Jésus, Maître de la Véritable Religion

 

Vingt-deuxième dimanche du temps ordinaire, 2 septembre 1979; Lectures : DeutĂ©ronome 4,1-2) 5-8; Jacques 1,17-18,21b-22.27; Marc 7,1-8a, 21-23.

 

J’ai l’impression ce matin de former avec vous cette Église en pèlerinage. Ă€ l’extĂ©rieur, il y a un ciel gris et une pluie fine, c’est un jour gris, une journĂ©e triste. Nous n’avons pas la cathĂ©drale pour cĂ©lĂ©brer notre eucharistie. La messe que nous devrions cĂ©lĂ©brer Ă  l’église du Rosaire ne peut l’être Ă  cet endroit parce qu’elle se trouve occupĂ©e Ă©galement. Nous venons donc demander l’hospitalitĂ© Ă  la Basilique du SacrĂ©-CĹ“ur envers qui nous sommes très reconnaissants. Nous paraissons semblables Ă  ce peuple qui marche avec MoĂŻse Ă  travers le dĂ©sert en levant sa tente pour aller la planter ailleurs. Nous avons toujours le signe de quelque chose qu’on cherche, d’une quĂŞte, d’un pèlerinage, de quelque chose qui n’est pas Ă©tabli : l’Église en pèlerinage, celle qui ne peut s’installer sur la Terre, celle qui ne s’identifie avec aucune idĂ©ologie, ni avec les choses de la Terre. Elle demeurera toujours cette colonne de lumière au dĂ©sert qui conduit l’humanitĂ© vers la fĂ©licitĂ© dĂ©finitive qui n’existe pas en ce monde. […]

 

Mais notre Ă©poque n’est pas normale, c’est une Ă©poque d’urgence. Ainsi comme si par malheur, nous Ă©tions secouĂ©s par un tremblement de terre, les Ă©glises ouvriraient leurs portes pour accueillir les blessĂ©s et les sans-abri sans que personne ne disent : « C’est une profanation Â». Aujourd’hui Ă©galement, c’est un temps d’urgence et il faut comprendre qu’en ces temps il n’est pas facile de condamner des actes qui en des temps plus normaux auraient Ă©tĂ© condamnĂ©s.

 

Lorsque le Christ voulut enlever aux juifs cette mentalitĂ© d’un temple matĂ©riel pour la remplacer par la vĂ©ritable adoration Ă  Dieu, Il dit : « DĂ©truisez ce temple et Je le relèverai en trois jours. Â» Les juifs entendirent lĂ  qu’il s’agissait du temple matĂ©riel, mais Lui transfĂ©rait tout l’esprit du temple Ă  Lui-mĂŞme. C’est Lui qui devait ressusciter le troisième jour, Il est le Temple vĂ©ritable des chrĂ©tiens, Ă  travers Lui, nous offrons Ă  Dieu notre Action de grâce, notre adoration. Sans le Christ, tous les temples, aussi beaux soient-ils, ne servent Ă  rien. « Il est rĂ©volu le temps, dit le Christ Ă  la Samaritaine, oĂą l’on devait adorer Ă  JĂ©rusalem ou sur cette montagne de Samarie ou dans les temples matĂ©riels. Le temps est venu d’adorer Dieu en esprit et en vĂ©ritĂ©. Â»

 

Un de nos chanteurs populaires chantant Ă  la mort du père Raphael Palacio, dit cette phrase prĂ©cieuse : « Dieu n’est pas dans le temple, mais dans la communautĂ©. Â» Vous ĂŞtes le temple! Ă€ quoi sert d’avoir des Ă©glises si belles dont le Christ pourrait dire comme Il dit aux pharisiens aujourd’hui (Mc 7,7) : « Vain est le culte qu’ils me rendent! Â» C’est le rĂ©sultat de nombreux cultes luxueux, de beaucoup de fleurs, de nombreuses choses, d’invitĂ©s prestigieux et davantage encore. Mais oĂą se trouve donc cette adoration en esprit et en vĂ©ritĂ©? Je crois qu’il s’agit pour nous d’une leçon, je suis le premier Ă  la recevoir et Ă  tenter de l’interprĂ©ter. Peut-ĂŞtre n’ai-je pas su bien m’acquitter de mon devoir de prĂŞtre du culte de Dieu. Peut-ĂŞtre, qu’avec mes frères prĂŞtres, nous n’avons fait consister le culte qu’en de beaux arrangements de l’autel, qu’en chargeant des tarifs Ă©levĂ©s pour pouvoir encore mieux le dĂ©corer. Nous l’avons commercialisĂ©! C’est pourquoi, Dieu, comme lorsque le Christ entra dans le temple de JĂ©rusalem avec son fouet, nous dit (Mc 11,17) : « N’est-il pas Ă©crit “Ma maison sera appelĂ©e une maison de prière pour toutes les nations”? Mais vous, vous en avez fait un repaire de brigands! Â» Nous devons tous y rĂ©flĂ©chir, nous sommes tous coupables. La base nous offre la Parole divine d’aujourd’hui. […]

 

 

Plan de l’homĂ©lie :

1) Le culte vide

2) La religion agréable à Dieu

3) L’honneur du Peuple de Dieu

 

 

1) Le culte vide

 

L’Épisode des purifications que nous présente saint Marc (7,1-8a, 21b-22,27) en traduisant de la mentalité orientale à l’occidentale, à Rome, où était écrit cet Évangile sous la prédication de saint Pierre. Saint Marc était comme le secrétaire de Pierre et il écrivait ce que Pierre prêchait et expliquait aux Romains ce qu’ils ne pouvaient pas comprendre parce qu’il s’agissait de coutumes juives. Une de ces coutumes était celle de se laver à fond les mains, les assiettes et les coupes parce qu’ils se sentaient contaminés. Le sens de l’impureté n’est pas comme nous l’entendons aujourd’hui, c’était quelque chose de matériel. Combien de lois y avait-il concernant les choses contaminées? Toucher à un cadavre, par exemple, c’était se souiller. Vous vous souvenez de ce comble de l’hypocrisie lorsque ceux qui accusaient Jésus refusèrent d’entrer chez Pilate parce que Pilate était un païen. Et malheur à un juif s’il faisait des affaires avec un gentil! Mais par contre, ils ne ressentirent aucun remords à demander la peine de mort pour cet innocent qu’était Jésus. C’est ainsi qu’ils convertirent ces lois en hypocrisie, en apparence, en légalisme, en trahison de la loi véritable du Seigneur.

 

 

D’autres actes

 

L’Évangile nous raconte, Ă  la suite de cet Ă©pisode concernant le lavage des mains, que le Christ leur mit aussi sous le nez cette coutume qui consistait Ă  faire une offrande au temple pour se libĂ©rer de ses obligations envers son père et sa mère : « Je ne peux pas t’aider parce que j’ai dĂ©jĂ  donnĂ© au temple. Â»

 

« Hypocrites, dit le Christ, de cette manière vous trahissez le quatrième commandement, qui dit d’honorer son père et sa mère. Â» Dieu ne vous a pas demandĂ© d’offrir des offrandes au temple sinon d’honorer votre père et votre mère. De quel droit substituez-vous le devoir d’un fils envers son père par un faux sens religieux? Ainsi, si nous analysons maintenant combien de raisons avait le Christ de se fâcher et de qualifier d’hypocrite une religion qui s’enrichissait Ă  partir de ces rites lĂ©galistes, d’impuretĂ©s hypocrites. C’est la fausse religion.

 

Notre Seigneur dit (Mc 7,6b) : « Ce peuple m’honore des lèvres; mais son cĹ“ur est loin de moi. Â» Culte vide! Premièrement : vide d’intĂ©rioritĂ©, deuxièmement : vide de rĂ©vĂ©lation et de vĂ©ritĂ© de Dieu; et troisièmement : vide d’œuvre. Ce sont les trois vides qui sont condamnĂ©s aujourd’hui dans cette fausse religion. Prenons garde si nous sommes Ă©galement en dĂ©ficit et si nous offrons au Seigneur un cĹ“ur vide!

 

A) Vide d’intĂ©rioritĂ©. (Mc 7,15) : « Il n’est rien d’extĂ©rieur Ă  l’homme qui, pĂ©nĂ©trant en lui, puisse le souiller, mais ce qui sort de l’homme, voilĂ  ce qui souille l’homme. Â» Quand quelqu’un a le cĹ“ur propre mĂŞme s’il est au milieu d’un bourbier, la boue ne lui fait rien parce qu’il ne la reçoit pas dans son intĂ©rieur, il est libre de recevoir ou non cette pourriture en lui. Quand quelqu’un entend une mauvaise conversation ou voit un mauvais exemple ou quelque chose qui l’entraĂ®ne vers le pĂ©chĂ©, celui qui ne veut pas pĂ©cher ne pèche pas, seul pèche celui qui accepte cette pourriture dans son cĹ“ur. Les consciences timorĂ©es croient souvent qu’ils offensent Dieu parce qu’ils ont entendu ou vu de mauvaises choses. Non, chers frères, ce qui provient de l’extĂ©rieur, si l’homme ne veut pas le recevoir dans son cĹ“ur, ne le souille nullement. Si en ces temps de crimes, de violences et de vengeances, l’homme conserve son cĹ“ur sans haine, plus aimant, la situation qui nous environne ne lui cause pas de mal. Cette ambiance cause du prĂ©judice Ă  celui qui la reçoit et qui y est prĂ©disposĂ© par un cĹ“ur envenimĂ©.

 

L’intĂ©rioritĂ© consiste en ce que Dieu n’ait pas Ă  se plaindre : « Leur cĹ“ur est très loin de moi. Â» Quel est le cĹ“ur qui en est près? Comme le Seigneur se prĂ©occupe d’avoir auprès de Lui ses fils! MĂŞme s’il s’agit d’un pĂ©cheur repenti. C’est pour cela que nous dĂ©nonçons le crime et tant de choses qu’il nous faut dĂ©noncer aujourd’hui, il ne s’agit pas pour nous de gagner des applaudissements. Ce qui m’intĂ©resse c’est la conversion du pĂ©cheur, que l’homme que je dĂ©nonce parce qu’il a commis un enlèvement, parce qu’il a commis une injustice, parce qu’il a tuĂ© ou torturĂ©, qu’il se convertisse. Dieu ne veut pas la mort du pĂ©cheur, sinon qu’il se convertisse et qu’il vive. Cela ne me rĂ©pugnerait pas, si j’ai le bonheur d’aller au ciel, d’être en ce ciel auprès de ceux qui aujourd’hui se disent mes ennemis, parce que lĂ -haut nous ne serons pas ennemis. Je ne le suis de personne, mais, Ă  ceux qui gratuitement veulent ĂŞtre mes ennemis, convertissez-vous Ă  l’amour et dans l’amour nous nous rencontrerons dans la fĂ©licitĂ© de Dieu. Je dĂ©sire pour tous cette allĂ©gresse de cette intimitĂ© du Seigneur.

 

N’ayons pas le cĹ“ur vide dans cette intĂ©rioritĂ© parce que le principal dans la religion c’est l’intĂ©rieur, lĂ  oĂą Dieu regarde. La Bible dit : « Nous connaissons les hommes par leur visage, mais Dieu nous connaĂ®t par le cĹ“ur. Â» « Ce n’est pas celui qui dit “Seigneur! Seigneur!” qui entrera dans le Royaume des cieux, sinon celui qui adore le Seigneur en toute sincĂ©ritĂ©. Â» Puisse, Dieu, ce vide d’intĂ©rioritĂ© ne pas ĂŞtre pour nous une source de condamnation. Parce que pour plusieurs la religion ne les remplit pas, ils prĂ©fèrent ĂŞtre vides de religion.

 

Remplissez-vous d’intĂ©rioritĂ© et vous verrez ce que disait saint Augustin le pĂ©cheur : « Je marchais au-dehors de moi et je ne rencontrais pas la paix. Et, stupide, je ne savais pas que les merveilles que je recherchais au-dehors de moi, c’est Toi, Seigneur, qui leur donnais leur beautĂ©. Tu Ă©tais Ă  l’intĂ©rieur de moi, m’appelant pour que de l’intĂ©rieur je puisse regarder ma beautĂ© intĂ©rieure! Quand j’y suis entrĂ©, j’ai abandonnĂ© ces fausses beautĂ©s qui me faisaient pĂ©cher et de cette beautĂ© intĂ©rieure de ma vie, j’ai approfondi ma relation avec Toi! Oh! merveille! Toujours ancienne et toujours neuve, comme j’ai mis du temps Ă  te connaĂ®tre! Â» Mais il le connut et il se sauva et il fut saint. La faute du pĂ©cheur importe peu, quand un homme a rencontrĂ© cette merveille intĂ©rieure de la relation avec le Seigneur. C’est Ă  cela qu’Il nous appelle aujourd’hui, contre tous ces vides qui consistent Ă  faire consister la religion en des choses extĂ©rieures.

 

 

B) Un autre vide terrible que le Christ dĂ©nonce aujourd’hui : le vide de la rĂ©vĂ©lation et de la vĂ©ritĂ©. Ici Il nous touche de plus près.

 

 

Fausse religion. Attitudes traditionalistes

 

« Ils prennent bien soin de se laver les mains, de ne pas toucher aux cadavres. Â» Traditions humaines! Mais pour ces traditions humaines, ils ont nĂ©gligĂ© la vĂ©ritable rĂ©vĂ©lation de Dieu. Qui sait, si plusieurs des critiques contre les changements dans l’Église ne procèdent pas de cet esprit? Ils font consister la religion Ă  une quantitĂ© de traditions humaines. Certains cultes sont des traditions humaines, certaines manières de se vĂŞtir, certaines manières de prier. Prier de face, en latin ou en espagnol, ce sont des traditions. Recherchons ce qui est le plus agrĂ©able Ă  Dieu, ce qu’une religion signifie davantage au sein du peuple.

 

Une enquĂŞte a Ă©tĂ© faite en France et elle a donnĂ© des rĂ©sultats qui m’apparaissent terribles. Il y est Ă©crit que l’Église de France a perdu la classe ouvrière Ă  partir du siècle passĂ© et qu’au cours de ce siècle elle est en train de perdre la femme. Parmi la tranche des 18-35 ans a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©e une enquĂŞte chez les femmes pour qui l’Église ne signifie plus rien. Ă€ peine 9 % des femmes de ce groupe d’âge, en France, sont pratiquantes de la religion catholique. Nous pourrions nous aussi parvenir Ă  cette situation si nous faisons consister la religion Ă  certains entĂŞtements traditionalistes, si nous ne faisons pas l’effort de nous mettre Ă  jour et d’essayer de comprendre la multitude, les aspirations et les angoisses du peuple. Je ne dis pas que nous devons nous identifier avec tout ce que le peuple demande, sachons ĂŞtre l’écho des ses angoisses et de ses espoirs, sachons, comme le Concile Vatican II le veut, ĂŞtre des interprètes des hommes d’aujourd’hui, ĂŞtre une religion qui exprime l’aspiration de nos gens.

 

Je me rĂ©jouis que nos nouvelles communautĂ©s, plusieurs de nos prĂŞtres, la ligne pastorale de l’archidiocèse veuillent aller dans la direction indiquĂ©e par le Concile de notre siècle et par les grandioses rĂ©unions des Ă©vĂŞques d’AmĂ©rique latine : MedellĂ­n et Puebla, qui ne sont pas autre chose que l’effort pour apporter au siècle actuel. Et Puebla dit : « Dans le prĂ©sent et dans le futur. Â» Une Église qui est la seule qui puisse sauver, mais qui peut perdre toute sa force de Salut si elle n’est pas dĂ©testĂ©e du monde.

 

Très chers frères, nous devons tous faire l’effort de construire une religion qui n’est pas vide des pensĂ©es de Dieu parce qu’elle demeure attachĂ©e aux traditions humaines. Comme cela fut triste pour le Christ, Lui qui Ă©tait la Parole rĂ©vĂ©lĂ©e de Dieu, d’avoir Ă  dire Ă  ceux qui l’écoutaient : « Il vint vers les siens, mais les siens ne Le reçurent pas. Â» Ils prĂ©fĂ©rèrent leurs traditions de se laver les mains, de ne pas toucher aux morts, de fuir les lĂ©preux – toutes ces hypocrisies – et ils refusèrent l’appel de spiritualitĂ© et d’actualitĂ© que le Christ leur apporta.

 

J’aimerais Ă©galement souligner ici combien d’hommes au Salvador, de jeunes, d’étudiants, de professionnels suivent de fausses religions. LĂ , on rencontre le courant des agnostiques, lĂ  ce sont les TĂ©moins de JĂ©hovah, les mormons. Et ils se gagnent des adeptes, mais Ă  eux tous JĂ©sus-Christ pourrait dire aujourd’hui : « Vous suivez des doctrines humaines et vous oubliez la rĂ©vĂ©lation du Seigneur. Â» Étudions, frères, ne les laissons pas nous enlever notre foi qui est une grâce de Dieu. Nous jouons avec celle-ci lorsque nous la comparons et nous la plaçons derrière d’autres choses qui ne sont pas la vĂ©ritable Église qui s’efforce de comprendre notre peuple. Cela me fait vraiment mal. Notre effort pastoral veut ĂŞtre la voix de l’angoisse de notre peuple. Ceux qui sont installĂ©s, il est clair qu’ils n’aiment pas que nous les dĂ©rangions! Mais l’Église n’accomplirait pas son devoir si nous ne dĂ©fendions que les minoritĂ©s dans leurs privilèges et si nous n’aimons pas le peuple en tentant de donner notre vie pour lui.

 

 

C) Un vide d’œuvre.

 

C’est la seconde lecture (Jc 1,17-18,21b-22,27) d’aujourd’hui : l’épĂ®tre de saint Jacques. Je vous invite Ă  lire attentivement toute cette Ă©pĂ®tre. Saint Jacques est l’homme pratique qui dit aux chrĂ©tiens convertis du judaĂŻsme, prĂ©cisĂ©ment Ă  toutes ces astuces des pharisiens : « Faites bien attention de faire consister votre religion en des choses thĂ©oriques! Â» Si une religion est vide d’œuvre, elle n’entrera pas au Royaume des cieux. Le Seigneur l’a dĂ©jĂ  dit : « Ce n’est pas celui qui dit “Seigneur! Seigneur!” – celui qui prie beaucoup – qui entrera au Royaume des cieux, mais celui qui accomplit la volontĂ© de mon Père qui est dans les cieux. Â»

 

L’épĂ®tre d’aujourd’hui, nous donne deux exemples (Jc 1,27) : « Visiter les orphelins et les veuves dans leurs Ă©preuves, se garder de toute souillure du monde. Â» C’est une expression biblique qui veut dire : s’occuper du nĂ©cessiteux. Puebla ne fut que l’écho de cette voix quand il dit que l’option prĂ©fĂ©rentielle de l’Église d’AmĂ©rique latine doit ĂŞtre l’option prĂ©fĂ©rentielle pour les pauvres. Il explique parfaitement : Il ne s’agit pas de diviser les pauvres et les riches. Observez bien, frères, n’est-ce pas ce que nous disions? Puebla explique ainsi, cela veut dire appeler tous sans distinction sociale Ă  nous prĂ©occuper du pauvre comme s’il s’agissait de notre propre cause et plus encore, comme un des devoirs que le Christ nous a lĂ©guĂ©s : « Tout ce que vous faites aux plus pauvres d’entre les miens c’est Ă  moi que vous le faites. Â»

 

Ici, tous sont appelĂ©s, sans exclusion de personne. Les riches, principalement, qu’ils viennent et se sauvent. Mais ils se sauveront seulement s’ils viennent faire ce que le Christ veut : non pas vivre en gaspillant, en offensant la pauvretĂ© de la majorité… Les pauvres nous donnent l’opportunitĂ© de ne pas avoir une religion vide d’œuvre. Parce que les Ĺ“uvres que Dieu va juger pour me sauver sont prĂ©cisĂ©ment celles-ci : « J’ai eu faim et tu m’as donnĂ© Ă  manger, j’ai eu soif et tu m’as donnĂ© Ă  boire, j’étais en prison et tu m’as visitĂ©, j’étais malade et tu es venu me rĂ©conforter. Â» Enfin, toutes les situations humaines qui engendrent la pauvretĂ©, la souffrance et l’exclusion, tout cela, très chers frères, est la mine d’oĂą il nous faut extraire la richesse afin de ne pas professer une religion sans Ĺ“uvre. Comme est proche cette mine et comme elle est dĂ©prĂ©ciĂ©e par plusieurs! Ne servons pas le pauvre avec paternalisme, du haut vers le bas, en le secourant. Ce n’est pas cela que Dieu veut, sinon de frère Ă  frère. C’est mon frère, c’est le Christ et le Christ je ne le vois pas du haut vers le bas, sinon du bas vers le haut, en le servant. […]

 

Cette pièce, ce morceau de pain, ce tissu que je vais lui donner pour qu’il se protège du froid, cette chemise qui ne me sert plus dans ma garde-robe, reçois-les, Seigneur, parce que c’est à Toi que je la donne. Ah! Si nous remplissions notre vie de bonnes œuvres.

Je tiens Ă  fĂ©liciter tant de bonnes Ĺ“uvres que je vois se rĂ©pandre dans tout le diocèse! Il y a de bonnes personnes qui se prĂ©senteront au Ciel avec les mains bien remplies d’œuvres et qui ne dĂ©plairont pas au Seigneur avec une religion sans Ĺ“uvre. La foi ne suffit pas, sans les Ĺ“uvres qui prouvent la foi. C’est pourquoi, quand le Christ parle de ces vides, Il nous signale une chose encore plus horrible : c’est le cĹ“ur pourri. Ce n’est pas ce qui entre de l’extĂ©rieur qui souille l’homme, sinon ce qui sort du cĹ“ur de l’homme. Il fait une longue liste qui pourrait bien ĂŞtre le catalogue de notre triste situation salvadorienne. D’oĂą est sorti tout ce que nous respirons actuellement au Salvador? Cela ne fait pas de doute, le Christ nous l’a dĂ©crit aujourd’hui : « Du cĹ“ur de l’homme sortent les mauvaises intentions, les fornications, les vols, les homicides, les adultères, les diffamations, les convoitises, les injustices, les fraudes, les dĂ©vergondages, les envies, l’orgueil et la frivolitĂ©. Â» 02/09/79, p.215-219, VII.