Le Pape, cœur de l’Église
Treizième dimanche du temps
ordinaire; 2 juillet 1978; Lectures : II Rois 4,8-11.14-16a; Romains
6,3-4.8-11; Matthieu 10,37-42.
Il est facile de prĂŞcher
théoriquement ces enseignements, de suivre fidèlement le magistère du Pape en
théorie. C’est très facile! Mais lorsqu’il s’agit de vivre, d’incarner, de
confronter la réalité dans l’histoire d’un peuple souffrant comme le nôtre,
avec ces enseignements salvateurs, c’est alors que surgissent les conflits. Ce
n’est pas que je sois devenu infidèle… Jamais! Au contraire, je me sens
aujourd’hui plus fidèle parce que je vis l’épreuve, la souffrance et la joie
intime de proclamer une doctrine que j’ai toujours crue et aimée, non seulement
avec des paroles et avec des professions des lèvres, mais parce que je tente de
la rendre vivante dans cette communauté que le Seigneur m’a confiée. Je vous
supplie tous, mes frères, si nous sommes véritablement des catholiques, fidèles
à l’Évangile authentique, si véritablement nous voulons faire honneur à cette
parole des disciples du Christ, n’ayons pas peur d’incarner cette doctrine dans
notre histoire. 02/07/78, p.42, V.
Paul VI a dit : « Ne
prêchons pas uniquement par la parole, que notre prédication soit également le
témoignage de notre vie. » Je me souviens d’une phrase qu’il avait dite
une fois : « Le monde d’aujourd’hui a besoin d’autant de maîtres que
de témoins, témoins de l’amour, témoins de la sainteté. » Et il s’est
proposé d’être le témoin de la
sainteté. Il est véritablement saint! En regardant Paul VI,
chaque catholique se sent comme devant cet aigle des Psaumes, qu’un aigle plus
grand nous invite à prendre notre envol vers les hauteurs de la sainteté. Sa fidélité
au Christ en a scandalisé plusieurs, de même que son amour au peuple. Il a su
incarner la perfection d’une personne qui ne vit plus pour elle-même, mais pour
être un exemple et un but pour tous ceux qui désirent suivre Notre Seigneur
Jésus-Christ. Il est le véritable disciple. Il disait : « Chacun doit
suivre sa propre vocation : les prêtres par leur sainteté sacerdotale, les
religieux et les religieuses par leur sainteté de vie consacrée, les couples
par la sainte fidélité à leur mariage, les célibataires par la chasteté de ceux
qui doivent rendre à Dieu l’hommage de l’holocauste de leur propre chair, les
jeunes, les enfants. » 02/07/78, p.44-45, V.
De cette sainteté sacramentelle,
saint Paul nous a dit aujourd’hui (Rm 6,3-4;8-11) qu’un chrétien n’est pas
autre chose, ni rien de moins, qu’un homme incorporé à la mort et à la
résurrection du Christ. C’est en cela que se trouve la véritable Rédemption. C’est
pourquoi l’Église ne peut confondre sa prédication, sa mission avec d’autres
libérations simplement terrestres. La libération que l’Église annonce est
celle-ci : celle du Pape, celle du baptĂŞme, celle des sacrements, celle de
la confession. Celle
qu’on annonce au pécheur : Je t’absous de tes péchés. Je romps les chaînes
qui sont la cause de tous les esclavages du monde. Parce que le monde ne serait
pas si mal si les humains étaient pardonnés de leurs péchés. Le mal existe
parce que les hommes et les femmes sont prisonniers de leur Ă©goĂŻsme, de
l’orgueil, de l’ambition, de l’envie, du pouvoir abusif. C’est pourquoi le
péché existe, c’est pourquoi il y a tant de disgrâce, qu’il existe des
iniquités dans cette humanité qui devrait être la famille des enfants de Dieu.
Qu’il est merveilleux de penser, en
terminant cette homélie, que saint Paul nous dit que cette incorporation du
chrétien au Christ est définitive. Tous ceux qui furent baptisés, s’ils
désirent demeurer véritablement fidèles au Christ, ne mourront plus, sauf s’ils
trahissent leur foi et leur conviction religieuse en tournant le dos au Christ
et qu’ils deviennent des pécheurs. C’est ainsi que nous connaissons la disgrâce
de nombreux pécheurs baptisés, de nombreux païens baptisés, de nombreux
idolâtres baptisés. Ils n’accomplissent pas la mission de leur baptême. Le Pape
est le grand sacrement parce qu’en lui se reflète l’Église. De lui dérive la
juridiction, la capacité d’un sacerdoce qui baptise les humains dans le monde
entier et qui incorpore ces ĂŞtres humains pour en faire de nouveaux membres de
l’humanité nouvelle.
Chers frères, que cet hommage au
Saint-Père culmine dans notre promesse de fidélité à notre baptême, par une
proposition de sainteté. N’allons pas lutter pour des libérations simplement
temporelles, mais travaillons pour la véritable liberté des enfants de Dieu,
pour rompre les chaînes qui attachent notre cœur et notre âme pour faire de
chacun de nous un instrument habile à créer un monde nouveau. Les structures
nouvelles, les nouvelles lois ne serviront à rien s’il n’y a pas des hommes
nouveaux qui, avec un cœur rénové en Jésus-Christ, sachent faire de cette
patrie une véritable société nouvelle. 02/07/78, p.50, V.