Le Divin Sauveur, Solution de tous nos problèmes

 

Dix-septième dimanche du temps ordinaire; 29 juillet 1979; Lectures : II Rois 4,42-44; ÉphĂ©siens 4,1-6; Jean 6,1-15.

 

Introduction : CoĂŻncidence de ces quatre dimanches du chapitre 6 de saint Jean avec la fĂŞte du Divin Sauveur.

L’année liturgique nous offre un cadre incomparable pour préparer la fête de notre céleste patron, le Divin Sauveur du Monde. C’est pour cela que l’Évangile de saint Marc, qui est celui de cette année, cède la place pour quatre dimanches à l’Évangile de saint Jean, précisément ce chapitre 6 que vous pourrez lire à la maison pour tirer un meilleur profit de nos réflexions. Il s’agit du discours eucharistique de Capharnaüm où le Divin Sauveur se présente, intégralement, comme la lumière pour nos problèmes, comme la solution efficace de tous les problèmes de l’Histoire et tout autant de notre patrie.

 

 

Évangile de saint Jean : EcclĂ©siologie

 

L’Évangile de saint Jean possède des caractéristiques si originales qu’il s’agit vraiment là d’un véritable cadeau de Dieu pour le peuple qui a la chance de l’avoir entre les mains. Nous pouvons dire que tout l’Évangile de saint Jean constitue un traité d’ecclésiologie. L’Église y est présentée comme une prolongation de la personnalité du Christ, de telles sortes que nous ne pouvons comprendre l’Évangile de saint Jean comme une simple biographie du Christ. Il doit être entendu à partir de la communauté, de n’importe quelle communauté chrétienne. C’est pourquoi notre archidiocèse avec toutes ses communautés paroissiales et ses communautés ecclésiales de base y rencontre un thème très fécond en apprenant à reconnaître le visage du Christ à partir de la communauté, de l’Église.

 

 

Sacramentel

 

Une autre caractéristique est qu’il s’agit de l’Évangile le plus sacramentel, de l’Évangile des signes, de telles sortes que le Christ y apparaît comme le point culminant de l’Ancien Testament, mais en même temps le signe maximum de toute la force rédemptrice qui avec Lui est venu en ce monde. Les sacrements de notre Église rencontrent dans l’Évangile de Jean leur raison d’être.

 

 

Eschatologie présente

 

Finalement, l’Évangile de Jean est le plus original dans sa prĂ©sentation de ce que nous appelons l’eschatologie prĂ©sente. Nous avons fait souvent mention de ce mot : « eschatologie Â», l’ultime, le dĂ©finitif, la fin de l’histoire, le règne dĂ©finitif du Christ c’est ce Ă  quoi fait rĂ©fĂ©rence « l’eschatologie Â». Mais elle ne nous est pas prĂ©sentĂ©e comme une espĂ©rance au-delĂ  de la mort, comme une Ă©ternitĂ© que nous sommes en train d’attendre. L’Évangile de Jean nous prĂ©sente la manière dont ce Règne dĂ©finitif est dĂ©jĂ  prĂ©sent dans l’Histoire. Nous l’édifions par notre propre conduite et aussi par nos refus (de collaborer Ă  ce qui s’y oppose). C’est dès maintenant que s’élabore le sort dĂ©finitif des humains dans cette eschatologie que le Christ, par sa PrĂ©sence divine et par son Église, a dĂ©jĂ  semĂ© en germe dans l’Histoire. C’est pourquoi tout ce que nous dit la lecture de son Évangile (Jn 6,1-15) autour de la figure du Divin Sauveur du Monde s’adresse Ă  notre communautĂ© ecclĂ©siale de l’archidiocèse qui possède les germes d’une solution et que nous devons garder espoir. Ce qui manque c’est que nous sachions capter ce signe pour l’incarner dans notre patrie Ă  travers nos vies de Salvadoriens et de chrĂ©tiens.

 

 

Plan de l’homĂ©lie :

1) La multiplication des pains, un signe du Règne messianique

2) Le Règne messianique, signifié dans la multiplication des pains

3) La concélébration des hommes dans la construction du Règne

 

 

1) La multiplication des pains, un signe du Règne messianique

 

 

A) Un problème sans solution humaine.

 

La première idée est la multiplication des pains, un signe du Règne messianique. Quel est le signe? Un problème insoluble, une multitude affamée. Comme les solutions humaines semblent rachitiques!

 

 

Les suggestions humaines

 

Philippe, calculs Ă©conomiques (Jn 6,7) : « Deux cents deniers de pain ne suffisent pas pour que chacun en reçoive un petit morceau. Â» Ou la solution d’AndrĂ©, conscient de la limitation (6,9) : « Il y a ici un enfant qui a cinq pains d’orge et deux poissons; mais qu’est-ce que cela pour tant de monde? Â»

 

 

La rĂ©ponse du Christ : la multiplication des pains… signe de son pouvoir et de la proximitĂ© de son Salut.

 

La rĂ©ponse du Christ : par-delĂ  les calculs des techniciens, le miracle, Il prend le pain dans ses mains, le bĂ©nit et commence Ă  le rĂ©partir. Mais auparavant, Il a demandĂ© une collaboration. Il y a ici un garçon qui a cinq pains et deux poissons. Mais qu’est-ce que c’est pour tant de gens? « Apportez-le Â», dit le Christ. Et celui qui dut se dĂ©faire de ce qui devait ĂŞtre ses vivres, son nĂ©cessaire n’hĂ©sita pas Ă  le donner. Et c’est de lĂ  que provient la multiplication qui les rassasie tous et dont on recueillit douze paniers de surplus.

 

 

B) Notre problématique

 

 

Histoire de la semaine

 

Je voudrais transposer ici le problème de la réalité de notre patrie.

Selon une dĂ©pĂŞche de l’Agence de Presse Internationale d’hier : « L’opinion gĂ©nĂ©rale, concernant le Salvador, est que les troubles politiques ont augmentĂ© et se sont rĂ©percutĂ©s d’une façon alarmante par la faim et la misère des secteurs marginaux qui ne possèdent ni un revenu quotidien ni les mĂ©dicaments nĂ©cessaires pour soigner leurs enfants. Ces secteurs reçoivent de sĂ©rieuses humiliations qui contribuent Ă  aggraver davantage leurs conditions d’êtres humains. Â» Cela signifie que la multiplication des pains, qui fut prĂ©cisĂ©ment provoquĂ©e par une multitude affamĂ©e, est aussi le miracle que le Salvador demande. Multitude affamĂ©e! C’est ce que nous avons littĂ©ralement au Salvador. 29/07/79, p.119-120, VII.

 

 

2) Le Règne messianique, signifié dans la multiplication des pains

 

 

A) Deux interprĂ©tations : temporelles et transcendante.

 

C’est là ma seconde réflexion. Il y a deux interprétations possibles au fait que le Christ sauve la situation avec la collaboration humaine en résolvant un problème de faim.

 

Premièrement, l’interprĂ©tation temporelle et politique. Ceux qui suivent le Christ avec une foi imparfaite : « C’est le grand prophète qui peut nous donner Ă  manger Â»; et ils voulurent le faire roi parce qu’ils recherchaient des solutions immĂ©diates Ă  leurs problèmes, « Il nous donnera toujours Ă  manger lorsque nous aurons faim. Â» Un peuple qui se contente des libĂ©rations terrestres.

InterprĂ©tation thĂ©ologique selon saint Jean : transcendance

 

L’autre interprétation est celle que nous allons apprendre aujourd’hui, l’interprétation théologique que nous donne saint Jean dans son Évangile.

 

 

Aspects ecclésiologiques

 

 

Le Christ et l’Église ne sont qu’une seule vie.

 

 

La Montagne : MoĂŻse… l’Alliance

 

Dans le récit de la multiplication des pains, il y a des intentions évidentes, chez saint Jean, de faire allusion à l’Église unie au Christ dans la résolution des problèmes, par exemple la montagne est une allusion au Sinaï et à Moïse. Ce Moïse qui sauva le peuple est le Christ aujourd’hui; et cette montagne où fut promulguée la loi de Dieu est l’Évangile que le Christ prêche, c’est l’Église, montagne où le Christ continue d’enseigner, où Moïse continue de conduire le peuple, où le Divin Sauveur continue d’être l’espérance des Salvadoriens.

 

 

Pâques : la fĂŞte de la libĂ©ration, mission de l’Église

 

Un autre signe que saint Jean mentionne avec une intention ecclĂ©siologique marquĂ©e : Pâques. Il s’approche de la pâque juive et cette relation existentielle nous amène aussi Ă  reconnaĂ®tre que pour Jean, les fĂŞtes d’IsraĂ«l Ă©taient comme l’expression du peuple, ses aspirations qui se transposaient au peuple chrĂ©tien. Les Pâques chrĂ©tiennes que le Christ transforma de juives Ă  eucharistiques, c’est prĂ©cisĂ©ment l’Église. Ce matin, pourquoi sommes-nous ici dans cette cathĂ©drale? PrĂ©cisĂ©ment pour cĂ©lĂ©brer Pâques. Chaque dimanche c’est Pâques, la rĂ©surrection du Seigneur. Jean, en faisant allusion Ă  la multiplication des pains en rapport avec Pâques, nous invite Ă  vivre notre sens eschatologique : Ă  ĂŞtre Église et Ă  partir de cette Église oĂą le Christ vit, ĂŞtre aussi une solution Ă  nos problèmes.

 

 

Douze Paniers : douze apĂ´tres-prĂŞtres

 

Un autre signe précieux de l’Évangile d’aujourd’hui lorsque se termine la multiplication des pains, le Christ envoie les douze ramasser les restes et ils recueillirent douze paniers. C’est un symbole. Symbole de l’Église hiérarchique qui collabore avec le Christ dans l’enseignement, dans la répartition du pain, dans le recueillement et dans l’administration des sacrements. L’Église sacerdotale, l’Église qui réunit le peuple dans toutes les églises et les chapelles. Quel beau geste que celui de la multiplication des pains qui se répète dans les églises où d’ici peu nous allons voir l’évêque et ses collaborateurs répartir le pain et recueillir les restes pour qu’ils ne se perdent pas! Nous les conservons dans le tabernacle dans un sens d’économie pour qu’il continue d’avoir du pain. Il ne manquera pas de pain tant qu’il y aura un Christ et une Église qui sauront s’incarner dans les hommes de leur temps, même s’il s’agit des temps les plus critiques.

 

 

Aspects sacramentaux

 

C’est un récit eucharistique. Nous retrouvons dans le signe théologique décrit par Jean des signes sacramentaux. L’on croit, disent les interprètes de ce sixième chapitre, que Jean est le seul qui nous raconte la dernière cène. Jean ne nous raconte pas dans son évangile ce que les autres évangélistes rapportent de la dernière cène, il ne fait pas allusion à la dimension eucharistique. Il nous raconte le merveilleux discours d’adieu, mais il ne nous parle pas du moment où le Christ prit le pain et le convertit en son Corps, il n’en fait pas mention à cet endroit parce que Jean écrit après les synoptiques et il vit que cela n’était plus nécessaire de le répéter.

Mais il apparaĂ®t nĂ©cessaire de s’étendre sur cette idĂ©e en ce chapitre six qui est prĂ©cisĂ©ment son rĂ©cit eucharistique. C’est pourquoi tout le rĂ©cit de la multiplication des pains possède un beau sens eucharistique : c’est Pâques qui se fait chrĂ©tien. L’agneau qu’on immole par ordre de MoĂŻse ne sera plus un animal, ce sera Lui, L’Agneau de Dieu qui demeurera clouĂ© sur la croix et dont la chair et le sang seront l’aliment du peuple rachetĂ©. 29/07/79, p.124-126, VII.

 

Mais face Ă  cette interprĂ©tation si transcendante qu’est-ce qu’on nous dit : le Christ sera la solution Ă  la faim au Salvador, le Christ rĂ©soudra les injustices au Salvador, Il fera briller ce soleil que le paysan de Sonsonate veut voir briller, celui de la justice et de la vĂ©ritĂ©. Le jour oĂą nous interprĂ©terons son message ainsi, non plus seulement comme une libĂ©ration terrestre, mais transcendante, notre foi en JĂ©sus-Christ ne sera pas celle des fidèles imparfaits, qui Le suivaient parce qu’Il leur donnait Ă  manger, parce qu’Il leur offrait des solutions immĂ©diates.

 

Nous continuerons au cours de ces trois dimanches à apprendre la mentalité du Christ. Mais qu’il soit bien clair pour nous maintenant que ce que le Christ veut nous montrer en nous donnant à manger, en étant avec nous, c’est de nous préoccuper de notre prochain. Comment est-ce possible que le Christ ne pleure pas avec la mère qui pleure la disparition de son fils? Comment serait-ce possible que le Christ ne souffre pas avec le pauvre qui est mort torturé? Comment serait-ce possible que le Christ ne porte pas de reproche aux crimes de la Garde nationale et d’ORDEN qui amènent en prison sous une forme humiliante un fils et qui laisse sa famille désemparée? Il est clair que cela ne demeurera pas impuni! C’est pourquoi précisément le Christ invoque la justice éternelle. Non sur cette Terre, où malgré le fait que nous écrivions au président de la Cour suprême de justice, cela ne changera rien. Ce dernier n’est pas le Christ, mais il existe au-dessus de lui un Christ qui demandera des comptes à lui et à tous ceux qui ont été complices de cette situation injuste que nous vivons en ce pays. C’est pour cela que le Christ invoque une situation au-delà de l’Histoire, et je voudrais, très chers frères qui souffrez, foyers désemparés, emprisonnés, torturés, prisonniers, que vous ne désespériez pas. Le Christ est avec nous. Le Divin Sauveur du Monde est ici comme Il se trouvait au milieu de la multitude qui avait faim. Il connaît la solution et Il nous la donnera. Endurons encore un peu, la solution viendra, le Christ peut nous la donner.

 

 

Deux réductionnismes dangereux parce qu’ils sont faux

 

C’est ce que je voudrais ajouter face à ce message transcendant et immanent. Transcendant cela signifie qui va au-delà de la réalité présente. Immanent veut dire qui est présent dans la réalité présente. C’est le Christ ici et maintenant, mais également présent dans l’éternité. Il est dangereux alors, de perdre cet équilibre d’immanence et de transcendance. C’est pourquoi la fausse interprétation du miracle d’aujourd’hui, la multiplication des pains, et de ceux qui interprètent mal l’Évangile, c’est celle qui s’appelle réductionnisme historique. Comme est tout aussi mauvais un réductionnisme spirituel.

 

 

RĂ©ductionnisme spirituel

 

Je vais vous expliquer un peu, parce que cela m’apparaĂ®t très important. Ici l’on publie des extraits des paroles du Pape comme si ce qu’il voulait c’était un rĂ©ductionnisme spirituel et je dĂ©fends le Pape vis-Ă -vis de ces publications malsaines. Le Pape ne demande pas Ă  nos prĂŞtres un rĂ©ductionnisme spirituel et la preuve en est que le Pape Paul VI en parlant de l’évangĂ©lisation actuelle, dit cette phrase que grâce Ă  Dieu ils publièrent Ă©galement dans cet espace payĂ© : « En prĂŞchant la libĂ©ration et en l’associant Ă  ceux qui agissent et souffrent en son nom, l’Église prĂŞche la libĂ©ration, elle accompagne et souffre Ă©galement avec ceux qui travaillent pour la libĂ©ration. Â»

 

Dans ma prochaine lettre pastorale (aoĂ»t 1979), je dis cette phrase : « MĂŞme si les organisations politiques populaires abandonnent l’Église et la critiquent, l’Église continuera d’appuyer ce qui est juste dans toutes ces organisations. Â» L’Église accompagne… parce que je suis bien convaincu comme l’était Paul VI et comme l’est maintenant Jean-Paul II, qu’en prĂŞchant la libĂ©ration et en accompagnant les efforts libĂ©rateurs, l’Église se refuse Ă  limiter son action au seul champ religieux, en se dĂ©sintĂ©ressant des problèmes temporels de l’être humain. Que cela demeure bien clair! L’Église ne peut pas ne pas se comprendre elle-mĂŞme. Et j’aimerais que par honnĂŞtetĂ© ceux qui ont publiĂ© partiellement le discours du Pape aux prĂŞtres du Mexique, qu’ils publient ce texte dans son intĂ©gritĂ©!

 

 

Le RĂ©ductionnisme temporel

 

Le Pape Ă  Mexico a dit aux prĂŞtres : « Faites attention aux rĂ©ductionnismes temporels. Â» C’est certain et si vous dĂ©sirez avoir d’autres textes pour publier, je vous offre ma propre lettre pastorale oĂą je suis d’accord avec ce point de vue lorsque je dis aux prĂŞtres : « Attention aux rĂ©ductionnismes temporels. Â»

 

Je vous l’ai dit : le service inestimable du prĂŞtre, le premier objectif de sa vocation, c’est d’être animateur et orienteur dans la foi et dans la justice de ce que la foi exige selon les grands principes chrĂ©tiens que nous vous rappelons ici. Je ne dĂ©sire pas m’étendre davantage sur ce point, mais je vous signale qu’aux numĂ©ros 101 et 102 de ma lettre pastorale il y a quelques phrases qui mĂ©riteraient d’être publiĂ©es, mais cela ne serait pas Ă  mon honneur parce qu’on risquerait d’y mutiler ma pensĂ©e comme on a mutilĂ© celle de Jean-Paul II. En effet, on l’a beaucoup mutilĂ©e parce qu’on veut le prĂ©senter comme quelqu’un qui oriente les prĂŞtres vers une spiritualitĂ© qui ne touche pas Ă  la Terre. Il est clair que cela intĂ©resse ceux qui veulent se l’approprier, que l’Évangile ne touche pas aux choses de la Terre.

 

La preuve en est que le Pape Jean-Paul II lui-mĂŞme a dit aux Ă©vĂŞques Ă  Puebla, cette phrase qui est comme le commandement du Pape envers l’épiscopat latino-amĂ©ricain : « Qui pourrait nier, en effet, qu’aujourd’hui il existe des personnes individuelles et des pouvoirs civils qui violent impunĂ©ment les droits fondamentaux de la personne humaine, comme le droit Ă  naĂ®tre, le droit Ă  la vie, le droit Ă  la procrĂ©ation responsable, au travail, Ă  la paix, Ă  la libertĂ© et Ă  la justice sociale : le droit Ă  prendre part aux dĂ©cisions qui concernent le peuple et la nation? Et quoi dire lorsque nous nous retrouvons devant des formes variĂ©es de violence collective comme la discrimination raciale envers des individus et des groupes, la torture physique et psychologique des prisonniers et des dissidents politiques? La liste s’allonge lorsque nous observons les exemples des personnes sĂ©questrĂ©es, les kidnappings motivĂ©s par l’aviditĂ© matĂ©rielle qui assaillent de manière aussi dramatique la famille et le tissu social. Nous Ă©levons Ă  nouveau la voix : respectez l’être humain, il est fait Ă  l’image de Dieu! Â»

 

Écoutez cette parole : « Ă‰vangĂ©lisez pour que cela devienne une rĂ©alitĂ©, pour que le Seigneur transforme les cĹ“urs et humanise les systèmes politiques et Ă©conomiques en partant de l’engagement responsable de l’homme. Il nous faut encourager les engagements pastoraux en ce sens, avec une juste conception chrĂ©tienne de la libĂ©ration. Il faut prĂŞcher, dit le Pape, que si le droit de propriĂ©tĂ© est vĂ©ritable, il ne faut jamais oublier que sur la propriĂ©tĂ© pèse une hypothèque sociale. Â» Ce sont lĂ  les mots du Pape et ils ne peuvent ĂŞtre dĂ©mentis en nous prĂ©sentant un Pape rĂ©ductionniste spirituel.

 

Voyez comment je vous dis Ă  nouveau : il faut apprendre Ă  lire avec des critères critiques, surtout dans une ambiance oĂą l’on manipule les discours les plus saints. L’équilibre est ce que nous recommande la pastorale de notre temps. Paul VI dit que l’évangĂ©lisation, qui est une tâche naturelle de l’Église, ne peut ĂŞtre sĂ©parĂ©e de la promotion humaine pour des raisons anthropologiques, c’est-Ă -dire, parce que les injustices que l’Église dĂ©nonce ne sont pas abstraites, elles sont concrètes, elles concernent des hommes concrets. C’est parce qu’évangĂ©liquement aussi, la charitĂ© du Christ nous oblige Ă  aimer notre prochain comme nous nous aimons nous-mĂŞmes et qu’elle ne serait pas un vĂ©ritable amour si elle se contentait de prĂŞcher des thĂ©ories spirituelles et qu’elle ne travaillerait pas pour la promotion de la personne humaine. 29/07/79, p.126-128, VII.

 

 

3) La concélébration des hommes dans la construction du Règne

 

Le Christ possède la solution des problèmes, seul Lui, ne l’oublions pas. Je cite Ă  nouveau Jean-Paul II parce que j’ai la prĂ©occupation de transposer sa pensĂ©e ici et que je ne veux jamais le trahir. Je veux me faire son Ă©cho, sa voix et je me rappelle toujours avec joie et avec reconnaissance le moment oĂą il venait Ă  peine de recevoir la mitre, qui n’est plus une couronne, parce que dans son humilitĂ© le Souverain Pontife a voulu Ă©galement manifester son option prĂ©fĂ©rentielle pour les pauvres. Avec sa simple mitre, comme n’importe quel autre Ă©vĂŞque du monde, le Pape disait ce que disent tous les Ă©vĂŞques : Ouvrez le chemin au Christ, hommes de la politique, hommes d’affaires, hommes des finances. Ouvrez le chemin au Christ. Lui seul possède les paroles de vie Ă©ternelle.

 

 

Philippe… André… l’enfant et le pain

 

Le Christ ne désire pas seulement accomplir la multiplication des pains. Il commença par dialoguer avec Philippe, en demandant l’avis d’André, il recueillit les pains de l’enfant pauvre.

 

 

L’homme des prémices

 

Nous recueillons ici également le merveilleux exemple de la première lecture, où un paysan apporte dans sa besace les pains des prémices pour les offrir à Élisée (II R 4,42-44). Dieu veut la participation des êtres humains. La participation des hommes sans laquelle les problèmes de la patrie continueront d’être les mêmes. C’est pourquoi ils devraient croire ceux qui sont au pouvoir ou qui possèdent le pouvoir économique parce qu’ils ne sont pas des dieux et combien davantage ils se divinisent et se fabriquent des idoles de terre, comme ils semblent répugnants aux yeux de Dieu tandis que s’ils étaient plus humbles et s’ils s’unissaient à Dieu, ils résoudraient les problèmes du pays.

 

C’est pourquoi nous faisons appel Ă  la conversion. Ce langage de la CathĂ©drale n’est pas de haine, il est d’amour. La mère Église parle comme les mères parlent Ă©galement lorsqu’elles se fâchent, comme les mères qui corrigent et qui aiment, mais qui ne veulent pas que leurs fils soient mauvais, parce qu’elles les veulent frères. Et c’est pour cela que l’Église qui est mère leur dit aux riches et aux puissants : « Convertissez-vous, mes fils, convertissez-vous! Â» Le Christ seul possède la solution. Unissez-vous au Christ et vous rencontrerez le Christ en vous occupant en prioritĂ© des pauvres. Ne faites pas des lois qui dĂ©fendent seulement votre minoritĂ©. Faites des lois qui dĂ©fendent les pauvres. Admettez dans le dialogue non seulement des gens qui pensent comme vous, admettez Ă©galement le paysan qui se meurt de faim et qui pour cela s’organise, non pour ĂŞtre subversif, mais pour survivre.

 

En un mot, mes frères, le prĂ©cieux message de l’Évangile d’aujourd’hui – et aujourd’hui nous n’avons commentĂ© que l’Évangile – nous dit ceci en rĂ©sumĂ© : la multiplication des pains, le signe d’un problème que le Christ seul put rĂ©soudre, mais avec la collaboration des humains. Il nous faut regarder la mentalitĂ© du Christ pour ne pas nous perdre dans une politique simplement terrestre, sinon pour admettre dans nos efforts de revendications, les perspectives de la libĂ©ration universelle de JĂ©sus-Christ. C’est uniquement ainsi que nous pourrons cĂ©lĂ©brer le Divin Sauveur! Une libĂ©ration qu’Il nous apporte non pas pour ĂŞtre couronnĂ© roi de la Terre. Les solutions simplement terrestres, Il les fuit. Le Seigneur les assume, mais en les incorporant Ă  la grande libĂ©ration, Ă  la transcendance de ce qui demeure, Ă  celle qui nous rend profondĂ©ment et vĂ©ritablement heureux. Je vous invite Ă  prĂ©parer ainsi votre esprit pour les cĂ©lĂ©brations prochaines des fĂŞtes du Divin Sauveur. Amen. 29/07/79, p.128-129, VII.