schĂ©ma de saint Matthieu que nous avons Ă©tudiĂ© durant toute l’annĂ©e, nous sommes maintenant arrivĂ©s aux derniers dimanches de l’annĂ©e. Celui oĂą le Christ se trouve au milieu d’une crise par oĂą doit passer le Royaume avant de pouvoir s’implanter : l’opposition, la mauvaise interprĂ©tation, la calomnie, la tentation de ne pas vouloir entendre. C’est dans cette ambiance qu’est Ă©crit par saint Matthieu, le chapitre 23 qui est non seulement un portrait biographique du Christ, mais qui est Ă©galement la rĂ©flexion des premiers chrĂ©tiens sur les enseignements du Christ et comment cette communautĂ© judĂ©o-chrĂ©tienne est en train de les vivre. Ils Ă©taient juifs, la majeure partie convertie au christianisme. Ils se sentaient Ă©piĂ©s par les autres juifs qui Ă©taient demeurĂ©s fidèles au judaĂŻsme, et par les prosĂ©lytes gagnĂ©s par ces mĂŞmes juifs qui Ă©taient bien plus fanatiques que ceux-ci et qui considĂ©raient les chrĂ©tiens comme des renĂ©gats. Dans les mots d’aujourd’hui nous dirions qu’ils Ă©taient subversifs. Cette subversion suit le Christ authentiquement en sachant qu’elle n’est pas une subversion, mais qu’elle est la vĂ©ritable fidĂ©litĂ© au Seigneur, rĂ©flĂ©chie en communautĂ©. 05/11/78, p.273, V.

 

« Mes frères, je voudrais donner Ă  cette homĂ©lie un titre audacieux, presque sacrilège, mais le Concile Vatican II en fait lui-mĂŞme mention : l’Église sainte, mais qui a besoin de Purification. Â» Cette parole se trouve dans le numĂ©ro 8 de Lumen Gentium et tout le texte dit ceci : « Au contraire du Christ, saint innocent, immaculĂ© qui ne connut pas le pĂ©chĂ©, sinon qu’Il vint uniquement pour expier les pĂ©chĂ©s du peuple, l’Église, elle, contient dans son propre sein les pĂ©cheurs. C’est ce qui fait qu’elle est Ă  la fois sainte et qu’elle ressent le besoin de purification, qu’elle avance continuellement par le sentier de la pĂ©nitence et de la rĂ©novation. Â» Pour moi, c’est lĂ  le plus beau passage du Concile. Nous ferions très mal de croire que le meilleur dans le monde est l’Église. Plusieurs considèrent ainsi l’Église, incapable de pĂ©chĂ©, immaculĂ©e, intouchable. Mais le Concile a dit non, en son sein existent des pĂ©cheurs. ÉvĂŞques, prĂŞtres, religieuses, couples, nous nous appelons chrĂ©tiens, mais nous sommes en mĂŞme temps pĂ©cheurs, nĂ©cessiteux de la purification et pour nous le vĂ©ritable chemin demeure le sentier de la pĂ©nitence et de la rĂ©novation. Malheur au  chrĂ©tien! Malheur Ă  l’évĂŞque! Malheur au prĂŞtre qui se sent si parfait qu’il peut tromper les autres. Comme il va ĂŞtre corrigĂ© par JĂ©sus-Christ maintenant. Et dans cette pensĂ©e de l’homĂ©lie, l’Église sainte et nĂ©cessiteuse de purification, comme de coutume, je vous prĂ©sente ces trois points de rĂ©flexions :

 

 

Plan de l’homĂ©lie :

1) Les péchés de l’Église

2) La Sainteté de l’Église

3) Où se trouve la source de cette sainteté d’une Église pécheresse, mais qui aspire à la sainteté?

 

La source se situe dans ce que nous dit saint Paul de l’Église (Th 2,13) : « Vous avez reçu la Parole de Dieu comme Parole de Dieu et non comme une parole d’homme Â», c’est lĂ  qu’est le secret. 05/11/78, p.274-275, V.

 

 

1) Les péchés de l’Église

 

Commençons par le premier point : les pĂ©chĂ©s de l’Église. DĂ©jĂ  la première lecture d’aujourd’hui (Ml 1,14b-2,2b. 8-10), pour laquelle on essaie toujours de faire un parallèle avec l’Évangile du jour, est prise du prophète Malachie. Avec quelle franchise s’exprime-t-il en ce temps oĂą se restructurait le culte du temple de JĂ©rusalem, alors qu’il y avait une certaine prospĂ©ritĂ© – c’est souvent cela le mal : le bien-ĂŞtre dans l’Église amène un relâchement. Les prĂŞtres qui se sentent Ă  l’aise dans leur paroisse, faites très attention! Les chrĂ©tiens qui sentent que l’Évangile ne les dĂ©range pas : Faites bien attention Ă  ce bien-ĂŞtre que peut procurer le culte sans engagement auquel fait rĂ©fĂ©rence la terrible prophĂ©tie de Malachie (2,1;7-9) : « Et maintenant Ă  vous ce commandement! Car c’est aux lèvres du prĂŞtre de garder le savoir et c’est de sa bouche qu’on recherche l’enseignement : il est messager de YahvĂ©. Mais vous vous ĂŞtes Ă©loignĂ©s de la voie; vous en avez fait trĂ©bucher un grand nombre par l’enseignement. Et moi je vous ai rendus mĂ©prisables et vils pour tout le peuple.» Il n’existe rien de pire qu’un mauvais prĂŞtre. Si le sel devient insipide, Ă  quoi peut-il servir? disait le Christ, rien d’autre qu’à ĂŞtre jetĂ© au sol et foulĂ© au pied par les hommes. Combien triste est la parole du prĂŞtre lorsqu’il a perdu sa crĂ©dibilitĂ©, elle est comme une boĂ®te de mĂ©tal qui sonne vide.

 

Vous n’avez pas gardé mes voies, Dieu se fie à des humains pour appliquer la loi, si c’est un tel, ou une telle, tant mieux; si c’est un pauvre, un moins que rien, personne n’y prête attention. L’Église des pauvres est un critère d’authenticité, parce que ce n’est pas une Église de classe, cela ne signifie pas qu’elle déprécie les riches. Elle dit aux riches que s’ils ne deviennent pas comme les pauvres dans leur cœur, ils ne pourront pas entrer dans le Royaume des Cieux. Le véritable prédicateur du Christ c’est l’Église des pauvres pour rencontrer dans la pauvreté, dans la misère; dans l’espérance de celui qui prie dans le bidonville, dans la douleur, dans le fait de ne pas être entendu, un Dieu qui écoute et c’est seulement en s’approchant de cette voix que l’on peut également sentir la présence de Dieu.

 

Mais en plus de cette prophĂ©tie, l’Évangile d’aujourd’hui (Mt 23,1-12) est bien plus terrible encore. Je ne voudrais pas me limiter uniquement aux versets officiels de ce dimanche, j’ai apportĂ© la Bible pour que tout le chapitre 23, qui est une terrible dĂ©nonciation de la première communautĂ© chrĂ©tienne qui rĂ©flĂ©chit sur ce que le Christ nous a laissĂ© comme enseignement, pour voir comment nous le vivions. Mais dans le passage officiel d’aujourd’hui nous rencontrons dĂ©jĂ  ces pĂ©chĂ©s de l’Église (Mt 23,2-3). « Sur la chaire de MoĂŻse se sont assis les scribes et les pharisiens : faites donc et observez tout ce qu’ils pourront vous dire, mais ne vous rĂ©glez pas sur leurs actes : car ils disent et ne font pas. Â» Le premier pĂ©chĂ© de l’Église est lorsqu’il existe une contradiction entre ce qui s’enseigne et ce qui se fait.

 

Les Ă©vĂŞques Ă©crivaient au mois de mars de l’annĂ©e dernière, dans un communiquĂ© officiel : « Celui qui dĂ©nonce doit ĂŞtre disposĂ© Ă  ĂŞtre dĂ©noncĂ© Â», et c’est Ă  notre tour maintenant. Aujourd’hui dans une rĂ©flexion de communautĂ©, en toute franchise, je vous invite en tant que peuple prophĂ©tique qui possède l’obligation de dĂ©noncer les injustices du monde, Ă  ce que nous nous regardions nous-mĂŞmes, des pasteurs jusqu’aux fidèles, pour voir si notre dĂ©nonciation n’est parfois qu’hypocrisie, nous disons, mais nous ne faisons rien.

Un autre pĂ©chĂ© dans la lecture d’aujourd’hui (Mt 23,4) : « Ils lient des fardeaux et les imposent aux Ă©paules des gens, mais eux-mĂŞmes se refusent Ă  remuer le petit doigt. Â» Cela est l’interprĂ©tation rigoureuse, parfois inhumaine de la loi. Plusieurs moralistes, quelques professeurs ou conseillers : comme il nous est facile d’imposer des fardeaux que nous ne serions pas capables de porter nous-mĂŞmes!

 

Un autre pĂ©chĂ© plus Ă©pouvantable et très frĂ©quent chez les ecclĂ©siastiques : la vanitĂ© et l’hypocrisie. Tout ce qu’ils font c’est pour ĂŞtre vu des gens, ils allongent leurs phylactères – les phylactères Ă©taient des rubans qui se terminaient par une petite boĂ®te oĂą Ă©taient copiĂ©s des passages de la loi – afin d’accomplir sous une forme matĂ©rielle un commandement de Dieu : « Porte la loi devant tes yeux. Â» Mais ceux-ci l’entendaient d’une façon si matĂ©rielle qu’ils copiaient dans des petites boĂ®tes la loi et qu’ils se les collaient sur les yeux, ou sur le front, ceux-lĂ  s’appelaient les phylactères. Ou bien ils remplissaient les doublures de leur manteau – vĂŞtements amples des pharisiens qui passaient sur les places et Ă  l’épaisseur de leur doublure se reconnaissait la majestĂ© de leur pouvoir sacrĂ©, de leur sagesse. Combien de vanitĂ©, et grâce Ă  Dieu les Papes modernes ont renoncĂ© Ă  la tiare, aux capes royales et Ă  toute cette emphase qui nous fit tant de mal par la vanitĂ© ecclĂ©siastique.

 

Une religion d’ostentation, de ceux qui aiment ĂŞtre saluĂ©s. En Orient, lorsque le rang social de la personne est plus grand, d’autant plus long sera le salut. Et l’on s’entretenait en de longues salutations pour paraĂ®tre important. Mais le Christ dit (Mt 23, 8) : « Pour vous, ne vous faites pas appeler Rabbi Â», car vous n’avez qu’un MaĂ®tre, et vous vous ĂŞtes des frères : car vous n’avez qu’un Père cĂ©leste. Â»

Quelle rĂ©flexion ecclĂ©siastique! DĂ©jĂ  sainte ThĂ©rèse de l’Enfant JĂ©sus disait : nous nous confondons avec les titres qu’il nous faut donner aux prĂ©lats, excellence ou Ă©minence, et nous ne nous entendons plus. Cela apparaĂ®t souvent comme une plaisanterie : Excellence, excellence. Alors combien plus beau est le simple nom de chrĂ©tien! C’est pourquoi l’Évangile nous fustige et je voudrais en toute franchise chrĂ©tienne que nous tous, en dĂ©butant par moi-mĂŞme, nous nous convertissions Ă  cette terrible diatribe de Notre-Seigneur JĂ©sus-Christ. (Mt 23,11) : « Que le plus grand parmi vous se fasse votre serviteur. Â» C’est le point de dĂ©part, c’est en cela que doit consister la vĂ©ritable grandeur de l’être humain. Lorsque plus grand, il possède davantage d’autoritĂ©, qu’il ne manifeste pas en phylactère, ni en protocole, ni en vĂŞtements, qu’il le dĂ©montre par son service, par la simplicitĂ©, en Ă©tant le premier Ă  offrir. Parce que celui Ă  qui Dieu a donnĂ© autoritĂ©, Il lui a donnĂ© la grâce pour servir ce peuple non pas pour le malmener, pour l’outrager, ou pour lui mettre des charges, mais pour l’aider et le servir. 05/11/78, p.275-276, V.

 

Après cette lecture officielle de l’Évangile, le verset 13 et les suivants comprennent sept terribles menaces du Christ que je ne veux pas perdre ce matin pour que nous priions ensemble pour ne pas tomber dans ces malĂ©dictions du Seigneur. (Mt 23, 13) : « Malheur Ă  vous, scribes et pharisiens hypocrites, qui fermez aux hommes le Royaume des cieux! Vous n’entrez certes pas vous-mĂŞmes, et vous ne laissez mĂŞme pas entrer ceux qui le voudraient! Â» Il se rĂ©fère aux Juifs enfermĂ©s dans leurs synagogues qui expulsaient ceux qui se faisaient chrĂ©tiens et qu’ils considĂ©raient comme des renĂ©gats. C’est pourquoi le Christ leur dit : « Pour avoir rejetĂ© le Christ, vous n’entrerez pas dans le Royaume des Cieux et Ă  ceux qui veulent entrer vous leur fermez les portes. Vous avez les clĂ©s de la connaissance, vous connaissez mieux la loi, mais vous n’avez pas su reconnaĂ®tre le Christ qui est l’accomplissement de la loi. Â» Ne nous fions pas trop Ă  notre sagesse thĂ©ologique, Ă  nos connaissances religieuses, si ce n’est de l’humilitĂ© qui accepte le Christ, rien ne sert cette connaissance de la loi.

 

Deuxièmement (Mt 23,15) : « Malheur Ă  vous, scribes et pharisiens hypocrites, qui parcourez mers et continents pour gagner un prosĂ©lyte, et, quand vous l’avez gagnĂ©, vous le rendez digne de la gĂ©henne deux fois plus que vous. Â» En ces premières annĂ©es du christianisme, les juifs parcouraient toutes les terres connues – quelque chose de semblable Ă  ce que font les protestants actuellement Ă  la recherche de prosĂ©lytes – et lorsqu’ils y parvenaient, ils les rendaient plus fanatiques qu’eux-mĂŞmes dans leur haine envers les chrĂ©tiens. C’est pourquoi le Christ dit qu’ils les rendent deux fois plus condamnables qu’eux-mĂŞmes. Ă€ quoi sert de gagner un homme pour la perdition?

 

Troisièmement (Mt 23,16-22) : « Malheur Ă  vous, guides aveugles, qui dites : “Si l’on jure par le sanctuaire, cela ne compte pas; mais si l’on jure par l’or du sanctuaire, on est tenu.” InsensĂ©s et aveugles! Quel est donc le plus digne, l’or ou le sanctuaire qui a rendu cet or sacrĂ©? Vous dites encore : “Si l’on jure par l’autel, cela ne compte pas; mais si l’on jure par l’offrande qui est dessus, on est tenu.” Aveugles! Quel est donc le plus digne, l’offrande ou l’autel qui rend cette offrande sacrĂ©e? Aussi bien jurer par l’autel, c’est jurer par lui et par tout ce qui est dessus; jurer par le sanctuaire, c’est jurer par lui et par Celui qui l’habite; jurer par le ciel, c’est jurer par le trĂ´ne de Dieu et par Celui qui y siège. Â»

 

C’était typique des pharisiens et des scribes dans un grand nombre de cas, mais la plupart du temps, il s’agissait de faux motifs pour Ă©chapper aux engagements. C’est Ă  cela que se rĂ©fère le Christ : vous avez inventĂ© des formules et vous ne vous ĂŞtes pas aperçus que l’intention de celui qui dit une formule est de jurer ou de ne pas jurer. Si vous avez promis sous serment, vous ĂŞtes obligĂ©s, ne recherchons pas une casuistique pour Ă©chapper aux engagements que nous avons contractĂ©s avec Dieu.

 

Quatrième malĂ©diction (Mt 23, 23) : «Malheur Ă  vous, scribes et pharisiens hypocrites, qui acquittez la dĂ®me de la menthe, du fenouil et du cumin, après avoir nĂ©gligĂ© les points les plus graves de la loi, la justice, la misĂ©ricorde et la bonne foi; c’est ceci qu’il fallait pratiquer, sans nĂ©gliger cela. Â» Il existait une loi qui consistait Ă  payer la dĂ®me pour les biens que Dieu nous donne sur la Terre, mais ces hommes de la loi en Ă©taient arrivĂ©s Ă  tant de mĂ©ticulositĂ©s qu’ils se confiaient en ces petites choses du cumin et de la menthe et qu’ils n’accomplissaient plus le plus difficile et le plus important de la loi. C’est pourquoi le Christ emploie cette terrible comparaison : « Guides aveugles, vous arrĂŞtez au filtre le moustique et vous engloutissez le chameau. Â» (Mt 23,24).

 

« Malheur Ă  vous, scribes et pharisiens hypocrites, qui purifiez l’extĂ©rieur de la coupe et de l’écuelle, quand l’intĂ©rieur est rempli par rapine et intempĂ©rance! Pharisien aveugle! Purifie d’abord l’intĂ©rieur de ta coupe et de l’écuelle, afin que l’intĂ©rieur aussi devienne pur. Hypocrites qui ressemblez Ă  des sĂ©pulcres blanchis : au-dehors, ils ont belle apparence, mais au-dedans, ils sont pleins d’ossements de morts et de toute pourriture. Vous de mĂŞme, au-dehors vous offrez aux yeux des hommes l’apparence de justes, mais au-dedans vous ĂŞtes pleins d’hypocrisie et d’iniquitĂ©. Â» (Mt 23,25-28)

 

Quelles belles comparaisons! Combien d’apparences remplies de rapines et d’injustice? Comme est divertissante une sociĂ©tĂ© oĂą chacun vĂŞtu de soie et de sandales se salue avec courtoisie, et qui de l’intĂ©rieur se dĂ©testerait les uns les autres. Comme sont belles les officines, la bureaucratie, les tables des tribunaux! Mais lĂ  comparaĂ®t un homme entre deux gardes nationaux avec des marques Ă©videntes de tortures, qui doit rĂ©pĂ©ter ce qu’on l’a forcĂ© Ă  dire sous la torture, parce que le juge est incapable d’éloigner les gardes pour que le pauvre homme puisse dire la vĂ©ritĂ©. Comme sont belles les façades de nos prisons, celles de nos bases militaires! Mais lĂ  au-dedans c’est l’enfer : de vĂ©ritables sĂ©pulcres oĂą l’on meurt comme disparus.

 

Malheur Ă  vous les scribes et les pharisiens hypocrites, qui bâtissez les sĂ©pulcres des prophètes et dĂ©corez les tombeaux des justes, tout en disant : « Si nous avions vĂ©cu du temps de nos pères, nous ne nous serions pas joints Ă  eux pour verser le sang des prophètes. Â» Ainsi, vous en tĂ©moignez contre vous-mĂŞmes, vous ĂŞtes les fils de ceux qui ont assassinĂ© les prophètes! Eh bien! Vous comblez la mesure de vos pères! (Mt 23,29-32)

 

Quelle pensĂ©e profonde du Christ! Ă€ quoi sert-il de chanter l’éloge des prophètes que nos ancĂŞtres ont tuĂ©s surtout si nous continuons Ă  tuer les prophètes? C’est pourquoi le Christ dit qu’ils comblent la mesure de leurs pères : « Serpents, race de vipères, comment pourrez-vous Ă©chapper Ă  la condamnation de la gĂ©henne? Â» (Mt 23,33). « Vous comblez la mesure Â» signifie que le Christ est l’expression maximum des prophètes. Il ne parle pas du passĂ©, mais du prĂ©sent parce que les scribes et les pharisiens trament dĂ©jĂ  comment le faire crucifier. Ils vont ainsi combler cette mer de sang et de crimes, d’hypocrisie et de pourriture, qu’ont commis leurs ancĂŞtres. L’iniquitĂ© de votre injustice arrive Ă  son comble, serpents, races de vipères. 05/11/78, p.277-278, V.

 

C’est pourquoi je vous envoie, et ici le Christ se rĂ©fère au Nouveau Testament qui est l’histoire que nous connaissons. Quelle tristesse que le Salvador se trouve tachĂ© aussi par cette parole du Christ (Mt 23,34-36) : « C’est pourquoi voici que j’envoie vers vous des prophètes, des sages et des scribes : vous en tuerez et mettrez en croix, vous en flagellerez dans vos synagogues et les pourchasserez de ville en ville, pour que retombe sur vous tout le sang innocent rĂ©pandu sur la terre, depuis le sang de l’innocent Abel jusqu’au sang de Zacharie, fils de Barachie, que vous avez assassinĂ© entre le sanctuaire et l’autel. En vĂ©ritĂ©, je vous le dis, tout cela va retomber sur votre gĂ©nĂ©ration. Â» Cela se passe près de l’annĂ©e soixante-dix de notre ère. DĂ©jĂ , les Romains planifient le siège de JĂ©rusalem. DĂ©jĂ  ce comble de l’ingratitude des hommes qui ne voulurent pas recevoir les envoyĂ©s de Dieu, dont le plus grand, le Fils de Dieu fait homme qui prĂŞcha l’amour, la justice, la libertĂ©. Il ne fut pas compris, Lui aussi ils le tuèrent.

 

Frères, Dieu est infiniment bon, mais aussi infiniment juste et tout ce sang, tous ces crimes, toutes ces hypocrisies. Et ici depuis le début je vous dis que je ne me réfère pas uniquement à ce qui se produit à l’extérieur de l’Église, nous sommes dans une dénonciation intime de nous-mêmes. Toute notre iniquité de pasteur, toute notre hypocrisie de prêtre, tous nos manques de sainteté, de vie consacrée, tout le manque de fidélité de tant de ménages chrétiens, mais adultères, de tant de jeunes qui ne vivent pas la pureté qui correspond à ce que Dieu leur demande, de tant de sociétés où l’on ouvre des bordels, où existent tous les centres du vice; de tant d’apparences! Tout cela ne peut demeurer ainsi. Ce serait un Dieu maquereau et injuste si tout cela devait demeurer sans connaître un jour la colère du Seigneur. Et elle arrive, nous dit le Christ. 05/11/78, p. 278-279, V.

 

 

2) La Sainteté de l’Église

 

Saint Paul dans la seconde lecture (Th 2,7b-9.13) affirme qu’il ne travaille pas pour son profit personnel. Avec quelle tendresse il Ă©crit aux gens de Thessalonique : « Nous nous sommes faits tout aimables au milieu de vous. Comme une mère nourrit ses enfants et les entoure de soins, telle Ă©tait notre tendresse pour vous que nous aurions voulu vous livrer en mĂŞme temps que l’Évangile de Dieu, notre propre vie. Â» S’il demeure certain que l’Évangile est la première lecture qui ait Ă©tĂ© une terrible mise en garde contre les mauvais pasteurs, dans la sainte Église qui a toujours besoin de purification, il y a Ă©galement un riche arsenal de saintetĂ©.

 

Qu’il est réconfortant de savoir qu’en ces derniers mois, alors que l’Église avait besoin de Papes, elle put trouver parmi ses pasteurs deux hommes méconnus qui étaient riches comme saint Paul. Et comme Paul, il y a non seulement des pasteurs, mais également des religieux, des prêtres, des laïcs, qui peuvent dirent qu’ils aiment le peuple comme une mère et qui se donnent pour lui. 05/11/78, p.286-287, V.

 

 

3) Où se trouve la source de cette sainteté d’une Église pécheresse, mais qui aspire à la sainteté?

 

Je termine en rĂ©pondant Ă  cette question : oĂą se trouve le secret de cette conversion, de cette rĂ©novation de l’Église? Dans la seconde lecture d’aujourd’hui, saint Paul dit : « VoilĂ  pourquoi, de notre cĂ´tĂ©, nous ne cessons de rendre grâce Ă  Dieu de ce que, une fois reçue la parole de Dieu que nous vous faisions entendre, vous l’avez accueillie, non comme une parole d’hommes, mais comme ce qu’elle est rĂ©ellement, la Parole de Dieu. Et cette parole reste active en vous, les croyants. Â»

 

C’est le secret de la saintetĂ©. Dans le sein de l’Église, nous avons beaucoup de pĂ©cheurs, mais lorsque ceux-ci accueillent cette parole de pardon, d’espĂ©rance et de foi, nous commençons Ă  nous convertir. Peu importe le pĂ©chĂ© quand la Parole de Dieu a commencĂ© Ă  rendre un homme nouveau. Grâce Ă  Dieu, il en existe beaucoup dans notre archidiocèse. Je peux dire, comme saint Paul Ă  plusieurs, non pas Ă  tous, mais Ă  plusieurs : je rends grâce Ă  Dieu parce que vous recevez ma parole pour ce qu’elle est en vĂ©ritĂ©, la Parole de Dieu. Cependant, de nombreux autres la reçoivent comme une parole d’homme, comme la parole d’un ennemi, comme une parole de subversion, comme une parole qui veut le mal. C’est la triste destinĂ©e de celui qui prĂŞche la Parole de Dieu, ĂŞtre comme le Christ un signe de contradiction. Mais bĂ©ni soit Dieu. MĂŞme si ce que je dis ne sert que de pauvres vĂ©hicules. Ce qui importe, c’est ce qui se trouve Ă  l’intĂ©rieur de ce vĂ©hicule : la Parole de Dieu qui est accueillie dans les cĹ“urs et qui y opère la saintetĂ© et la vie. C’est pourquoi nous retrouvons de nombreux signes de saintetĂ© Ă  l’intĂ©rieur de nos communautĂ©s. 05/11/78, p.287, V.