L’Église, Communion des hommes avec
Dieu
Sainte Trinité; 05 juin 1977;
Lectures : Proverbes 8,22-31; Romains 5,1-5; Jean 16,12-15.
Qui est Dieu?
Peut-ĂŞtre croyons-nous en un Dieu
loin de nous, un Dieu qui ne comprend pas nos angoisses et nos tribulations?
Mais grâce à Dieu, le Christ et toute la littérature du Nouveau et de l’Ancien
Testament nous présente en ces jours un Dieu qui vit avec nous, un Dieu vivant,
un Dieu que nous appellerions fonctionnel. Un Dieu, tel que cité dans l’Ancien
Testament, Dieu d’Abraham, Dieu de Jacob, Dieu d’Isaac, ou comme écrit saint Paul,
le Dieu de Notre Seigneur JĂ©sus-Christ.
C’est un Dieu qui marche avec notre
histoire. C’est un Dieu qui se manifeste dans le buisson ardent que Moïse a
vu : « Je suis Celui qui est. » Ce texte est difficile et c’est
peut-être celui qui fut le plus étudié par les exégètes bibliques. « Je
suis Celui qui est. » Cela peut être entendu dans un sens métaphysique,
l’essence même de Dieu, son être qui ne peut cesser d’être. Mais il apparaît
bien plus sympathique de nous le représenter comme le Dieu de la Révélation, un
Dieu qui ne peut être le produit de nos pensées, le Dieu qui n’est pas comme le
couronnement de nos efforts pour le découvrir, mais un Dieu qui vient à notre
rencontre et se révèle. Ce Dieu me dit en Moïse : « Je suis Celui qui
est. » Celui qui est avec toi, Celui qui est avec ton peuple. Celui qui
est, en cette heure où l’on entend les plaintes d’un peuple tourmenté, esclave
des contremaîtres de Pharaon. Celui qui entend ces gémissements et qui veut se
prévaloir de Moïse pour les libérer. Un Dieu qui se préoccupe de l’esclavage
des hommes pour les libérer. Un Dieu qui vit avec les peuples sous-développés
pour qu’ils se développent libres selon la véritable image qu’Il voulut faire
de chaque visage humain. Ce Dieu se préoccupe de nous. C’est ainsi qu’Il se
présente et c’est là l’objet de notre réflexion de ce matin : depuis
l’Église, nous sentir, nous précisément comme Église, en communion avec Dieu.
L’Église est une communion des hommes
avec Dieu. C’est le premier niveau de cette communion, de là elle descend
naturellement à un second niveau : L’Église est la communion de ces fils
de Dieu marqués par le baptême, unis au Christ, le Fils de Dieu. Et en ce
troisième niveau : l’Église en communion avec le monde entier, avec la
création. C’est cela, la grandeur de notre peuple chrétien. […] Qu’il y ait ou
pas persécution, nous construisons l’Église avec la conviction qu’elle est la
communion de tous les hommes pour nous approcher de Dieu.
1) Dieu présent dans l’Église
Selon le Concile Vatican II :
« L’Église est dans le monde du sacrement. » C'est-à -dire le signe et
l’instrument pour unir intimement les hommes avec Dieu et unir tous les hommes
entre eux. C’est à cette fin que l’Église existe, c’est là sa première raison
d’être. Le Christ nous a révélé que Dieu est communion, que Dieu est trois
Personnes avec cette capacité que devrait avoir toute personne créée à son
image, une ouverture pour recevoir et pour se donner à l’autre. Le Père est
comme « Je » initial. Le Fils est comme « Toi » avec qui
s’établit un courant d’amour si intense que cette relation produit
« Nous », la communauté dans un amour indestructible, l’Esprit
d’amour : l’Esprit saint. Cette unité qui se prononce dans la Sainte
Trinité nous rend capables de nous donner et de nous recevoir mutuellement en
construisant sur la Terre cette communauté qu’est l’Église.
Mais en premier lieu, il s’agit d’un
Dieu qui se donne à cette communauté qui l’a rencontré en Jésus-Christ. Le
Christ est l’homme en qui Dieu s’est fait visible. Le Christ est comme le
buisson ardent illuminé de Dieu que Moïse a vu. « Nous avons vu sa gloire
de Premier-né du Père, » disaient les apôtres, « et nous vous
révélons cette vie qu’Il nous apporta, pour que vous aussi entriez en communion
avec nous, avec le Père, le Fils et l’Esprit saint. »
De Dieu dérive la vie de l’Église. De
la vérité divine dérive sa prédication sur la Terre. De sa vie éternelle dérive
le pardon qu’Il donne aux pécheurs repentis, la sainteté des âmes qui croissent
jusqu’au sommet de la contemplation. De Dieu dérive toute la force, toute la
raison d’être de l’Église. C’est là la relation la plus grande et la plus
intime, une relation avec Dieu. C’est de là que dérivent toute sa mission et
toute sa raison d’être. […]
Comprenons qu’il s’agit là de notre
première obligation : notre relation avec Dieu. Il y a des moments où
l’Esprit nous demande un effort plus grand pour rendre plus visible la Présence
de Dieu en ce monde. Il se fera visible dans la mesure oĂą : Ă©vĂŞques,
prĂŞtres, religieux, laĂŻcs, couples, Ă©tudiants, professionnels, tous se disent
catholiques. Tentons d’intensifier cette communion avec Dieu pour la
conversion, pour la sainteté. Le péché sous toutes ses formes, est comme le
brouillard qui s’interpose. Éloignons de nous toutes espèces de péchés et alors
le Peuple de Dieu, l’Église de Dieu, les catholiques unis en communion avec
Dieu, rendront présente en ce monde la sainte figure de Dieu. Dieu est
communion et l’Église participe de cette communion avec Lui. 05/06/77, p.79-81,
I-II.
2) L’Église, communion des baptisés
Celui qui veut appartenir Ă ce Peuple
de Dieu organisé par le Christ qui se nomme l’Église catholique doit accepter
certaines conditions et s’il ne les accepte pas et les rejette volontairement,
c’est un schismatique, un destructeur de l’Église, qui s’excommunie moralement
par sa propre volonté.
Observez bien cette question :
Celui qui n’est pas dans cette Église ne se sauvera pas? Je n’ai pas dit cela.
J’ai dit que : celui qui connaît les conditions pour appartenir à ce Peuple de
Dieu et, volontairement, les rejette il est alors hors du Salut, mais si
quelqu’un qui n’est pas catholique, par conviction de conscience, croit qu’il
est dans la vĂ©ritĂ©, qu’il soit protestant, juif, musulman ou paĂŻen, et qu’Ă
partir de ces convictions il s’efforce d’accomplir les lois de Dieu comme il
les conçoit, celui-là est dans la vérité. Il appartient au cœur du Christ, au
cœur de l’Église même s’il ne fait pas partie de son corps. Ainsi, comme par
ailleurs, il existe de nombreux baptisés qui sont dans le corps de l’Église,
mais qui par leurs attitudes, par leur rejet de ces conditions, n’appartiennent
pas au cœur de l’Église. Ils se nomment catholiques, mais ils ne le sont pas,
ils sont en dehors du Salut. Ceux qui sont au-dehors de l’Église, mais qui de
bonne foi vivent leur religion, leur congrégation, ceux-là sont sur le chemin
du Salut, ils sont dans le cœur de l’Église. Ils ne sont pas hors du Christ
parce que ce dernier déborde l’Église. Il est une présence de Salut également
chez le protestant, chez le musulman, chez le juif, chez celui qui possède une
bonne volonté. C’est le Christ qui nous sauve. 05/06/77, p.83, I-II.
3) Communion avec le monde
L’Église ne s’identifie pas avec le
monde. Le Christ l’a dit : vous n’êtes pas de ce monde, mais vous êtes
dans le monde, parce que l’Église se compose d’hommes de ce monde, comme
nous le sommes tous. Et l’Église veut apprendre le langage, la culture des
peuples du monde pour pouvoir traduire dans leur langage, dans leur manière
d’être, son message divin qui ne s’identifie avec aucune culture ni avec aucun
parti politique, ni avec aucun système social. Son message est une lumière qui
doit éclairer tous les systèmes sociaux, tous les systèmes politiques et la vie
des hommes. Elle est une lumière en ce monde qui apporte à la condition humaine
sa véritable dimension. L’Église, enseignée par le Créateur, dit que l’homme a
été fait à l’image et à la ressemblance de Dieu et enseigne par le Christ que
tout ce qu’on fait à un être humain, c’est à Lui qu’on le fait. C’est elle qui
est la mieux formée en humanité, pour s’approcher du monde et sentir comme
siennes les aspirations, les nobles désirs des hommes, et qui, à partir du cœur
également, rejette la violence et tout le mal de ce monde. C’est elle qui
console et donne l’espérance à la mère qui souffre, à l’épouse qui devient
veuve, Ă tous ceux qui souffrent dans les circonstances actuelles.
L’Église demeure en dialogue continu
avec le monde. L’Église souffre avec les peuples qui souffrent. Elle ressent
comme les siens les tortures et les mauvais traitements que subissent les
peuples et les gens. L’Église aspire au véritable progrès des peuples, elle vit
la rĂ©alitĂ© humaine. Sans compĂ©tence en politique ou en sociologie, parce que lĂ
n’est pas sa compétence, L’Église, à partir de sa science humaine, de sa
révélation de Dieu, veut rendre présent la Lumière divine en ce monde. Elle est
également en dialogue intime avec le monde. Rien d’humain ne lui est étranger.
[…]
La Sainte Trinité n’est pas autre
chose que le Dieu en communauté de personnes, expression d’amour et de vérité,
de lumière et de bonheur, qui a voulu s’associer dans une famille à tous les
hommes. Elle réalise cela dans ce circuit de lumière qu’est l’Église en faisant
appel à tous les catholiques pour qu’ils intensifient la sainteté et l’unité de
leur relation avec Dieu et, qu’à partir de là , ils sachent illuminer le monde
avec la lumière de Dieu. J’aimerais ici faire un appel spécial aux laïcs. C’est
avec une joie intense que je manifeste ma gratitude à Dieu d’éveiller chez les
laïcs une conscience de vivre leur rôle d’Église en ce monde. Vous êtes dans le
monde, pères et mères de famille, enseignants, professionnels, ouvriers,
journaliers, employés, vendeuses du marché, laïcs en général. Comme se transformerait
le monde si vous apportiez tous cette Présence de Dieu que vous portez dans
votre cœur! Ce serait comme un flambeau qui illuminerait votre atmosphère de
travail. […]
Notre service personnel et
professionnel que le Seigneur a le droit de nous demander parce qu’Il nous a
faits, nous a rachetés, nous espère dans son Ciel. Dieu veut que nous n’y
parvenions pas seuls, mais que chacun amène avec lui une constellation d’âmes
gagnées pour avoir été Lumière de Dieu au milieu des hommes et des femmes au cours
de sa vie. 05/06/77, p.84-85, I-II.