L’Église, Communauté d’Amour
Vingt-quatrième dimanche du temps
ordinaire; 17 septembre 1978; Lectures : Ecclésiaste 27,33-28,9; Romains
14,7-9; Matthieu 18,21-35.
Vous venez d’entendre trois passages
des Écritures saintes : un écrit par un expert de la connaissance de la
sagesse des Israélites, c’est le livre de l’Ecclésiastique (27,23-28,9). La
dernière provient des lèvres mêmes du Christ qui nous offre la belle parabole
du pardon (Mt 18,21-35) et la seconde est le commentaire de saint Paul (Rm
14,7-9).
Nous sommes dans le passage
évangélique où le Christ nous offre les traits de la communauté chrétienne,
nous sommes encore dans le chapitre 18 de saint Matthieu. Il nous parle ici
d’un des traits qui caractérisera ceux qui se consacreront comme disciples du
Christ dans l’Église, le pardon. Le pardon n’est pas une faiblesse, c’est une
force. Saint Paul nous présente un autre conflit au sein de la communauté,
celui qu’il nomme entre les forts et les faibles et qui dans les Temps modernes
se traduit par progressistes et conservateurs. Sur ces deux conflits : le
pardon et la violence de la haine d’une part; le progrès et la tradition
d’autre part, doit régner une chose dit la Bible : l’amour. Nous
intitulons notre réflexion d’aujourd’hui comme le dernier point de celle de
dimanche dernier : « L’Église communauté d’Amour. »
Plan de l’homélie :
1) Le problème de la violence et le
pardon
2) Le conflit entre les
traditionaliste et les progressifs
3) La clé de la solution : la
transcendance de l’amour
Afin de mieux comprendre, de mieux
incarner cette pensée si actuelle pour nous qui sommes la communauté chrétienne
de 1978, la même communauté que le Christ créa il y a vingt siècles et qui
traverse l’histoire, les conflits et les réalités de ce monde. J’aimerais,
comme de coutume, non pas par manie de sortir de l’Évangile, mais pour mieux la
situer dans notre réalité, que nous tenions compte de deux dimensions de la vie
de notre Église au cours de cette semaine : Des faits vécus par notre Église,
par nos communautés dans l’archidiocèse ou dans l’Église universelle; et de
cette Église qui se construit dans la modestie, dans l’amour, dans la sincérité
des événements concrets en regard du monde profane, et des faits qui nous
entourent. C’est ainsi qu’a toujours été l’Église. Elle est le ferment dans la
pâte et sa préoccupation doit être de se maintenir comme ferment et de faire
fermenter la pâte. Elle
a été fondée par le Christ comme lumière pour illuminer les ténèbres du monde.
C’est pourquoi ces deux plus grandes préoccupations doivent être
celles-ci : se maintenir comme lumière brillante et irradier celle-ci en
direction des ténèbres. Une Église ne peut s’occuper uniquement d’elle-même,
comme ceux qui vivent en se préoccupant seulement de leur santé et qui n’ont
plus le temps de ne rien faire pour les autres. L’Église s’occupe de sa santé,
non pas d’une manière égoïste, mais pour être saine et forte afin de servir.
L’objectif de l’Église est de servir : « Comme mon Père m’a envoyé au
monde, ainsi Je vous envoie dans le monde. Allez par toutes les nations pour
les aider dans leurs difficultés, pour les fortifier contre leurs faiblesses,
pour les aider à résoudre leurs problèmes avec la lumière de l’Évangile. »
C’est ainsi que notre Église se construit. Je ne dis pas que ce sont là ses
seuls traits. Je ne fais rien d’autre que de tirer de la richesse spirituelle
de notre Église dont les humbles démonstrations nous démontrent que l’Église
n’est pas un cadavre, ni un musée, mais qu’elle est la vie qui marche en ce
monde. […]
Si l’Église vit et prêche aujourd’hui
en ce monde cette même doctrine du Christ et qu’elle peut se dire une fidèle
disciple du Christ, c’est grâce à la prêtrise. Parce que le sacerdoce inventé par le
Christ est comme le lien entre la personne du Christ ressuscité et vivant dans
son Église, et l’Église concrète qui proclame les nécessités des peuples. C’est
grâce au prêtre que sa doctrine éternelle devient lumière concrète en chaque
circonstance. Il est comme une garantie que le Christ est présent au sein de la
communauté ecclésiale. 17/09/78, p.187-189, V.
1) Le problème de la violence et le
pardon
C’est pourquoi j’ai voulu catégoriser
ainsi la pensée biblique de ce matin : le conflit entre la violence et la
haine, d’une part, et d’autre part : Le pardon et l’amour. La première
lecture (Si 27,23-28,9) reprend toute la sagesse de la Bible pour nous dire que
la haine et la rancœur ne sont pas bonnes, que du vindicatif se vengera le
Seigneur. Je voudrais profiter de ce message de l’Écriture sainte pour vous
dire à nouveau d’étudier et de réfléchir en groupe notre Lettre pastorale sur
l’Église et les organisations politiques populaires.
La troisième partie traite
précisément du jugement de l’Église sur la violence et les pages sacrées de la
Bible, nous disent aujourd’hui que lorsque la Bible conseille le pardon, la
bonne volonté et la paix, elle nous signale l’idéal des chrétiens qui n’est pas
de la lâcheté, qui n’est pas une évasion des vaillants, de ceux qui préfèrent
fuir. Dans ma Lettre pastorale, je dis : « Tout homme possède un
potentiel de saine agressivité dont la nature l’a dotée pour surmonter les
obstacles de la vie. La
valeur, l’audace, l’absence de peur devant les risques sont des vertus et des
valeurs notables de notre peuple qui se sont incorporées à la vie de notre
société non pour nous rendre aveugles, mais pour construire le droit et la
justice pour tous et plus spécialement pour ceux qui aujourd’hui en sont
privés. » Je rappelle aussi comment les documents de l’Église disent que
le chrétien aime la paix, non pas parce qu’il ne peut pas combattre, mais parce
que la paix vaut mieux. Le chrĂ©tien est pacifique, dit le document de MedellĂn,
il est pacifique et cela ne le fait pas rougir. Il n’est pas simplement
pacifique, il est capable de combattre, mais il préfère la paix à la guerre. Il sait que les
changements brusques et violents de structures sont trompeurs, inefficaces en
soi et non conformes à la dignité du Peuple. Mais également, ainsi comme nous
défendons ces valeurs humaines que sont l’agressivité et le courage, nous
disons avec passion qu’elles ont besoin d’être éduquées. L’agressivité que
chacun possède peut faire de nous des criminels ou des saints. Il n’y a pas eu
de saints qui n’aient été agressifs. Le véritable chrétien n’est pas un lâche
et lorsque cela est nécessaire, il sait combattre, mais il sait aussi
s’orienter par les principes de la paix, de l’amour et du pardon, grande force
de cette agressivité. C’est pourquoi il existe une violence qui se nomme la violence
de la non-violence. C’est
celle que nous enseigna le Christ lorsqu’Il dit : « Lorsqu’on te
frappe sur la joue, tends l’autre joue. » Cela n’est pas de la lâcheté. J’y crois par
expérience. N’importe qui peut l’essayer, qu’en frappant l’autre, en l’insultant,
l’on s’attend à une réponse agressive et violente. Et si en échange on reçoit
un sourire, un pardon, une compréhension, le plus fort aura été celui qui a été
frappé. C’est pour cela qu’on raconte que les martyrs ne manquaient pas de
courage lorsqu’ils se laissaient tuer, mais que depuis leur situation de
victimes, ils étaient plus forts et étaient victorieux de leurs persécuteurs.
Où sont les mains qui sont tachées de
tant de crimes? Elles tremblent. Il n’existe pas de gens plus craintifs que les
criminels. C’est que le dĂ©veloppement de la personne humaine est contraire Ă
cela. Voici pourquoi le Seigneur dans la Bible nous enseigne cette force de la
non-agressivité, du pardon. Mais, mes frères, je voudrais aussi vous dire, pour
rendre hommage à la vérité et à cette puissance que l’être humain porte, qu’il
y a des moments où savoir user de l’agressivité n’est que justice et vertu.
Dans notre première Lettre pastorale, nous disions : le cas de la légitime
défense. Quelqu’un qui est agressé injustement a le droit de se défendre, c’est
la violence de la légitime défense. Mais elle possède ses propres règles :
que la défense ne surpasse pas le degré de violence de l’agression. Par
exemple, s’il suffit de se défendre avec les mains, il n’est pas licite de tirer
une balle à l’agresseur. Une autre condition concerne l’usage d’une violence
proportionnée seulement après avoir épuisé tous les moyens pacifiques
possibles. Lorsqu’un agresseur n’entend pas les raisons que la victime tente de
lui donner et qu’il continue d’être violent, alors la victime, lorsqu’elle a
épuisé tous les moyens pacifiques, possède le droit à la légitime défense.
C’est pourquoi on dit que la guerre est la dernière raison.
Une autre condition que la légitime
défense nous apporte, est qu’elle ne peut surpasser la violence qu’elle cherche
à éviter. Par exemple, si pour me défendre d’un agresseur je vais commettre une
violence plus grande, je vais créer une injustice plus grande, alors prévaut le
bien supérieur. Comme cet autre cas qui appartient à la doctrine traditionnelle
de l’Église et dont il ne faut pas vous scandaliser parce qu’il n’est pas
nouveau en soi. Les récents documents de l’Église n’ont fait que le rappeler
pour les situations actuelles des hommes d’aujourd’hui. Les documents de
MedellĂn sur la Paix, citant un texte de l’encyclique Populorum Progressio de Paul VI, mentionnent la lĂ©gitimitĂ© d’une
insurrection dans le cas exceptionnel d’une tyrannie évidente et prolongée qui
porte gravement atteinte aux droits fondamentaux de la personne et endommage
sérieusement le bien commun du pays, que cela provient d’une personne ou de
structures évidemment injustes. Mais tout de suite après nous tenons compte des
conditions. L’Église avertit également du danger d’engendrer par un soulèvement,
de nouvelles violences, de nouvelles injustices, de nouvelles ruines,
lesquelles rendraient également condamnable le droit à l’insurrection. Vous
allez penser que je m’avance et m’abstiens en même temps. Il s’agit là des
conditions de la vérité morale, cela demeure très difficile à appliquer. Le
critère de discernement provient de la conscience de chaque homme et de chaque
peuple qui doit juger de cela à la lumière des principes de la morale
chrétienne.
Ainsi comme des violences permises
existent, la violence en général ne peut être un moyen pour conquérir la justice. C’est pourquoi
dans la Lettre pastorale, nous réprouvons également les violences
institutionnalisées qui en quelque sorte violentent la situation du peuple. À
côté de cette violence, il existe également la violence répressive de l’État
qui provoque chez le peuple, la violence qu’elle prétend chercher à contrôler.
La violence pour la violence ne peut pas ĂŞtre un instrument en soi et doit ĂŞtre
mesurée selon sa gravité. C’est pour cela que je tiens à vous rappeler l’idéal
de l’Église et du chrétien. C’est ce que nous a rappelé aujourd’hui la Parole
de Dieu, non pas comme un recours Ă la faiblesse, parce que dans ces lectures
nous avons pu voir également que Dieu fera usage de sa violence, de sa colère
et de sa justice contre ceux qui ne mériteront pas le pardon. Le pardon suppose
chez l’autre le repentir. Le pardon présuppose chez l’autre une conversion, un
changement de conduite, et lorsque l’homme a changé et cherche le Seigneur avec
repentir, le Seigneur use alors la violence de la non-violence : la
miséricorde, le pardon, le baisée de la paix. Il est beau de voir deux amis qui se sont
réconciliés, mais cette réconciliation présuppose dans le cœur un contrôle plus
fort, le contrôle de la colère, de l’agressivité, de la rancœur. C’est pourquoi
l’idéal du pardon que les Saintes Écritures nous enseignent aujourd’hui doit
être comme l’étoile qui nous guide en cette ambiance de violence, non pour
justifier ce qui ne peut l’être, mais pour réclamer la conversion de ceux qui
doivent se convertir afin qu’il y ait la paix et le pardon.
En terminant la Lettre pastorale,
nous faisons un appel à toutes les forces vives du pays, à ceux qui détiennent
le pouvoir de l’argent, à ceux qui possèdent le pouvoir politique, pour qu’ils
ne les utilisent pas comme une violence institutionnalisĂ©e ou rĂ©pressive, Ă
ceux qui ont le potentiel intellectuel ou les capacités d’organisation, pour
qu’ils recherchent le dialogue et qu’ils sachent user de cette force qu’ils ont
conquise, au service de la concorde, du pardon et de la paix. Nous faisons
également appel à ceux qui ne possèdent rien ou qui possèdent peu, afin qu’ils
ne fassent pas consister leurs revendications en violences sanglantes, mais en
de justes moyens de pression qui doivent promouvoir la justice devant
l’injustice.
C’est cela, notre idéal, pour que
vous voyiez, mes frères, que la prédication de paix que l’Église fait en ce
monde de violence, n’est pas de la lâcheté ou d’évasion, mais une façon
d’affronter la réalité et la situation pour dire aux gens qui sont tentés par
la violence en notre pays. Qui n’est pas tenté par la violence en cette
ambiance de violence? Quelle famille dont le père, le frère ou la mère est
séquestré ne ressent pas la haine, la rancœur, la violence, envers ceux qui
leur ont fait subir l’injustice? Ainsi également, le pauvre, l’opprimé pendant
tant d’années, un peuple incompris dans son droit de participation au bien
commun, enfermé et opprimé qui sent la tentation de la violence. Ce n’est pas
un mal de sentir la passion et la tentation, le mal c’est de ne pas éduquer ces
sentiments. Et dans la Lettre pastorale, nous condamnons ceux qui ont fait de
la violence une mystique, une religion et qui pensent que les choses ne peuvent
se régler autrement que par la violence. Nous leur disons que cela n’est pas le
chemin de la rationalité et que toutes ces manifestations de violences
irrationnelles ne peuvent être approuvées de Dieu.
Très chers frères, je crois que vous
comprenez bien la pensée de l’Église qui nous invite à la lumière de la Parole
de Dieu à méditer les grandes valeurs positives de l’agressivité humaine que
nous portons tous en nous, mais qui ne sont jamais aussi belles que lorsque
nous les utilisons pour pardonner ou pour demander pardon, pour nous
réconcilier, pour arranger les choses, pour ne plus verser le sang, pour que
disparaisse cette horrible figure de notre patrie afin que celle-ci devienne ce
qu’elle se doit d’être. 17/09/78, p.193-195, V.
2) Le conflit entre les traditionaliste
et les progressifs
C’est pourquoi la seconde pensée
traite de cet autre conflit qui surgit également chez les premières communautés
chrétiennes. Ce que saint Paul (Rm 14,7-9) appelle le conflit entre les forts
et les faibles. L’Épître aux Romains se réfère probablement à ceux qui se
convertirent au christianisme en provenance des traditions religieuses
judaĂŻques et paĂŻennes. Ils croyaient que certaines viandes ne pouvaient ĂŞtre
mangées et c’est pourquoi ils étaient végétariens. Par contre, d’autres qui
avaient déjà surmonté et compris comme saint Paul que le Salut provient de la
foi en Jésus-Christ et non des préceptes religieux, dépréciaient les
traditionalistes. Ceux-ci en retour se scandalisaient de ces progressistes,
tout comme aujourd’hui. Le mal c’est de se radicaliser, de se mettre aux
extrêmes et de penser que seule mon idée est la bonne, tandis que l’autre fait
de même. C’est ainsi qu’existent, de nos jours, des mouvements dans la vie
religieuse qui veulent s’approprier du monopole du Christ, de l’Esprit saint.
Et saint Paul parle au nom de l’Esprit saint pour leur donner la solution à ce
problème entre progressistes et conservateurs. Cette solution fait partie de ma
troisième réflexion et affronte ces deux conflits : conflit entre violence
et pardon, et conflit entre progressistes et conservateurs. Pour donner un
simple nom à cela, la solution, la clé du problème nous dit la Parole
d’aujourd’hui se trouve dans le pardon et dans les raisons de ce pardon.
Quelles sont ces raisons? Recueillons-les comme fruit de notre réflexion.
La première lecture (Si 27,23-28,9)
nous présente la dépendance que nous avons envers Dieu. Toi qui dépends de lui
pour ta santé, comment demanderas-tu à Dieu pour ta santé si tu ne pardonnes
pas à ton frère? C’est logique, parce que Dieu nous dit d’aimer notre prochain
et si nous ne l’aimons pas, comment osons-nous demander à Dieu que nous avons
offensé par notre rancœur? Une autre raison : Nous avons tous besoin de la
compréhension miséricordieuse de Dieu. Comment allons-nous l’obtenir, nous
dit-il, si nous ne l’avons pas nous-mêmes envers les autres, alors que nous
refusons de pardonner, lorsque par vengeance l’on frappe et l’on tue? Une autre
raison encore qui concerne la fragilité de notre vie - tu es chair, cela veut dire
que ce sont là des choses transitoires et ainsi tu verras ta fragilité et celle
de l’autre. Tu penses te fabriquer un absolu de l’offense que l’autre t’a fait
subir, ainsi que de la satisfaction de ta vengeance? Si tu es un ĂŞtre fragile,
la logique est de traiter ta brève existence avec l’amour que Dieu veut que tu
vives afin d’apprendre à savoir pardonner. Une autre raison très valable de la
première lecture : Pense à ta fin, à la mort, à la putréfaction. Lorsqu’un
homme, aussi agressif et violent qu’il soit, meurt, qu’est-ce qu’un cadavre
enfermé entre quatre planches? Toute la puissance d’un homme qui conquit des
royaumes ou qui tua des gens se trouve réduite à néant, il n’est plus rien,
plus que cendre et poussière. Pense à cela, dit la Bible, et tu domineras ta
rancœur.
La première lecture nous demande
Ă©galement de nous souvenir des commandements. Rappelons-nous que nous avons
aussi une obligation envers Dieu et parmi les principaux préceptes qui la
résume, se retrouve celle de l’amour : « Tu aimeras ton Dieu
par-dessus tout et ton prochain comme toi-même. » Et la haine est la
destruction de ce commandement. Il existe une autre raison qui passe presque
inaperçue, mais qui possède une grande valeur. Souvenez-vous de l’Alliance,
qu’est-ce que c’est? C’est le pacte que Dieu fit avec le peuple. Je serai votre
Dieu et vous serez mon peuple. Cela amène comme conséquence que tous ceux qui
forment le peuple doivent s’aimer. Ne vous détruisez pas dans la haine, dans la violence. Souvenons-nous
de ce pacte que nous allons commémorer d’ici peu par la consécration du calice
consacré par mes mains. C’est le sang de l’Alliance, du pacte, entre Dieu et
les hommes. Vous ĂŞtes le peuple de Dieu qui vient offrir Ă Dieu de renouveler
son alliance de foi, en promettant aussi que nous allons nous aimer, que nous
allons nous pardonner. Et la grande leçon que nous donne l’Évangile, dans la
Parabole du Seigneur qui pardonne une grande dette Ă un de ses serviteurs et
celui-ci ne sut pas pardonner une dette plus petite Ă un de ses amis. Devant
Dieu nous avons tous une dette qu’il nous est impossible d’acquitter. Qui a
offensé Dieu ne mérite rien de moins que le châtiment éternel! Et si Dieu me
pardonne cette dette Ă©ternelle, pourquoi moi ne pardonnerai-je pas Ă celui qui
n’a pas commis une offense éternelle, aussi grave soit-elle?
Le Notre Père est une réclamation
continuelle de cette grande pensée : « Pardonne-nous nos offenses
comme nous pardonnons aussi à tous ceux qui nous ont offensés. » Combien
de fois, si nous sommes sincères, ne pouvons-nous pas réciter le Notre Père
parce que nous ne savons pas pardonner? 17/09/78, p.196-197, V.
3) La clé de la solution : la
transcendance de l’amour
Pour finir, la raison que nous donne
saint Paul (Rm 14, 8-9) qui est comme la synthèse de toute cette
réflexion : « Si nous vivons, nous vivons pour le Seigneur, et si
nous mourons, nous mourons pour le Seigneur. Dans la vie et dans la mort, nous
sommes du Seigneur. Car le Christ est mort et revenu Ă la vie pour ĂŞtre le
Seigneur des morts et des vivants. » Saint Paul nous rappelle ici que ceux
qui cessent de manger de la viande en certains jours par respect de leur
ancienne religion – dont demeure encore le souvenir de la coutume – le font
pour Dieu et nous les respectons, tandis que le fort qui a déjà surmonté cela
croit qu’il se sauve en vérité dans le Christ. Il le fait pour le Christ et
pour le Christ Ă©galement il mange de la viande. Alors
dit-il : « Ne nous déprécions pas les uns les autres, les deux le
font pour le Seigneur. » Ainsi, également, deux groupes qui luttent pour
un conflit, les uns défendent une chose et les autres une autre. Le mal est
d’oublier cet autre, lorsqu’on lutte seulement par égoïsme, pour défendre ses
propres intérêts, pour son caprice. La raison ne peut pas toujours prévaloir,
mais si les deux parties en conflit le font pour Dieu – ici vient une grande
leçon, mes frères – les différences qui existent dans notre Église pourraient
bien se régler par ce principe : Toi qui es dans un mouvement
charismatique, toi qui appartiens au mouvement des cursillos de chrétienté, toi dans ton mouvement néo-catéchuménat,
toi avec tes idées traditionalistes, toi avec tes pensées progressistes, pour
qui le fais-tu? Défends-tu cela pour tes propres commodités? Alors, cela va
mal, cela ne peut en ĂŞtre la raison? Tu fais cela pour servir ton Dieu avec
sincérité? Fais ce que tu as à faire en essayant de comprendre les autres qui
le font aussi pour Dieu. C’est cela le véritable pluralisme dans l’Église. Nous
ne pouvons pas tous penser de la même façon, mais tout ce que nous faisons nous
devons le faire pour Dieu, pour le Christ, puisque pour Lui nous vivons et nous
mourons. Lui qui vécut et mourut et qui continue d’être pour nous tous.
En Jésus-Christ se réalise la paix
des hommes. Puissions-nous résoudre tant de sang, tant de haine, tant de
violence, tant de différences, tant de divisions parmi les hommes en gardant le
regard tourné vers celui qui sur la Croix, crucifia les différences, les haines
et les violences de tous les êtres humains. Il permit qu’en son corps se
déchargent, comme des éclairs, toutes les colères et toutes les violences des
hommes pour qu’en le regardant Lui, les humains sachent user de leur
agressivité en la traduisant en bonté, en pardon, en louanges à Dieu Notre Seigneur.
17/09/78, p.197, V.